Dans les ruines de la vie nocturne de Beyrouth

Pour couronner le tout, le 4 août 2020, une gigantesque explosion dans le port de Beyrouth a tué 218 personnes, laissé environ 300 000 personnes sans abri et causé des dégâts matériels estimés à 3,5 milliards d’euros, selon la Banque mondiale. L’incident a également exacerbé la crise politique du pays, des enquêtes ultérieures ayant révélé que c’était précisément la négligence institutionnelle qui avait préparé le terrain pour cette tragédie.
Parmi les bâtiments endommagés par l’explosion se trouvaient certaines des boîtes de nuit les plus réputées de la capitale. Pour les connaisseurs du monde entier, la vie nocturne de Beyrouth était comparable à celle de Berlin, Londres et New York. Au fil des années, des clubs comme l’AHM et le Gärten ont accueilli des sommités de la house et de la techno, comme Sven Väth, Gerd Janson et Henrik Schwarz, donnant à Beyrouth la réputation de ville qui ne dort jamais.
Mais même pour les clubs qui sont sortis indemnes de l’explosion, la fête a pris fin temporairement. Dans un pays qui doit faire face à des pénuries quotidiennes de carburant, d’eau, d’électricité et de médicaments, le clubbing est évidemment relégué au second plan. En fait, la plupart des gens n’ont pas de générateur et doivent se contenter d’une ou deux heures d’électricité par jour.
Alors que la situation au Liban se détériore, penser à l’avenir de la scène musicale de la capitale peut sembler un luxe. Mais des clubs comme le B018 et le Ballroom Blitz ont apporté à la ville et à ses habitants une source de bonheur, d’expérimentation et de liberté d’expression. La vie nocturne avait pour les Beyrouthins la même résonance que pour les clubbers du monde entier ; elle ne se résumait pas à écouter de la musique dans une salle sombre, tard dans la nuit.
En mars dernier, j’ai visité les sites des clubs qui ont eu une signification importante pour moi. J’ai pris ces photos sur pellicule avec un appareil analogique, en utilisant ce qui me tombait sous la main. Comme la monnaie libanaise ne vaut presque rien, il est pratiquement impossible d’importer des marchandises, ce qui rend le matériel photo extrêmement difficile à trouver. Certains des films auxquels j’ai eu accès étaient en noir et blanc, d’autres étaient périmés.
J’ai ressenti le besoin de rendre la pareille à ces endroits désormais déserts. Les lumières sont peut-être éteintes, la musique est peut-être silencieuse, mais j’espère qu’un jour, la vie reprendra ses droits, dans les clubs et à Beyrouth en général.
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