Ce que le Conseil de défense sanitaire va devoir trancher
Ce Conseil de défense, présidé par Emmanuel Macron en visioconférence, aura lieu à partir de 16h, soit une heure avant un Conseil des ministres exceptionnel consacré au projet de loi à venir sur le pass vaccinal. Il doit être examiné dès janvier au Parlement pour une mise en place rapide, souhaite l’exécutif.
Avant cela, le gouvernement pourrait prendre des mesures à effet plus immédiat. “Nous avons déjà annoncé des mesures sur le 31 décembre (…) mais si nous constatons qu’il y a une reprise très forte de l’épidémie liée au variant Omicron, nous pourrions évidemment aller au-delà”, avait mis en garde le porte-parole du gouvernement sur France 2 le 21 décembre.
Si par “reprise épidémique très forte”, Gabriel Attal entendait un nombre de cas record, c’est chose faite. Le 25 décembre, la France a dépassé les 100.000 nouveaux cas de Covid-19 en 24 heures, du jamais-vu dans l’Hexagone depuis le début de l’épidémie. Plus de 3000 patients se trouvent en réanimation.
Pour l’instant, la majorité des cas restent dus au variant Delta (97%, selon SPF le 25 décembre) mais la propagation fulgurante de l’ultra-contagieux variant Omicron – au sujet duquel les inconnues sont encore nombreuses – inquiète.
Que va décider l’exécutif? Au Journal du Dimanche, l’entourage du président résumait sa stratégie en trois piliers: “le pragmatisme, la proportionnalité et l’efficacité.”
Le HuffPost vous résume les pistes à l’étude.
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Pass vaccinal
Le projet de loi a été annoncé par le Premier ministre Jean Castex. Le gouvernement souhaite transformer le pass sanitaire en pass vaccinal, début 2022. Soumis au Conseil des ministres ce lundi, le texte doit ensuite arriver au Parlement entre le 10 et le 15 janvier.
Ce pass vaccinal – une “obligation vaccinale déguisée” selon les propres mots du ministre de la Santé – doit mettre la pression sur les quelque 6 millions de Français qui n’ont encore reçu aucune injection.
Toutefois, plutôt que de contraindre, le gouvernement pourrait opter pour une mesure un peu plus incitative: activer le pass vaccinal dès la première injection, à condition de fournir un test négatif en supplément. “S’ils justifient d’une première dose avec un test négatif, ils pourraient quand même avoir accès” aux lieux soumis au pass vaccinal, a confirmé le ministre de la Santé au Parisien.
Selon le JDD, les personnes n’ayant reçu que deux doses de vaccin pourraient aussi conserver un pass vaccinal, toujours à condition de présenter un test. Reste encore à savoir si le test sera payant, comme c’est déjà le cas pour les personnes non vaccinées, et quelle sera sa durée de validité.
Autre hypothèse, évoquée par la présidente de la Commission des lois LREM Yaël Braun-Pivet: un “double contrôle” – schéma vaccinal complet + test – dans certaines situations “exceptionnelles”. Elle a écarté pour l’instant l’hypothèse de ce schéma dans les lieux du quotidien, même si le JDD évoque de son côté la possibilité de l’appliquer aux lieux à très haut risque, comme les discothèques.
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Dose de rappel
Face à l’urgence, la Haute autorité de santé (HAS) a recommandé que la dose de rappel puisse être réalisée à partir de trois mois pour la population éligible. De son côté, le ministère de la Santé a annoncé avant Noël que le délai était dores et déjà ramené à 4 mois – jusque-là il était de 5 mois après la dernière injection – et non à partir du 3 janvier comme initialement envisagé.
Dans son avis, la HAS a aussi préconisé l’administration dès à présent d’une dose de rappel chez les 12-17 ans souffrant d’immunodéficience ou d’une comorbidité à risque de forme grave.
Autant de points qui pourraient être tranchés ce lundi.
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Isolement raccourci pour les cas contacts
Aujourd’hui, une personne cas contact doit s’isoler entre 7 jours et 17 jours (si elle partage le domicile de la personne contaminée). Mais ces règles vont évoluer, a annoncé jeudi 23 décembre Olivier Véran, le ministre de la Santé.
En cause, la crainte d’une “désorganisation de la société”, pointée par le Conseil scientifique. Il faut s’attendre à “une désorganisation possible d’un certain nombre de services essentiels” en janvier, à cause de “l’absentéisme” et des “arrêts de travail” dus au “très grand nombre de contaminations à Omicron”, a averti son président Jean-François Delfraissy.
Les spécialistes ignorent encore à ce stade le “temps de génération” du variant Omicron, c’est-à-dire le nombre de personnes qu’une personne contaminée pourra infecter. Mais les chiffres grimpent vite. “Avec plus de 100.000 cas quotidiens, si vous avez dix contacts effectifs par cas, c’est 1 million de cas contact par jour qu’il faudrait consigner à domicile”, estimait le professeur Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale à Genève.
