Le sprint législatif promis par l’exécutif a pris des allures de course d’obstacles avant même que le Sénat à majorité de droite ne se saisisse de ce texte brûlant dès ce vendredi. Le gouvernement vise une adoption du projet de loi avant la fin du week-end au bout du bout de la session parlementaire exceptionnelle.
Car avec 22.000 contaminations ces dernières 24 heures, au plus haut depuis le 5 mai, l’épidémie flambe à nouveau.
“On en a besoin tout de suite”
“La situation sanitaire est inquiétante”, a souligné le ministre de la Santé Olivier Véran qui n’a eu de cesse d’exhorter l’hémicycle à circonscrire l’incendie au plus vite. “Il y a une urgence à légiférer (…) Le pass sanitaire (parcours vaccinal complet ou test récent) on en a besoin tout de suite”.
Vivement contesté par une frange de l’opinion, le projet de loi traduit les annonces du 12 juillet d’Emmanuel Macron. Et fait des étincelles. Il a été adopté par 117 voix pour et 86 contre.
Les débats qui se sont achevés vers 5h40 furent âpres et rugueux, avec des oppositions chauffées à blanc par un calendrier contraint. Près de 1200 amendements ont été passés en revue depuis mercredi après-midi.
Ainsi LR qui s’est majoritairement abstenu, n’a pas souhaité donné de “blanc-seing” et a mis en garde contre la volonté de mettre le “pays sous cloche” en regrettant que les débats n’aient pas permis de “lever les ambiguïtés” sur un pass sanitaire assimilable à “un passeport du quotidien”, selon le député Philippe Gosselin.
La session d’examen “fut une vaste blague”, a estimé la socialiste Lamia El Aaraje qui a plaidé en vain pour la vaccination obligatoire, tout en taclant le “retard permanent” du gouvernement. PS, LFI et PC ont voté contre le texte.
Si l’obligation vaccinale étendue aux soignants, sapeurs-pompiers ou encore professionnels auprès des personnes âgées fait à peu près consensus, des voix se sont cependant élevées notamment chez LFI et parfois à droite pour mettre en “garde contre une stigmatisation” des soignants.
Déjà partiellement en vigueur depuis mercredi, l’extension du pass sanitaire, prévue pour début août dans les cafés-restaurants que le gouvernement présente comme la meilleure arme face au rebond de l’épidémie du Covid-19, a elle déchainé les critiques.
Une disposition “brutale” sur les licenciements
Une disposition du nouveau texte ouvrant la voie à un licenciement pour des travailleurs d’établissement recevant du public qui refuseraient d’obtenir un pass sanitaire a particulièrement alimenté la controverse.
Une “brutalité” pour le LR Patrick Hetzel voire une “monstruosité” pour la socialiste Christine Pires-Beaune malgré un amendement gouvernemental destiné à adoucir la disposition contestée.
Selon le projet, les salariés des secteurs concernés par exemple un garçon de café, auront l’obligation de disposer d’un pass sanitaire (parcours vaccinal complet ou test récent) à compter du 30 août.
La disposition prévoit la possibilité de poser des congés le temps d’effectuer les démarches nécessaires, de suspendre les fonctions ou le contrat pendant une durée d’au moins deux mois et d’examiner les possibilités de reclassement sur un autre poste. Au bout de deux à trois mois, l’employeur pourra engager une procédure de licenciement.
Quid du secret médical, de la responsabilité de l’employeur, des contre-indications médicales du vaccin, a interrogé le LR Patrick Hetzel qui a dénoncé “une grande brutalité”.
La mesure a fait débat jusque dans la majorité. “Comment pouvons nous faire entrer le pass sanitaire dans le monde du travail ?” a interrogé le “marcheur” Pacôme Rupin. “Des milliers de personnes vont peut-être devoir démissionner ou être licenciés car par conviction personnelle, ils ne souhaitent pas se faire vacciner?”
Président du groupe Agir, allié de la majorité, Olivier Becht a cherché à minimiser l’effectivité de la mesure censée s’arrêter le 31 décembre, et qui sera très longue à mettre en œuvre jusqu’au bout. Elle est “faite pour inciter les gens”, la “probabilité” de licenciements réels est “relativement faible”.
Pass obligatoire pour les patients non urgents
Rare amendement d’origine parlementaire adopté, la peine sanctionnant l’utilisation frauduleuse du pass sanitaire de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende a été supprimée.
Au grand dam des oppositions, le gouvernement est en revanche revenu sur deux amendements votés au cours de l’examen du texte avec un nouveau vote qui a notamment remis l’obligation du pass sanitaire pour les patients non urgents ou les visiteurs dans les établissements de santé et maisons de retraite.
Dans un hémicycle dont les bancs sont restés fournis tout au long de la nuit, la majorité a fait bloc mais quelques voix dissonantes se sont fait entendre comme celles des marcheurs dont Pacôme Rupin, mais aussi Stella Dupont favorable à davantage de “souplesse” dans le texte.
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