Les trois combats de la gauche
Au lendemain du second tour des élections législatives, force est de constater que la France récolte politiquement ce qu’Emmanuel Macron a semé. Son mépris social et son arrogance de classe ont conforté la décision de la moitié des électeurs de ne pas aller voter et celle de l’autre moitié de soutenir majoritairement toutes celles et ceux qui combattent ses choix politiques.
Pour les défenseurs du progrès social, trois combats sont désormais à mener de manière urgente.
Le premier sera parlementaire. Le camp présidentiel a appelé à « construire une majorité d’action ». On se doute bien ce que seront ces actions sur le plan économique et social : répondre à la crise du pouvoir d’achat, mais surtout sans augmenter les salaires, désocialiser le pays en supprimant des impôts et en réduisant les dépenses publiques, repousser le plus possible l’âge légal de départ à la retraite, et ainsi de suite. Un programme de régression sociale pour lequel le président n’aura aucun mal à trouver une force de soutien auprès des députés LR, qui réclameront en échange de durcir toutes les mesures. Ils iront ensuite tous ensemble se désoler de « la montée des extrêmes », Nupes et extrême droite étant des équivalents politiques à leurs yeux, alors que leurs choix politiques nourrissent une colère sociale légitime qui se retrouve dans les urnes.
Toutes les campagnes ne votent pas RN, mais il va quand même falloir arpenter ces territoires et convaincre les électeurs de voter autrement
Ce sera le deuxième combat à mener contre la force acquise au Parlement, et plus généralement dans le pays, par le Rassemblement (de la honte) national. Il ne suffira pas de dénoncer les racistes et les fascistes : l’électorat lepéniste va bien au-delà. Les gauches doivent trouver le discours, les propositions économiques et sociales permettant de donner un débouché au ressentiment qu’exprime le choix de l’extrême droite. Toutes les campagnes ne votent pas RN, mais il va quand même falloir sortir des villes et des métropoles pour arpenter ces territoires ruraux et les anciens bastions ouvriers, et convaincre les électeurs de voter autrement. Le pouvoir d’achat, la mobilité, l’accès à des emplois et à des emplois reconnus, la lutte contre la précarité sociale – non pas en général mais spécifiquement dans ces territoires – réclament des réponses. Les économistes doivent prendre leur part dans ce travail de resocialisation et répéter, face aux 89 députés RN, que le partage de la valeur ajoutée ne s’est pas dégradé au détriment des salariés, ou encore que les inégalités n’augmentent pas tant que ça en France.
Enfin, c’est le troisième combat, la gauche devra également faire son aggiornamento. Même si, unie politiquement, elle gagne des sièges à l’Assemblée, le communiste Fabien Roussel n’a pas complètement tort lorsqu’il souligne qu’avec un nombre de voix qui ne progresse pas, le programme économique et social actuel des gauches se heurte à un plafond de verre. Sans renier sa philosophie générale, celle d’une sortie du tunnel libéral, d’une véritable transition écologique et d’un progrès social en marche, il va falloir apaiser les discours, préciser les étapes, huiler les transitions. Et convaincre.
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