SCIENCE – Depuis quelques jours, le monde entier a les yeux rivés sur le variant Omicron, récemment découvert par l’Afrique du Sud. Mais s’il a de quoi inquiéter les chercheurs, c’est aujourd’hui Delta qui provoque une cinquième vague de Covid-19 en France et dans toute l’Europe.

Si tous les indicateurs, du taux d’incidence aux hospitalisations en passant par les entrées en réanimation sont à la hausse, la situation n’est pas encore critique dans les hôpitaux. Mais elle pourrait le devenir si rien n’est fait pour freiner la progression du coronavirus.

Pour bien comprendre où en est la France face au Covid-19, Le HuffPost vous propose de regarder les derniers chiffres, mais surtout leur évolution en cartes et en courbes. Un point important à bien avoir en tête avant de poursuivre votre lecture: les données sont toujours publiées dans la soirée. Ainsi, les chiffres à jour ce mardi 30 novembre sont ceux publiés la veille, le 29. Il faut également savoir que ce ne sont pas les chiffres du jour, mais ceux à J-1 pour le nombre d’hospitalisations et le nombre de nouveaux cas confirmés. Pour l’incidence et le taux de positivité, ce sont les chiffres du dépistage à J-3 (à la date de réalisation du test) qui sont utilisés.

Les courbes nationales du Covid-19

Lundi 29 novembre, la Direction générale de la Santé a recensé moins de cas que la veille (8279 contre 31.648), car les dépistages sont moins nombreux le dimanche que le samedi.

Mais si l’on regarde l’évolution moyenne (sur 7 jours), on voit que la cinquième vague devrait, sauf inversion de tendance, dépasser sous peu les 30.000 nouveaux cas par jour (29.767 ce lundi soir). Le niveau de la quatrième vague de cet été est lui déjà dépassé. Une hausse claire et forte visible sur la courbe ci-dessous:

Les chiffres à J-1 sont pratiques pour suivre au plus près l’évolution de l’épidémie, mais sont susceptibles de varier d’une semaine à l’autre en fonction de la rapidité de remontée des résultats. Pour bien s’assurer des tendances, il est préférable de regarder les données publiées par Santé Publique France, qui montrent le nombre de cas à la date du dépistage, avec un retard de trois jours.

Les graphiques ci-dessous permettent de voir cet indicateur, ainsi que d’autres essentiels pour suivre l’évolution de l’épidémie:

Signification des différents indicateurs

  • Taux d’incidence: c’est le nombre de cas détectés pour 100.000 habitants. Il est très utile, car il donne un état des lieux de l’épidémie en quasi-temps réel (quelques jours de décalage pour l’apparition des symptômes, voire avant leur apparition pour les cas contacts). Mais il est dépendant des capacités de dépistage.
  • Taux de positivité: c’est le nombre de tests positifs par rapport aux tests totaux effectués. Il permet de “contrôler” le taux d’incidence. S’il y a beaucoup de cas dans un territoire (taux d’incidence), mais que cela est uniquement dû à un dépistage très développé, le taux de positivité sera faible. À l’inverse, s’il augmente, cela veut dire qu’une part plus importante des gens testés sont positifs, mais surtout que les personnes contaminées qui ne sont pas testées, qui passent entre les mailles du filet, sont potentiellement plus nombreuses.
  • Taux d’occupation des lits de réanimation par des patients Covid-19: C’est un chiffre scruté, car il permet de savoir si les hôpitaux sont capables de gérer l’afflux de patients. Il est très utile, car il y a peu de risque de biais: il ne dépend pas du dépistage et les occupations de lits sont bien remontées aux autorités. Son désavantage: il y a un délai important entre la contamination et le passage en réanimation, d’environ deux à trois semaines. 
  • Entrées en réanimation et nouvelles hospitalisations: moyenne lissée sur 7 jours des personnes entrant à l’hôpital
  • Décès à l’hôpital: Comme les réanimations, c’est un indicateur plutôt fiable, mais avec un délai important.
  • R effectif: cet indicateur représente le “taux de reproduction du virus” réel, c’est-à-dire le nombre de personnes infectées par un cas contagieux. Il est calculé par des épidémiologistes et a lui aussi un délai important.

