Pour Noël, BD, jeux, beaux livres: 10 idées de cadeaux pour toute la famille
L’intégrale des histoires horrifiques de Richard Corben pour Eerie & Creepy (Delirium)
Delirium
Cette grosse anthologie présente quarante épisodes initialement publiés entre 1970 et 2016 (pour les dernières à l’occasion de la résurrection de la revue Creepy), rassemblées par ordre chronologique, ce qui permet de découvrir la spectaculaire évolution de Corben comme dessinateur. Si la plupart avaient déjà été traduites en français, elles profitent pour cette nouvelle édition d’une restauration de nombreuses planches, dont les originaux ont été retrouvés au moment de composer la grande exposition rétrospective de l’auteur à Angoulême il y a peu. Au milieu de l’ouvrage, deux histoires (Le Corbeau et Le Portrait Ovale) sont adaptées du maître de Corben : Edgar Allan Poe. Le mariage de leurs deux univers occasionne un sommet, l’avènement d’une sous-culture au rang d’art majeur pour un artiste qui aura malheureusement dû attendre la fin de sa vie pour être enfin reconnu à sa juste valeur. En bonus, une soixantaine de pages offrant de nombreuses couvertures et planches originales feront s’évanouir de bonheur les connaisseurs.
Un jeu vidéo familial: “Mario Party Superstars”, jeu vidéo Switch (Nintendo)
Nintendo
Cette nouvelle anthologie sur Switch (la deuxième) n’offre pas de réelle nouveauté: c’est un best of des précédents épisodes, proposant les plateaux de jeu des trois premiers épisodes (ceux de la N64), chacun offrant ses spécificités et ses rebondissements dans le déroulement de la partie. Le concept de la série visant à relancer chaque fin de tour avec un mini-jeu tiré au sort est redoutablement efficace pour maintenir la tension. Les parties ne se ressemblent jamais grâce à la grande diversité de ces mini-jeux (une centaine), sauf dans la répétition des retournements de situation qui permettent à chacun de remonter dans le classement à tout instant. Le suspense est total jusqu’au bout de la partie, l’amusement aussi. Si cette anthologie recycle des idées déjà présentées tout au long des vingt ans de la série, Mario Party reste une série incontournable pour tout possesseur de console Nintendo dès lors qu’il s’agit de jouer à plusieurs (idéalement à quatre). Et, information importante pour les fans: il n’y a aucune répétition avec la précédente anthologie sortie sur Switch en 2018.
Un nouveau polar de Caryl Férey en bande dessinée: Sangoma: Les Damnés de Cape Town, Caryl Férey & Corentin Rouge (Glénat)
Glénat
L’intrigue se déroule une vingtaine d’années après la fin de l’apartheid. Tandis que des débats font rage au Parlement au sujet de la redistribution des terres agricoles appropriées par les propriétaires blancs, un jeune homme noir est retrouvé mort dans l’exploitation d’une riche famille. Shane Shepperd, lieutenant de police de Cape Town, lance l’enquête.
Les lecteurs fidèles de Férey se retrouveront en terrain connu : comme à son habitude, l’auteur radiographie avec acuité une société blessée et y projette une intrigue noire au propos politique, avec pour protagonistes des laissés pour compte. Le dessin de Corentin Rouge apporte une dimension supplémentaire au texte de Férey. Son travail sur la restitution des townships est remarquable, et son style réaliste fait merveille sur les scènes d’action violentes et explosives.
Un manga culte: Dragon Head (intégrale en 5 volumes), Minetarō Mochizuki (Pika Graphic)
Pika Graphic
Quatre volumes ont déjà été publiés (le dernier le sera début 2022). Ils constituent le cadeau idéal pour tout passionné de culture asiatique, qu’il soit fan de Squid Games ou de L’Attaque des Titans. Il découvrira avec Dragon Head un classique immense, dont la profondeur reste inégalée.
