Les films de sport, tant au Japon qu’ailleurs, suivent souvent le schéma narratif classique du “zéro devenu héros”, culminant généralement lors d’une grande compétition. My Sunshine, le deuxième long-métrage de Hiroshi Okuyama, adopte cette structure, mais l’utilise pour raconter une histoire d’apprentissage plus riche et profonde que ce que le genre a l’habitude de présenter. Bien que le film mette en scène de jeunes patineurs artistiques, il s’éloigne des clichés habituels.
Écrit par Okuyama, qui a lui-même pratiqué le patinage et participé à des compétitions pendant sept ans, le film se distingue par sa dimension personnelle et authentique.
Le personnage de l’entraîneur, interprété par un Sosuke Ikematsu très impliqué, incarne un véritable professionnel, loin des stéréotypes souvent rencontrés dans les films de sport. Les scènes de patinage, filmées de près par Okuyama sur une paire de lames, combinent un réalisme saisissant et une esthétique lyrique. La lumière douce qui baigne les deux protagonistes évoque la joie et la grâce de la jeunesse.
Un trio plein de non-dits
Cependant, My Sunshine va bien au-delà d’une simple ode au patinage et à ses athlètes. Le personnage principal, Takuya (Keitatsu Koshiyama), est un collégien rêveur et bègue, qui ne brille ni en baseball ni en hockey sur glace, les deux sports majeurs de sa ville du nord de l’archipel, qui reste anonyme. Dans un seishun eiga (film d’adolescence) traditionnel, il serait la cible de moqueries, mais ici, il est accepté par son entourage et soutenu par un ami fidèle.
Un jour, Takuya tombe par hasard sur une séance d’entraînement de patinage artistique à la patinoire locale, où il observe Sakura (Kiara Nakanishi) glisser et sauter avec aisance sous l’œil attentif de l’entraîneur Arakawa (Sosuke Ikematsu). Cette rencontre lui offre une révélation : il se met alors à essayer maladroitement d’exécuter des figures de patinage.
Arakawa, touché par l’enthousiasme de Takuya, décide de lui donner des cours pendant son temps libre. Il a vite une idée : former un duo de danseurs sur glace avec Takuya et Sakura, espérant ainsi réaliser la gloire qui lui échappe en entraînant des enfants individuellement dans ce coin perdu.
Le récit avance à un rythme apaisé, avec peu de dialogues. Cependant, une fois le trio formé, la légèreté des premières scènes laisse place à une tension palpable, révélée par quelques mots et des regards échangés, surtout avec l’introduction du partenaire d’Arakawa, propriétaire d’une station-service locale (Ryuya Wakaba).
Le mot de la fin au spectateur
Dans son premier film, Jésus (2019), Okuyama confrontait déjà ses personnages à des situations remettant en question leurs certitudes. Il refuse de catégoriser leurs réactions comme bonnes ou mauvaises. Les conséquences de leurs actes mettent en lumière le conservatisme profond de la société japonaise, d’une manière à la fois poignante et incisive.
L’inspiration principale du film provient de Boku no ohisama, une chanson du duo de J-pop Humbert Humbert, qui résonne pendant le générique. Cette mélodie évoque la difficulté d’exprimer ses pensées, même quand les mots sont là. Cela s’applique particulièrement à Takuya, dont les sentiments demeurent en partie mystérieux, à l’exception de ceux qu’il ressent pour le patinage artistique et le bienveillant Arakawa.
Ce petit chef-d’œuvre, dont les divers éléments s’agencent avec une précision remarquable et un talent cinématographique inné, laisse sa conclusion ouverte à l’interprétation. Comme My Sunshine ne établit pas de dichotomie morale, son message final appartient au spectateur.
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