L’UNICEF dénombre plus de 4 500 enfants tué·es dans la bande de Gaza à la date du 10 novembre – une trentaine en Israël parmi les victimes identifiées, une quarantaine en Cisjordanie. À moins que les combattants de la branche armée du Hamas aient 5 ans, c’est bien une énorme quantité d’enfants civils qui meurent tous les jours sous les bombardements israéliens.
Des journalistes et des travailleur·ses humanitaires continuent aussi de mourir dans la bande de Gaza, toujours sous les bombes israéliennes, tandis que les hôpitaux sont obligés de procéder à l’arrêt forcé des soins intensifs néonataux, faute d’électricité, comme à l’hôpital al-Chifa, pris pour cible par l’armée israélienne. Dans cet hôpital, et dans d’autres, on continue d’opérer « à la bougie », à même le sol.
Les esprits animés par leur plus mauvaise foi continuent à vomir l’argument des « chiffres du Hamas », mais les images de routes jonchées de cadavres palestiniens qui nous viennent des journalistes locaux et d’autres citoyen·nes sont bien réels. Malgré l’évidence de la catastrophe humanitaire, certain·es font le choix de ne toujours pas les considérer, de refuser de voir ces victimes – enfants ou pas – comme des égaux, et maintiennent leur soutien à la politique sioniste, coloniale et génocidaire d’Israël, tout comme le fait une bonne partie de la classe politique.
Certaines personnes se murent dans le silence, non pas pour se protéger psychologiquement de ces violences – ce qui est évidemment tout à fait compréhensible – mais par fidélité à l’argument qu’elles tiennent depuis le 8 octobre : « C’est compliqué. »
D’autres ont rejoint la Gare du Nord de Bruxelles ce samedi 11 novembre. Des dizaines de milliers de personnes s’y sont rassemblées pour montrer leur soutien à la Palestine. Après les différents rassemblements qui se sont tenus dans tout le pays depuis un mois, cette marche était attendue comme la plus grande manifestation de cet automne. Selon certains médias, 21 000 personnes ont répondu présent – entre 45 000 et 65 000 selon les organisations associatives, politiques et syndicales à l’initiative de l’événement. Et effectivement, le nombre de 21 000 paraît peu. On pourrait s’amuser à compter combien de gens on peut caler entre la Rue Royale et le Boulevard Roi Albert II, mais il est en tous cas certain que ça faisait un bail qu’une foule aussi grande avait occupé les rues de la capitale.
Malgré la présence de certains médias, comme RTL Info, venus principalement demander aux manifestant·es s’il fallait condamner le Hamas, la majorité des personnes présentes étaient unies derrière le même objectif : montrer physiquement son soutien à la Palestine. Débutée à 14 heures, la marche s’est terminée dans le calme aux alentours de 17, à la Gare du Midi.
Quelle que soit la cause, on manifeste par conviction militante, pour occuper l’espace médiatique, mais aussi pour reprendre de l’énergie auprès d’autres activistes qui se mobilisent pour la même cause – chose précieuse à un moment où on pourrait être tenté·e de lâcher prise, épuisé·e par tout ça. Pourtant, il est plus que jamais nécessaire de maintenir ce qui nous amène à nous exprimer en faveur des droits humains et contre le massacre en Palestine, contre les crimes de guerre de toute nature.
Plus le temps passe, plus Israël continue ses horreurs, plus le déni semble puissant chez les forces réactionnaires, les lâches et les perdu·es. Mais certaines mentalités changent aussi. Et les réseaux sociaux n’y sont évidemment pas pour rien.
En marge du discours officiel de certains médias dominants qui relaient la propagande du gouvernement israélien, les publications ont un réel impact dans les prises de conscience. D’aucuns auront beau discréditer « l’activisme Instagram » et le fait de « poster pour avoir bonne conscience », le relai de contenus peut aussi aider les gens à comprendre certains aspects de la situation, comme la responsabilité d’Israël dans la montée du Hamas par exemple, ou le fait que l’armée israélienne reproduit exactement les mêmes monstruosités qu’elle impute aux combattants du Hamas (maltraiter des cadavres, tuer des innocent·es, dont des bébés ; se servir de boucliers humains ; etc.). Ou même les amener à réaliser qu’Israël est en train de fabriquer lui-même les futurs combattants du Hamas – si on explosait la cervelle de vos parents, que votre petite sœur brûlait vive, qu’on envoyait des colons piller vos maisons, que vous naissiez dans une prison à ciel ouvert, vous deviendrez militant·e pacifiste vous ? En ce qui concerne les guignols de l’armée israélienne, soyez-en sûr·es, la haine de l’autre anime bien les esprits. Beaucoup.
Même une partie de la classe politique commence à montrer une position claire. En Belgique, la vice-Première ministre Petra de Sutter (Ecolo/Groen), a appelé à des sanctions contre Israël. Jusqu’ici, Raoul Hedebouw, le Président du PTB [Parti du Travail de Belgique] semblait bien seul dans sa consternation suite aux crimes perpétrés par le gouvernement israélien.
Pour toutes ces raisons, même si on commence à s’habituer aux images d’horreur, le contre-discours et leur omniprésence dans les espaces réels et virtuels sont plus que jamais indispensables.
Sanad Latifa fait partie de ces journalistes, photographes et autres relais palestinien·nes qui rapportent les événements de Gaza en temps réel. Sans filtre, il capture et reposte des images du massacre perpétré par Israël et son armée dévouée au nettoyage ethnique. Il fait aussi partie de ces activistes dont le compte Instagram a été bloqué ou limité. En DM, il nous dit : « Honnêtement, je pense que tout mon peuple se sent fier et solide quand il voit qu’on manifeste aussi en Occident. On est vraiment connu pour notre adversité, et c’est fort de voir que les gens ici [en Europe] ne ferment pas les yeux sur Gaza. On respecte chaque personne qui relaie la vérité. Ça nous donne de la joie quand on voit que les gens sont au courant de ce qui se passe. À Gaza, ces informations [sur la mobilisation occidentale] circulent, et c’est super important que le monde entier soit mobilisé pour la même cause. »
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