2/3 – Cette disposition risque de mettre le pays à genoux. Sachant qu’en moyenne une personne contamine plus de 10 personnes, avec 100’000 cas par jour, c’est 1 million de cas-contacts en quarantaine 7 à 17 jours,soit >10 millions-jours d’arrêt généré chaque jour…
— Antoine FLAHAULT (@FLAHAULT) December 22, 2021
Pour limiter les répercussions sur l’économie nationale, l’instance de conseil du gouvernement préconise donc d’alléger les règles d’isolement, en prenant en compte le fait qu’Omicron semble entraîner moins de formes sévères du Covid.
La question se pose notamment pour certains secteurs jugés essentiels, comme le personnel soignant ou la grande distribution alimentaire. “Il y aura des ajustements [des règles, NDLR] à faire en fonction de la sévérité clinique, des tests à faire sur la contagiosité. Des ajustements qui dépendront aussi des fonctions occupées, par exemple à l’hôpital. Il y a des assouplissements possiblement nécessaires, avec parallèlement, une hausse du respect des gestes barrières”, anticipe dans Les Échos Arnaud Fontanet, épidémiologiste et membre du Conseil scientifique.
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Télétravail
Dès le 22 décembre, la ministre du Travail Élisabeth Borne a appelé les entreprises à “accélérer” le recours au télétravail, leur demandant de se préparer “dès maintenant” à le “renforcer” à la rentrée avec une cible de 3 à 4 jours par semaine.
À l’heure actuelle, le protocole sanitaire en entreprise prévoit que “les employeurs fixent, dans le cadre du dialogue social de proximité, les modalités de recours” au télétravail, ajoutant que “dans le contexte de reprise épidémique, la cible doit être de deux à trois jours” par semaine.
Les contrôles ont été renforcés, mais jusqu’à présent, le gouvernement a préféré miser sur la responsabilité des employeurs et des salariés pour éviter la formation de cluster en entreprise.
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Repousser la rentrée scolaire?
Jean-Michel Blanquer ne cesse de le répéter: les écoles sont “la dernière chose” qui doivent fermer. De ce fait, le ministre de l’Éducation nationale a jusqu’à présent écarté l’idée de repousser la rentrée, même s’il a reconnu le 19 décembre que cette hypothèse est “toujours sur la table”.
Elle l’est plus que jamais à la lumière des derniers chiffres épidémiologiques. Ce dimanche 26 décembre, 50 soignants ont d’ailleurs “déploré” dans une tribune dans le JDD “les faibles moyens déployés jusqu’à présent par le ministère de l’Éducation nationale pour freiner l’épidémie dans les écoles, que ce soit pour lutter contre le risque aéroporté de contamination, comme pour organiser des campagnes de tests efficaces.”
Se disant “très inquiets du niveau actuel de circulation virale du coronavirus parmi les enfants et adolescents en âge scolaire”, ils réclament le report de la rentrée au 3 janvier “avec recours au télé-enseignement jusqu’au retour à des seuils d’indicateurs sanitaires définis publiquement”. Ils demandent également “l’élaboration d’un nouveau protocole sanitaire dans les écoles”, conçus avec les professionnels de santé.
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Couvre-feu et confinement n’auraient “pas les faveurs du gouvernement” (à ce stade)
C’est sans doute le pire cauchemar d’une grande partie des Français: un retour du couvre-feu (comme en Catalogne) ou, pire, du confinement (à l’image des Pays-Bas, jusqu’au 14 janvier). Jusqu’à présent, le gouvernement a écarté ces deux options, misant sur la vaccination.
Mais au vu de l’évolution de la situation, rien ne dit que l’exécutif ne les étudiera pas de nouveau, et ce d’autant plus que la petite musique s’installe. Dans son avis du 16 décembre, le Conseil scientifique a recommandé la mise en place d’un couvre-feu le soir du 31, tandis que d’autres plaident pour son instauration immédiate.
C’est le cas de l’ex-directeur général de la santé, l’épidémiologiste William Dab, qui dans le JDD a souligné “l’efficacité du couvre-feu”, un “outil à mettre en place tout de suite, avant le Réveillon.” Il plaide également pour la fermeture des “lieux clos où l’on ne porte pas de masque comme les restaurants et cafés”.
Qu’en pensent l’Élysée et Matignon? “Ni laxisme, ni fermetures forcenées. On agit vite et fort, sans verser dans le catastrophisme de ceux qui veulent tout fermer”, selon l’entourage d’Emmanuel Macron cité par Le Figaro. Des restrictions de type couvre-feu ou confinement n’auraient “pas, à ce stade, les faveurs du gouvernement”, renchérit le JDD. Même si un conseiller de l’exécutif affirme à LCI que la question d’un couvre-feu le soir du 31 décembre “se pose”.
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