Une monographie de référence sur Jacques Martin: Jacques Martin, le Voyageur du temps (Casterman)
Casterman
Une monographie de 400 pages signée par Patrick Gaumer (auteur du Dictionnaire mondial de la BD) sort cet automne. Elle constitue pour les amateurs de bande dessinée, qu’ils soient familiers ou non avec l’œuvre, une véritable somme. En regard d’un texte passionnant, plusieurs centaines de dessins, notes manuscrites, planches et illustrations parfois inédites racontent le génie de Jacques Martin. On y apprend ses démêlés avec la censure dans le Journal de Tintin au sujet de la nudité de ses personnages, ou l’histoire du “putsch” de 1965, lorsque Jacques Martin et Bob de Moor travaillèrent en secret sur une fausse planche de Tintin qu’ils montrèrent à un journaliste, pour forcer Hergé à les laisser lancer une aventure inédite. On y découvre aussi une double page dessinée en 1983, où Alix et Enak rencontrent Rastapopoulos, l’ennemi de Tintin. On succombe enfin devant la beauté de certains dessins, qui dégagent un sentiment de facilité inversement proportionnel à leurs qualités techniques. Alix y tient la plus grande place, mais on redécouvre avec plaisir les univers des autres héros de Jacques Martin: Lefranc, Jhen et Arno.
Deux jeux de société pour toute la famille: Celestia et Canopéa (éditions Blam!)
Blam!
Blam!
Dans le même univers, Canopéa renverse la dynamique et propose un jeu coopératif: cette fois, toute la famille gagne ou perd, et les risques sont à prendre collectivement. Il s’agit ici de mettre à l’abri des oiseaux dans les différentes cités-arbres en affrontant des contrebandiers. Tout aussi réussi que son aîné, Canopéa est suffisamment riche et subtil pour plaire aux aînés. On en redemande!
La suite d’un classique de la BD contemporaine: Largo Winch: La frontière de la nuit (Dupuis)
Dupuis
C’est ce qu’entreprend de faire le nouvel album de ses aventures, premier d’un diptyque qui sera bouclé dans un an, qui affiche à gros traits une prise de conscience éthique, écologique et féministe (tout ça d’un coup). Le dragueur impénitent Simon y reçoit un verre d’eau en plein visage pour une tentative d’approche trop directe, le groupe W se voit contraint de réduire ses activités dépendantes aux énergies fossiles, tandis que Largo Winch fait le tour du monde de ses filiales pour s’assurer que les mines d’étain qu’il possède n’exploitent pas les enfants.
Malgré certains ressorts opportunistes (qui fonctionnent finalement assez bien, Largo Winch a toujours été un héros moral malgré les milliards qu’il possède), le scénario de cette aventure détonne. Installé sur la franchise depuis maintenant trois albums – après le départ du scénariste originel Jean Van Hamme – Eric Giacometti trouve ses marques et parvient à donner corps au personnage toujours dessiné (depuis le premier épisode) par un Philippe Francq ici au sommet de son art. L’intrigue semblera familière aux milliardaires du monde réel: centrée autour de la Silicon Valley (où la saga s’installe pour la première fois) et des industries aéronautiques, on y voit Largo Winch expérimenter son premier vol spatial touristique. Face à lui, des “méchants” d’un nouveau genre: un couple d’entrepreneurs de la nouvelle économie qui s’efforce de le ringardiser. Largo Winch parvient pour son 23e épisode à se renouveler tout en restant fidèle à ses racines: c’est le propre des grandes séries.
Un Call of Duty “classique”: Call of Duty: Vanguard (jeu vidéo, Activision)
Activision
Reste donc, parmi les expériences recommandables sur consoles de cette fin d’année, ce Call of Duty: Vanguard. Le dix-huitième épisode d’une série très populaire et qui clairement ne révolutionne pas celle-ci. Le scénario opère un retour à la Seconde Guerre Mondiale avec une excellente campagne solo qui se lance dans les dernières heures de celle-ci. Une série de flashbacks fait revivre quelques grandes batailles vécues par les combattants d’une unité d’élite. Sans être particulièrement étonnante ou audacieuse, cette campagne procure un réel plaisir de jeu, avec un gameplay parfaitement pensé et qui exploite merveilleusement les consoles de la dernière génération. Les modes multijoueurs proposent une sorte de florilège de la série, avec une grande générosité en termes de missions et de contenus. Comme d’habitude, un mode zombie est proposé en bonus, pas plus révolutionnaire que le reste de ce qui est proposé ici, le tout rappelant au vu de la délectation sincère prise sur ce titre que parfois le mieux est l’ennemi du bien.
