Avant de poser ses valises dans les studios de Boulogne-Billancourt, le journaliste a présenté pendant plus de 20 ans le JT, ou plutôt TJ (pour Télé-Journal) de l’autre côté du Jura. Ses interviews au ton parfois ferme, mais emphatique lui ont permis de se tailler une solide réputation auprès du public. Pour Le HuffPost, le journaliste revient sur les séquences les plus marquantes de sa carrière dans notre vidéo à découvrir en tête d’article.
En tête-à-tête avec Yasser Arafat à 26 ans
En 1991, il interviewe Yasser Arafat trois fois avant qu’il devienne président de l’autorité palestinienne. À cette époque, l’homme est encore en exil en Tunisie. “Il était dans une sorte de cave sinistre de Tunis”, se remémore celui qui signait là sa première “grande interview” pour La Tribune de Genève. “Il y avait un petit côté aventureux, car en plein milieu de la nuit ils m’ont appelé pour me dire: ‘ça y est, l’interview est prête’. Ils m’ont baladé en voiture dans le quartier pour que je perde le sens de l’orientation et ça m‘avait impressionné à 26 ans.”
Après avoir fait ses armes dans la presse écrite, il entre au service étranger de la RTS en 1995, où il deviendra présentateur du Télé-Journal et intervieweur vedette de la chaîne. Son “tableau de chasse” des personnalités interviewées va vite se garnir. Il rencontre notamment l’ancien dirigeant de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev ainsi que Vladimir Poutine pourtant peu bavard avec les journalistes. Un entretien entre les deux hommes qui a d’ailleurs bien failli tomber à l’eau.
“Nous étions à Saint-Pétersbourg et on a mis beaucoup de temps avant de convaincre son entourage. Quelques minutes avant que l’on puisse se mettre en place ils nous disent ‘oui’. Ça a été une interview impressionnante, car Vladimir Poutine a quelque chose de ces policiers des services secrets, ce côté cynique quand il vous fixe. Il y avait une telle ambiance que l’on ne savait plus très bien qui était l’interviewé et qui était l’intervieweur.”
Mais ses interviews les plus marquantes ne sont pas celles qui font le plus de bruit. Début 2020, il recueille le témoignage de Ginette Kolinka, rescapée d’Auschwitz, une séquence intense émotionnellement. ”Ce ne sont pas forcément les ‘grandes interviews’ dont je suis le plus fier”, explique celui qui rêvait d’interviewer Primo Lévi. “J’ai en mémoire des interviews de rescapés des camps de concentration, dont celle avec Ginette Kolinka. C’est une histoire qui m’a toujours passionnée. Ces souvenirs-là, quand vous les accouchez, ce sont les plus forts.”
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“J’ai longtemps caché mon numéro. J’ai même voulu le faire enlever. Je ne voulais pas embêter les gens.” Extraordinaire Ginette Kolinka, 95 ans, si directe, si claire dans son témoignage nécessaire sur Auschwitz. J’ai interviewé plusieurs rescapés 1/2 https://t.co/PPJWVVP09kpic.twitter.com/zFS02pxd4u
— Darius Rochebin (@DariusRochebin) March 1, 2020
Parmi les personnalités françaises qui ont échangé avec lui, on retrouve de nombreux artistes ou sportifs tels Gérard Depardieu, Jean Dujardin, Omar Sy ou Kylian Mbappé. Le “PPDA suisse” a également “cuisiné” nos politiques: François Hollande ou encore François Fillon qui s’était d’ailleurs payé Emmanuel Macron à son micro en octobre 2019. Darius Rochebin a d’ailleurs interviewé ce dernier à trois reprises, avant et après son élection.
“C’est vrai que le pouvoir change un peu, mais ce n’est pas ce qui m’a marqué dans le cas d’Emmanuel Macron. Sa ‘disponibilité intellectuelle’ est restée la même. Certains hommes politiques sont tellement saturés d’informations et de responsabilités qu’ils vous donnent une réponse minimale un peu toute faite. Dans le cas d’Emmanuel Macron il y a au contraire une sorte de fraîcheur un peu étonnante, jusqu’à parfois entrer sur des terrains imprévus.”
Un challenge de taille en prime-time
L’arrivée de Darius Rochebin sur LCI après 25 ans et 4000 journaux télé à la RTS est sans conteste la grande surprise de cette rentrée média, toutes chaînes confondues. Elle intervient alors que LCI se bat avec CNews pour le titre de seconde chaîne d’information le soir, derrière BFM TV.
Le présentateur suisse va être confronté à cette concurrence qu’il ne connaissait pas ou très peu en Suisse, où son Télé-Journal dépassait les 57% de part d’audience (contre environ 1% pour LCI). En plus des autres chaînes infos, il fera face aux puissants JT de France 2 et TF1 et à un autre magazine de décryptage de l’actualité: l’incontournable “28 Minutes” d’Arte.
Le “20h00 de Darius Rochebin” est segmenté en une première partie d’analyse de l’actualité, suivie d’un long entretien d’une personnalité jusqu’à 21h15. Le Suisse pourrait tirer son épingle du jeu dans le PAF grâce à son style d’interview qui sort de l’ordinaire. Jamais dans l’agressivité, mais sans être tendre pour autant et toujours avec le sourire.
“Il y a des journalistes qui sont un peu procureurs ou juges; ce ne sera pas mon cas”, promet-il. “Je serai plutôt dans le camp des indulgents, des relativistes. Ça m’est souvent arrivé d’interviewer des corrompus et si vous prenez un peu de champ historique Richelieu ou Mazarin étaient corrompus… Ils n’en étaient pas moins des grands personnages de l’Histoire. Prendre du recul permet d’avoir un regard un peu plus relativiste et de cultiver une forme de diversité morale.”
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