En Lituanie et Lettonie, Macron au défi de manœuvrer sans froisser la Russie
Mais il y a (surtout) un contexte régional et géopolitique qui donne un tout autre intérêt à ce déplacement. Premier élément, la situation explosive en Biélorussie voisine, où les manifestations d’opposants au président contesté Alexandre Loukachenko ne faiblissent pas. Un dossier sur lequel Paris joue déjà à un jeu d’équilibriste vis-à-vis de Moscou et qui implique directement la Lituanie, puisque l’opposante Svetlana Tikhanovskaïa est réfugiée à Vilnius. “Il est clair que Loukachenko doit partir”, a cependant déclaré dimanche Emmanuel Macron, sortant de sa réserve.
“La deuxième chose, c’est qu’évidemment, ce voyage intervient dans un contexte particulier qui est celui de l’affaire Navalny, et des tensions ou des incompréhensions qui s’ensuivent avec la Russie”, note-t-on du côté de l’Élysée, alors que le sujet tourne au dialogue de sourds entre Macron et Poutine. De quoi accroître le degré de sensibilité de ce voyage, au cours duquel l’ombre pesante de la Russie sera évoquée à petites touches durant les deux prochains jours.
Le cas Poutine jamais loin des discussions
Parmi les “convergences” que le chef de l’État souhaite explorer avec ses homologues lituanien et letton, la “lutte contre les cyberattaques et contre la désinformation”, souligne l’Élysée. Sans le dire, c’est directement l’influence de la Russie qui est ici visée, conformément à la méfiance que Macron a toujours assumée à ce sujet, y compris en présence de Vladimir Poutine.
“Ce sera à la fois des thèmes de discussion, mais aussi, sans trop anticiper, l’occasion de propositions communes que nous ferons tous les trois ensemble aux autres Européens”, prévient l’équipe diplomatique du président, dans un contexte où le parlement européen s’est tout récemment doté d’une commission spéciale consacrée à ce sujet. De l’influence russe, géographique et militaire cette fois, il en sera également question dès ce lundi, à l’occasion d’une visite au cimetière d’Antakalnis, où est installé un monument à l’honneur des Lituaniens morts lors des événements de janvier 1991. Des combats provoqués par l’invasion des troupes soviétiques.
Autre déplacement symbolique qui s’inscrit dans ce registre, la visite du bataillon de l’Otan à Rukla, où 300 soldats français sont stationnés. Une présence militaire qui irrite Moscou et qui avait été décidée en réaction à l’annexion de la Crimée.
Un tête-à-tête avec Svetlana Tikhanovskaïa?
Autre dossier qui pourrait froisser la Russie, le cas Svetlana Tikhanovskaïa, l’opposante biélorusse qui n’est pas reconnue par Moscou. Emmanuel Macron profitera-t-il de son séjour à Vilnius pour la rencontrer, au prix d’une possible brouille avec Vladimir Poutine? “Ce n’est pas au programme, mais ce n’est pas exclu”, élude l’Élysée, précisant que l’opposante a déjà eu des contacts en visioconférence avec des officiels français.
Le programme letton du chef de l’État le lendemain sera également marqué par des clins d’œil à la contestation de l’influence russe. Emmanuel Macron participera par exemple à “une table ronde à la Bibliothèque nationale de Riga avec des experts sur les sujets de désinformation”, précise l’Élysée. Une formule prudente qui ne trompe personne quant aux sujets qui devraient y être abordés.
Reste maintenant à savoir à quel point Emmanuel Macron, qui a voulu entamer un nouveau cycle de relations avec Vladimir Poutine, profitera de cette visite dans ces pays historiquement méfiants vis-à-vis de la Russie pour hausser le ton sur les différends opposant Paris et Moscou, au risque de braquer le chef du Kremlin. Ce qui, pour l’heure, n’a jamais été la meilleure option pour faire avancer des dossiers.
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