Pour le bac, on continue ?
Jean-Michel Blanquer avait annoncé lors de la rentrée de septembre que l’année scolaire serait « une année normale ». Le 25 avril sur RTL, il évoquait désormais « une année scolaire aussi normale que possible ».
Finalement, les épreuves de spécialité en terminale et les E3C (épreuves communes de contrôle continu) prévues aux deuxième et troisième trimestres en première et en terminale ont été annulées au profit du contrôle continu. En revanche, les épreuves de BTS sont maintenues en mai, malgré la mobilisation pour obtenir le contrôle continu pour cet examen, par exemple sur les réseaux sociaux avec le #BTScontrôlecontinu.
Reste à trancher les épreuves finales du bac : français écrit et oral en première, philosophie et grand oral en terminale. Une ordonnance publiée le 26 décembre au Journal officiel permet de modifier toutes les épreuves jusqu’à quinze jours avant la date prévue. Le 22 avril, en conférence de presse, le ministre assurait que l’épreuve de philosophie et le grand oral étaient maintenus pour les terminales.
Des épreuves en suspens
Les épreuves écrites de philosophie et celle de français en première font moins parler d’elles que le grand oral : elles ne sont pas nouvelles, les enseignants se sentent à l’aise pour y préparer les élèves. On pourrait toutefois s’interroger sur l’opportunité sanitaire, en juin prochain, de mettre des dizaines de candidats et surveillants dans une salle pour plusieurs heures, même fenêtres grandes ouvertes… et faire passer l’oral de français avec un masque, faire attendre et se croiser les candidats dans les couloirs ne va pas de soi non plus.
Le plus épineux reste toutefois le grand oral. Le ministre y tient, c’est la mesure phare de sa réforme du baccalauréat : il aura du mal à y renoncer. Mais c’est la première année où des candidats passeraient cette épreuve. En outre, les élèves qui sont en terminale en 2021 constituent une « promotion » qui n’a pas passé l’oral (ni l’écrit) de français l’année dernière. Ce grand oral serait donc le baptême du feu, en quelque sorte, de cette « génération crash test », comme l’appelle La Voix du Nord.
Le ministère cultive sans doute l’objectif de maintenir les élèves au travail en brandissant la « menace » des examens. On pourrait pourtant compter sur le fait qu’ils continuent à travailler puisque le contrôle continu pèse finalement assez lourd en l’absence des E3C. Et ne faut-il pas s’interroger sur un système éducatif où il faut faire travailler des élèves sous la « menace » ? Ce n’est peut-être pas la motivation la plus souhaitable ni la plus efficace pour bien apprendre.
Aménagement
Des modalités d’aménagement du grand oral sont malgré tout discutées, comme la diminution du poids de l’épreuve dans la note finale, en passant d’un coefficient dix à cinq, par exemple. Autre hypothèse : ne garder que les points supérieurs à la moyenne, comme pour les options facultatives. Cela permettrait au ministre de « sauver la face », en maintenant une épreuve, tout en la vidant de tout enjeu, ce qui rendrait certainement son maintien plus acceptable, au moins pour les parents et les élèves.
Des inégalités se sont créées entre les 30 % de lycées où les élèves sont restés à temps plein en classe et ceux qui sont en « demi-jauge » depuis novembre
Quelle que soit l’épreuve, se pose la question des inégalités qui se sont créées entre les 30 % de lycées où les élèves sont restés à temps plein en classe et ceux qui sont en « demi-jauge » depuis novembre. Les modalités de cette « demi-jauge » n’ayant pas été les mêmes dans tous les établissements, certains élèves n’ont eu qu’une scolarité à mi-temps. D’évidence, le programme n’aura pas été traité partout dans son intégralité.
De plus, comme cette « demi-jauge » doit se poursuivre après la « rentrée » du 3 mai en lycée – et même s’étend aux collèges pour les élèves de quatrième et de troisième – on ne sait pas trop comment les élèves, qui pour certains n’ont même pas encore choisi leurs sujets de grand oral, pourront être préparés à cette épreuve très spécifique. Comment, dans ce cas, maintenir l’égalité entre candidats devant un examen national ?
Ce d’autant que les enseignants favorables à la suppression de l’épreuve avancent qu’ils n’ont pas été formés à y préparer leurs élèves, et dénoncent une épreuve aux contours flous, pour laquelle les instructions officielles hésitent entre une évaluation de la forme – l’éloquence – et une évaluation du fond – les connaissances.
De son côté, le Conseil académique de la vie lycéenne (CAVL, instance regroupant des lycéens élus) de Paris a lancé un sondage en ligne auprès des lycéens à propos des modalités des épreuves du bac 2021. Le CAVL indique que les réponses sont en faveur de l’annulation ou de l’adaptation de l’épreuve de philosophie et du grand oral.
Tout peut encore changer : le 29 avril, à l’occasion d’une visioconférence avec des élus des CAVL, le ministre aurait indiqué réfléchir à une annulation de l’épreuve de philosophie et à la réduction du nombre de sujets que devront présenter les candidats au grand oral, en passant de deux à un.
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