Un plaidoyer libertaire avec le nouvel album de Rabaté: Sous les galets, la plage, une BD de Pascal Rabaté (Rue de Sèvres)
Rue de Sèvres
Célèbre auteur des Petits Ruisseaux, Pascal Rabaté propose avec ce nouvel album une chronique douce-amère d’un temps rêvé (le début des Trente Glorieuses), mais pour démontrer que tout n’était pas forcément mieux avant. Préjugés, conservatisme bourgeois, homophobie violente oppressent les jeunes personnages, qui profiteront des événements de cette fin de saison pour se libérer de certains carcans. Comme à son habitude, Rabaté enthousiasme avec cet album magnifiquement dessiné et légèrement érotique autour de l’histoire d’un premier amour impossible. Il dresse avec beaucoup de talent le paysage d’une France qui s’ennuie, attendant d’être décoincée par les événements de mai 1968. Le titre de l’album, la citation de Proudhon en amorce, et la toute dernière case enfoncent le clou pour ceux qui ne l’auraient pas compris : Sous les galets la plage est un vibrant plaidoyer libertaire.
Une cartographie imaginaire des chefs d’œuvre du cinéma: Cinemaps, d’Andrew DeGraff & A.D. Jameson (Ynnis Editions)
Ynnis
Un duo d’Américains s’est amusé à traduire une trentaine de films cultes en cartes retraçant l’itinéraire de leurs personnages. Les lieux sont réels (du Népal au Caire pour Indiana Jones) ou complètement fictifs (les planètes de Star Wars ou de Guardians of the Galaxy). Il résulte de leur projet un travail graphique complètement fou, parfaitement résumé par le premier chapitre dédié au Metropolis de Fritz Lang. La pyramide urbaine dans laquelle se déroule le film s’y trouve reconstituée et intègre le cheminement de neuf personnages du film. L’île de King Kong, la station balnéaire des Dents de la mer, le Nostromo d’Alien et le New York des Ghostbusters suivent avec le même traitement. Si les textes accompagnant les dessins s’avèrent un peu surperflus, le travail de retranscription graphique par Andrew deGraff de films connus de tous est un enchantement, qui résonne comme l’écho lointain d’un autre livre: Movieland de David Honnorat, qui imaginait une carte commune à mille cinq cent films. La cartographie serait-elle le nouvel espace mental des geeks?
Bonus: si vous continuez à manquer d’idées, dix conseils express supplémentaires
- Berezina est une adaptation en BD très réussie du livre de Sylvain Tesson (par Virgile Dureil, Casterman),
- Kill Tête de Chien inaugure une nouvelle série dans l’univers de L’Incal (Brandon Thomas et Pete Woods, Les Humanoïdes associés),
- Pour les amateurs de polars, la trilogie berlinoise de Philip Kerr est adaptée en BD aux Arènes,
- Le Secret de l’Espadon, classique des aventures de Blake & Mortimer, est réédité et fait l’objet d’une suite imaginée par Jean Van Hamme (Dargaud),
- Succès, mode d’emploi (par Ville Ranta, éditions Rackham) dézingue avec bonheur le petit monde de l’édition BD français. Tout le monde en prend pour son grade!;
- Le tome 6 de Blacksad, sorti en octobre, est formidable (Canales / Guarnido, chez Dargaud);
- Deathloop, le nouveau jeu vidéo des studios lyonnais d’Arkane, est un petit chef d’œuvre (Bethesda Softworks);
- Sur Xbox, Forza Horizon 5 est LE jeu de course de voitures de cette fin d’année;
- Il se raconte que le quatrième épisode d’Age of Empires (sur PC) est très réussi;
- Enfin, Metroids Dream sur Switch a également très bonne réputation (je n’ai pas eu l’occasion tester ces deux derniers titres et me fais seulement l’écho des bonnes rumeurs).
À voir également sur Le HuffPost: La bande-annonce de la série “Halo” va ravir les fans du jeu vidéo
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