Avant la présidentielle, « En même temps » s’amuse des vices de nos politiques
Dans cette comédie tordante, Benoît Délépine et Gustave Kervern (Saint Amour, Effacer l’historique) s’appliquent à mettre en images les vices de ces hommes et femmes politiques qui nous horripilent et nous exaspèrent. Le synopsis résume d’ailleurs assez bien cette volonté.
″À la veille d’un vote pour entériner la construction d’un parc de loisirs à la place d’une forêt primaire, un maire de droite décomplexée, Didier Béquet (Jonathan Cohen) essaye de corrompre son confrère écologiste Pascal Molitor (Vincent Macaigne).”
Didier Béquet, symbole des girouettes en politique
Après ses rôles dans La Flamme ou Familly Business, Jonathan Cohen incarne à merveille le portrait type de l’homme politique que l’on adore détester. Celui-ci est ouvertement sexiste, homophobe, machiste et surtout, il n’a pas de conviction, si ce n’est celle d’en changer régulièrement. Il revendique tantôt un héritage communiste, “car (il) a vendu des chaussettes Che Guevara à la Fête de l’Huma”, tantôt son passé à l’extrême droite “car c’est le parti ou il y a le plus de blondes au mètre carré”, comme vous pouvez le voir dans l’extrait ci-dessous.
Tout est dans le paraître plutôt que dans les idées, au point que Didier Béquet, désormais au Divers Extrême Centre (DEC), va jusqu’à se blanchir les cheveux avec une brosse à dents pour se donner un aspect de vieux sage lorsqu’il va à la rencontre de retraités.
“C’est un prototype de mec d’extrême droite, mais qui surfe sur ces idées pour aller dans le sens des électeurs, de plus en plus sensibles à garder leur petit pré carré”, explique Gustave Kervern dans les notes de production. “C’est un opportuniste qui profite de son statut et que les gens prennent plus au sérieux parce qu’il paraît plus armé et plus autoritaire.”
Jonathan Cohen incarne-t-il un homme politique en particulier? Les réalisateurs ne le revendiquent pas. Toutefois, ils précisent qu’ils se sont inspirés de la tenue d’un certain Laurent Wauquiez, l’ex-patron des Républicains très à droite, pour le rôle joué par Jonathan Cohen. Un indice loin d’être innocent. Pour le personnage incarné par Vincent Macaigne, c’est logiquement la tenue du candidat EELV à la présidentielle, Yannick Jadot, qui a été passée au crible par les réalisateurs.
La corruption illustrée façon comédie
En même temps illustre aussi la corruption en politique, toujours en prenant le parti de la comédie. Ainsi, plutôt que de montrer des liasses de billets échangés, les réalisateurs proposent de montrer les plaintes de la secrétaire de Mairie qui reproche au nouvel élu écologiste de ne plus donner “des petits billets” à chaque nouveau permis de construire délivré. “On s’amusait plus avec l’ancien Maire, c’était plus rigolo”, lâche-t-elle même. Drôle, cynique et terriblement efficace.
Le film montre des hommes politiques incapables de trancher, qui jouent au jeu de la séduction pour tenter de satisfaire tout le monde. Difficile d’être plus dans l’actualité.
Le titre est d’ailleurs emprunté à la désormais célèbre formule employée à maintes reprises par le candidat Macron durant la campagne pour la présidentielle de 2017. “En même temps”, ou comment trois mots sont devenus synonymes d’un positionnement politique inextricable: “ni de droite, ni de gauche; ou un peu des deux”.
“Au départ, le film s’appelait Union nationale mais c’était un titre un peu trop martial”, poursuit Gustave Kervern dans les notes de production. “En même temps est arrivé vite et, malgré les suggestions postérieures, il est resté le plus pertinent. (…) Le principe du ‘en même temps’ pour un homme politique, devant le chaos qui s’annonce, c’est la certitude absolue d’aller droit dans le mur. Si les décisions ‘enmêmetemptesques’ visent à épargner le maximum de monde, c’est une vision à court terme qui ne sera jamais à la hauteur des périls qui nous attendent. Ce n’est pas en distribuant des parapluies qu’on se protègera d’un tsunami.”
D’ailleurs, derrière cette satire des politiques, le film évoque deux combats majeurs des années à venir. Celui de la lutte contre le réchauffement climatique, au travers de cette construction d’un parc de loisir dans une forêt. Le second, celui de la place des femmes dans la société, au travers la lutte joyeuse et décomplexée des “Colle-Girls”, collectif féministe qui va avoir un rôle déterminant dans l’intrigue du film avec sa glu…
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