Éric Dupond-Moretti de nouveau accusé de conflits d’intérêts par la magistrature
Mediapart a révélé vendredi l’ouverture d’une enquête administrative visant le juge d’instruction Édouard Levrault, qui avait été détaché en 2016 et pour trois ans auprès des services judiciaires monégasques, et enquêtait sur un scandale présumé de corruption impliquant des responsables locaux, qui avait secoué la Principauté. Son détachement n’avait pas été renouvelé, et le magistrat avait dénoncé publiquement en juin dernier le fonctionnement de la justice monégasque, revenant notamment sur l’affaire dans l’émission “Pièces à conviction”.
Eric Dupond-Moretti, alors avocat d’un haut policier mis en cause dans l’affaire, s’était emporté dans la presse contre un reportage “plein d’inexactitudes” et “indigne” et annoncé qu’il porterait plainte et saisirait la direction des services judiciaires.
Mi-juin, le ministre d’État, chargé de diriger le gouvernement de la principauté, avait écrit à la garde des Sceaux Nicole Belloubet pour l’informer d’”éventuels manquements aux devoirs déontologiques” du magistrat, a expliqué vendredi à l’AFP l’entourage du ministre.
La direction des services judiciaires a demandé à ce que Édouard Levrault, désormais en poste à Nice, soit entendu par la présidence de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence. Sa convocation lui a été notifiée le 3 juillet, “avant la prise de fonction” quelques jours plus tard de Dupond-Moretti, insiste son entourage.
Une enquête ouverte… et finalement confiée à Castex
Édouard Levrault ayant refusé de répondre aux questions, une enquête administrative a été ouverte fin juillet par l’Inspection générale de la Justice (IGJ), qui est sous l’autorité directe du garde des Sceaux. Dans cette affaire, c’est la directrice de cabinet du ministre qui a signé la saisine de l’IGJ, a-t-il été précisé.
Quand Édouard Levrault a fait savoir à l’Inspection “en début de semaine” selon une source proche du dossier, qu’Éric Dupond-Moretti avait été partie dans ce dossier, le ministre a “dans la foulée” choisi de se déporter du dossier au profit du Premier ministre pour éviter une “possible contestation de la régularité de la procédure”, a indiqué l’entourage du ministre.
“Personne n’est dupe du timing particulièrement bien choisi”, a aussi grincé l’entourage, insistant sur le fait que Dupond-Moretti avait agi dans cette affaire “en tant qu’avocat”, pour son client, et pas en son nom.
Le ministre “s’est une nouvelle fois et délibérément placé dans une situation de conflit d’intérêts”, a de son côté jugé l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) dans un communiqué. Le Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche) a lui parlé d’un “nouveau et gravissime mélange des genres”.
Face à la fronde des magistrats dénonçant un conflit d’intérêts du ministre depuis l’ouverture mi-septembre d’une enquête administrative visant trois magistrats du Parquet National Financier, Éric Dupond-Moretti avait déjà annoncé lundi qu’il se déportait du dossier au profit du Premier ministre.
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