Il faut dire que les échanges promettent d’être rudes entre ces deux personnalités “que tout oppose”, comme le dit la grosse voix du teaser, presque recouverte par la musique martiale qui l’accompagne. D’un côté le polémiste d’extrême droite, condamné à plusieurs reprises pour incitation à la haine, est omniprésent dans les médias pour dérouler ses thèses anti-immigration.
De l’autre, le chef de file de la France insoumise, adepte du concept de “créolisation” de la société, commence cette année dans une forme toute relative, loin, dans la dynamique, du score qu’il avait réalisé au printemps 2017. Les deux sont crédités aujourd’hui de 11% d’intentions de vote dans un récent sondage Harris Interactive pour Challenge.
De quoi pimenter encore davantage un duel qui aura crispé la gauche, entre les tenants d’une imperméabilité totale avec l’extrême droite, et ceux qui estiment devoir mettre les mains dans le cambouis pour mieux le contrer.
“Il faut qu’on s’y colle”
C’est ainsi que le tribun de 70 ans et son entourage se justifient. Éric Coquerel, par exemple, nous parle d’un “affrontement nécessaire” contre “le principal vecteur de l’extrême droitisation de la vie politique.” “Si Zemmour avait eu de vrais contradicteurs face à lui, on n’aurait pas eu besoin de ce débat. Mais on arrive à des situations où il balance des mensonges qui deviennent des faits et des opinions”, déplore l’élu de Seine-Saint-Denis, ajoutant, presque blasé: “alors il faut qu’on s’y colle.”
Dans la même veine, Jean-Luc Mélenchon promet “un combat” contre l’ancien “brillant commentateur” devenu le “lepénisme concentré.” “Il est d’extrême droite et incarne tout ce que j’ai toujours combattu”, faisait-il valoir, lundi soir, sur LCI, à trois jours du débat. Car au-delà de ce rendez-vous, et du cas Zemmour, le candidat des Insoumis a souvent croisé le fer avec les représentants de ce camp, de sa propre initiative, sur les terrains médiatiques… ou politiques. Et ce, bien avant sa confrontation avec le chantre de la théorie complotiste du “Grand remplacement.”
En 2012, par exemple, il avait choisi de défier Marine Le Pen sur ses terres en se présentant aux élections législatives à Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais. Le but, à l’époque? Faire reculer le Front national (ancêtre du RN) “rue par rue, peur par peur.”
Le résultat? Une déroute cuisante pour l’ancien socialiste -(21% des voix contre le double pour son adversaire)- lequel se gargarisait, alors, d’avoir contribué à empêcher l’élection de la patronne de l’extrême droite, battue au deuxième tour par le chef de file du PS.
Occuper le terrain à gauche
“Jean-Luc (Mélenchon) ne s’est jamais caché, y compris quand cela pouvait être difficile pour lui”, résume Éric Coqurel à propos de cette expérience malheureuse, car “c’est le fond de ses convictions, il est viscéralement anti-raciste.”
Derrière ces arguments, point, en creux, chez les Insoumis, la conviction que leur candidat est le mieux placé, le seul à même de démonter “la baudruche Zemmour” et l’extrême droite, selon les mots de Manuel Bompard, son directeur de campagne. “Si on regarde les différents candidats à l’élection présidentielle, notre discours est le plus antithèse” de celui du polémiste, ajoute Éric Coquerel, “que ce soit sur l’antiracisme ou le reste.”
Motivation sans doute moins reluisante, l’affrontement entre les deux bretteurs, ce jeudi, permet également à Jean-Luc Mélenchon d’occuper le terrain à gauche à l’heure où la socialiste Anne Hidalgo lance sa campagne et où les écologistes achèvent leur primaire. Au risque de s’attirer la foudre.
″Cela s’appelle gratter le buzz” avec pour seul résultat “de donner de la force aux idées choquantes” de l’essayiste, fustigeait Yannick Jadot, mardi sur BFMTV, entre autres réactions outrées venues de la gauche. Dans ce contexte, une chose apparaît certaine: les deux personnalités, qui s’étaient déjà toisées sur RTL en 2014, vont éclipser le débat sur France 2, le même soir, entre les anciens collègues Valérie Pécresse et Gérald Darmanin. Deux chaînes, deux ambiances.
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