Comme on peut le voir, tous les indicateurs sont à la hausse depuis plusieurs jours. Mais le plus important, c’est de comprendre à quelle point cette évolution est rapide. Pour cela, il est intéressant de regarder l’évolution sur une semaine, en pourcentage, de ces chiffres:

Le taux d’incidence est toujours en hausse, même si sa croissance diminue progressivement depuis une dizaine de jours. Des chiffres similaires à ceux que l’on a connu pendant la quatrième vague de l’été, fulgurante, mais qui n’est pas montée aussi haut que les autres, probablement suite à l’instauration du pass sanitaire.

Du côté des indicateurs hospitaliers, le taux d’occupation en réanimation est encore faible (32%), mais le nombre de lits occupés progresse de plus en plus vite depuis quelques jours. Même chose pour les hospitalisations.

Carte du taux d’incidence par départements

Si l’on regarde l’évolution de l’épidémie de manière plus locale, on voit clairement que la tendance est à la hausse dans un écrasante majorité des départements métropolitains, mais avec des différences marquées entre les territoirescomme on peut le voir sur la carte ci-dessous, qui montre l’évolution du taux d’incidence sur une semaine.

En France métropolitaine, tous les départements ont dépassé le seuil de 100 de taux d’incidence. À l’inverse, l’incidence est supérieure à 500 en Ardèche et à 400 dans les Hautes-Pyrénées, les Bouches-du-Rhône, le Jura ou encore la Haute-Corse.

Le graphique ci-dessous permet d’analyser plus en détail la situation dans votre département.

La carte du taux d’occupation en réanimation

Du côté des indicateurs hospitaliers, aucune région n’est pour l’instant en tension à cause du Covid-19. Le taux d’occupation en réanimation est inférieur à 50% dans toutes les régions.

Une vaccination très efficace, mais qui patine

Comment expliquer cette cinquième vague? Difficile à dire tant le coronavirus réussit à déjouer nos pronostics, mais il faut déjà rappeler qu’une hausse était prévisible, surtout avec la dominance du variant Delta, bien plus contagieux.

Une hausse maîtrisée de l’épidémie en plein hiver, avec des mesures limitées (tel le pass sanitaire, le port du masque, l’aération des lieux clos, etc), n’est possible que grâce à la vaccination. Si le vaccin ne protège pas à 100%, il réduit le risque d’infection et baisse drastiquement le risque de développer une forme grave du Covid-19.

Dans ses dernières prévisions de fin novembre, l’Institut Pasteur rappelle qu’une dose de rappel, en réduisant encore plus le risque d’hospitalisation des plus à risque et en diminuant le risque d’être infecté, peut faire baisser le pic des hospitalisations en théorie. Ainsi, un rappel pour les plus de 65 ans diminue la hauteur du pic de 20%, alors qu’un rappel pour l’ensemble des adultes le fait chuter de 44%. 

Mais pour que cela fonctionne, il faut évidemment que la logistique pour les injections suive. L’allocution d’Emmanuel Macron et la décision de conditionner le pass sanitaire à une 3e dose pour les plus âgés a relancé le nombre d’injections, notamment pour les rappels, comme on peut le voir ci-dessous. Mais on reste pour l’instant en dessous de l’hypothèse de base de Pasteur (400.000 par jour)

Le graphique suivant permet de mieux se rendre compte de la progression des injections de rappel:

Des vaccins toujours efficaces face au Covid-19

Il n’est pas certain que les mesures actuelles et le niveau de vaccination permettent d’éviter une nouvelle vague de coronavirus dans les hôpitaux. Il faut par contre rappeler que les vaccins restent notre meilleure arme et protègent énormément face au risque de développer une forme grave de Covid-19.

Depuis début novembre, il y a plus de vaccinés hospitalisées que de non-vaccinés. Pour autant, il ne faut pas oublier que 91% des adultes ont reçu au moins une dose. En clair, l’écrasante majorité des Français étant vaccinée, il n’est pas anormal de voir plus de vaccinés que de non-vaccinés dans les hôpitaux Si l’on regarde à population égale (combien de personnes hospitalisées ou en réanimation pour un million de vaccinées ou non vaccinées), il y a quatre fois plus de tests positifs et huit fois plus d’entrées en soins critiques chez les non-vaccinés, selon la Drees.

À voir également sur Le HuffPost: le variant découvert en Afrique du Sud inquiète les chercheurs mais votre priorité est ailleurs

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