“L’impact de l’isolement sur la santé mentale, c’est quelque chose qui est parfois laissé de côté”, déplore Sébastien. Comme Yohann et Romain*, il raconte au HuffPost la difficulté de cette période. Car même s’ils ont tenu et qu’ils ont vu ce moment comme nécessaire, ils soulignent les conséquences sur leur santé mentale et leurs finances.
Plus d’appréhension que pour les boutons
“Mais c’est le fait qu’on soit en plein été, qu’on soit après les périodes de Covid… On a envie de profiter un peu de la vie, et se dire qu’on va devoir s’isoler pendant trois semaines, ça me paraissait interminable”, poursuit-il. Pour Yohann aussi, originaire de Lyon, le “pire” a été cet isolement. “Ma deuxième réaction, après de me demander ce qu’était le monkeypox, c’était ‘purée on va rester isolé trois semaines’”. Quant à Romain, l’annonce a fait l’effet d’un “coup de massue”.
Sébastien et Yohann ont en effet en commun d’avoir connu une forme plutôt supportable de la maladie. “Par rapport aux symptômes, c’était assez soft. C’était surtout compliqué la première semaine”, se rappelle Yohann, dont l’isolement s’est terminé le 14 juillet. “La fièvre, les courbatures, la fatigue ont duré une semaine. À partir de la deuxième semaine, j’avais encore les boutons qui cicatrisaient, mais ce n’était plus douloureux”, souligne Sébastien.
«Etre enfermé dans un petit appartement à Paris sous cette chaleur, c’est un peu un enfer»
– Sébastien
Pour Yohann, le plus difficile avec cet isolement a été de “ne plus avoir de contact en physique”. “Au bout de deux, trois semaines, ça commence à être long. J’en avais clairement marre. Restez chez soi c’est bien une semaine, si encore on peut voir des gens ça va, mais là on ne voit personne”, raconte-t-il. “C’est très pesant”, approuve Romain.
A cet isolement, s’est également superposé des épisodes de fortes chaleurs pour les malades de la variole du singe. “Etre enfermé dans un petit appartement à Paris sous cette chaleur, c’est un peu enfer”, témoigne Sébastien, qui rappelle par la même occasion qu’ “il y a de nombreux cas en Ile-de-France”. Le Parisien vit ses derniers jours d’isolement (il se termine le 22 juillet), alors que la France fait face à des températures caniculaires.
“Pour le Covid ça allait car j’étais avec ma famille et j’avais un jardin, alors que là j’ai 43m², en plein centre-ville, sans jardin, sans terrasse ce n’est pas le même ambiance”, ajoute Yohann.
“Ma communauté LGBT m’a aidé”
“Mais la troisième semaine, ça a commencé à être assez compliqué. J’avoue que je ne suis pas resté trois semaines non-stop enfermé. Je suis sorti deux soirs, en plein milieu de la nuit, pour me poser sur les quais mais j’étais avec personne”, confie ensuite Yohann.
Sébastien, de son côté, a également eu dû mal à rester seul, et s’est d’abord tourné vers les réseaux sociaux. “Ce qui m’a fait du bien, ça a été d’utiliser les réseaux sociaux pour discuter entre malades. Plein de personnes ont aussi pris de mes nouvelles, j’ai de la chance d’être bien entouré”, développe-t-il.
“J’ai de la chance même d’appartenir à une communauté LGBT qui s’auto-organise pour faire de la prévention, sur plein de supports. C’est grâce à cela que des liens et des connexions se font et permettent de rompre cet isolement”, tient-il par ailleurs à souligner.
Mais cet isolement, il a finalement préféré l’adapter à sa façon. “L’idée m’est venue de demander à un copain qui a contracté le monkeypox à la même date que moi de faire une colocation, et d’après les médecins qu’on a contactés, il n’y avait pas de risques de surcontamination si on prenait des précautions. Depuis quelques jours, on est donc en colocation et c’est bien plus sympa”, raconte-t-il.
“La santé mentale est aussi importante que les autres symptômes. Trois semaines d’isolement ce n’est pas rien, ça se fait, mais autant essayer d’en sortir dans les meilleures conditions, explique le Parisien. Rajouter une dépression, une déprime par-dessus ça aurait pu repousser mon rétablissement, mon bien-être en tous cas.”
À présent, il n’appréhende “plus du tout” sa dernière semaine d’isolement. “Le fait d’être à deux, c’est beaucoup plus simple. On fait des jeux de société, on essaie de faire un peu de sport tout en gardant des gestes barrières”, illustre-t-il. L’Assurance maladie rappelle en effet que les personnes malades vivant sous le même toit ne doivent ni partager leur linge de maison ni leur vaisselle.
Quand l’isolement finit par précariser
“Déjà, il faut compter les trois jours de carence. Et ensuite, je travaille dans l’hôtellerie, souvent de nuit. Je suis beaucoup payé avec les heures supplémentaires que je perds, idem pour les primes de nuit. Je suis payé net 120 euros une nuit en moyenne, et pour le moment la CPAM m’a remboursé 39 euros par nuit, ça ne correspond pas au 60% de l’indemnité maladie”, détaille Romain, qui calcule avoir perdu près de 700 euros de salaire.
“Je mets régulièrement de côté donc j’ai un petit matelas, mais ce n’est pas le cas pour tous […]. On m’a déjà rapporté le cas d’un étudiant qui va au travail malgré tout parce que, financièrement, il ne peut pas s’en sortir. D’autres, comme les travailleurs du sexe, ne sont pas couverts”, poursuit-il. Pour Romain, le financement à 100% de l’arrêt de travail, comme cela est le cas pour le Covid-19, est une nécessité “ne serait-ce que pour encourager les isolements” et ”éviter les mises en danger”.
En attendant que cette question soit posée au niveau national, l’isolement de Romain a, lui, pris fin, comme celui de Yohann. Sébastien, de son côté, a encore quelques nuits à patienter, mais plus les jours passent, plus il se rapproche du concert de Lady Gaga. “Je suis trop content de pouvoir y aller et de sortir de mon isolement pour ça, ça va être incroyable”, sourit-il au téléphone. Vivement dimanche.
*le prénom a été modifié
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