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Aritz MORENO – Espagne / France 2023 1h45mn VOSTF – avec Luis Tosar, Pilar Castro, Ernesto Alterio… Adapté du roman d’Antonio Orejudo De l’avantage de voyager en train. Prix Feroz de la meilleure comédie 2020 (l’équivalent des Golden Globes en Espagne).

Du 09/08/23 au 29/08/23

LES AVANTAGES DE VOYAGER EN TRAINPetit avertissement en guise de préambule : « vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance ! » car autant le dire, ce film au titre fait pour piquer la curiosité (et on ne saurait que trop vous conseiller de vous y laisser aller !) n’est ni d’un accès facile et confortable à regarder, ni consensuel. C’est une comédie noire provocante et surréaliste, comme l’on n’en voit plus que très peu de nos jours, qui nous vient tout droit d’Espagne, et n’est pas sans rappeler les débuts de Pedro Almodovar dans son art de mêler la provocation et le désir, ou encore certaines comédies italiennes des années 70.

Dans le train qui la ramène à Madrid, Helga, éditrice toujours à la recherche de bonnes histoires à publier, se retrouve assise en face du docteur Angel Sanagustin, totalement ouvert à lui raconter des histoires de ses patients, et lui faire part d’expériences toutes plus fascinantes, obsédantes et sordides les unes que les autres. Cette rencontre inattendue bouleverse complètement Helga et la plonge dans une sorte de profonde introspection.
Et pour le spectateur aussi commence une traversée fantastique, à la fois des genres cinématographiques et des récits sur la folie qui s’éloigne de plus en plus de l’ordinaire pour nous amener vers le continent de l’inquiétante étrangeté, où la frontière entre réalité et « rêverie » (ou cauchemar…) s’estompe complètement.
Comédie, oui, mais somme toute assez cruelle dont le récit gigogne va du complotisme au réseau pédopornographique, en passant par le trafic d’organes, le snuff-movie ou encore le sado-masochisme, pour nous décrire cet esprit labyrinthique digne d’une psychose schizophrénique à tendance paranoïaque, ne serait-ce que pour le délire !

Les avantages de voyager en train est le premier long métrage du réalisateur Aritz Moreno, et le moins que l’on puisse en dire c’est que c’est un premier coup réussi. Qu’on l’aime ou pas, ce film ne laissera personne indifférent, vous pouvez nous croire sur parole ! Le réalisateur a pris le parti de foncer à très grande vitesse dans la direction diamétralement opposée au sens commun, ou plus exactement, il s’efforce tout au long du film d’explorer toutes les autres directions sauf celle-là (ce qui, au final, la met d’autant mieux en valeur !). Et Moreno de nous expliquer pourquoi il a choisi la comédie pour aborder certains sujets aussi délicats que la maladie mentale : « Je pense que la comédie vous donne l’opportunité de traiter de sujets graves et sérieux tout en vous laissant la liberté de choisir la forme, que ce soit une satire, une critique ou une défiguration de la réalité… La comédie permet d’aller plus loin qu’une représentation réaliste ou dramatique de n’importe quel sujet. » Il se dégage de ce tourbillon verbal et narratif une énergie folle transformant la linéarité en un enchevêtrement d’histoires que le génie d’Aritz Moreno non seulement arrive à faire tenir, mais surtout y parvient brillamment. Politiquement incorrectes, parfois juste totalement méchantes, ces histoires délicieusement tordues sont certaines de réveiller tout le monde. Et s’il y a déjà beaucoup de points forts dans ce film, on se souviendra particulièrement de la réplique d’ouverture de celui-ci, sans doute la meilleure de l’année : « Imaginez une femme qui revient chez elle et surprend son mari en train d’inspecter sa merde avec un bâton de glace esquimau ». Ou pas…

Intelligemment adapté du roman De l’avantage de voyager en train d’Antonio Orejudo, le livre cherchait déjà à mettre sur la sellette l’énigme de l’âme humaine dans une odyssée ferroviaire qualifiée par son auteur d’« antihumaniste » où l’ignominie est transcendée par un comique de l’énormité, et l’éternelle question de la frontière entre réalité et fiction ne se pose plus. Pas vraiment un roman de gare comme on dit… alors en voiture mesdames et messieurs, le train va partir !

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