Pourquoi Anne Sinclair a cédé au “petit jeu narcissique” d’écrire ses Mémoires
“Le journalisme est un métier comme un autre et la télévision, qui gonfle les ego, n’est souvent qu’une usine à baudruche”, concède d’entrée celle qui fut la figure de l’émission 7 sur 7 sur TF1 entre 1984 et 1997. ”À tous ceux qui m’interrogeaient [au sujet d’écrire ses Mémoires], je n’ai cessé de déclarer urbi et orbi qu’à ce petit jeu narcissique, on ne me prendrait pas”, écrit-elle encore. Pourtant comme d’autres avant elle, Anne Sinclair a fini par “manger [son] chapeau” et raconter sa vie dans ce livre.
Et si elle a accepté de “se désavouer” dit-elle, c’est pour reprendre et peut-être aussi rectifier le récit de sa vie alors qu’elle avoue ne pas se reconnaître dans les “deux images contradictoires” qu’on a d’elle: “la présentatrice d’une émission qui fut célèbre il y a plus de vingt ans et qui demeure dans la mémoire collective” d’un côté et de l’autre “la femme qui fit à son corps défendant, des milliers de ‘unes’ de journaux à l’occasion d’un scandale planétaire impliquant son mari [Dominique Strauss-Kahn]”.
Au fil des pages de Passé composé, Anne Sinclair raconte son enfance dans le “cocon protecteur” formé par ses parents entre le XVIe arrondissement de Paris et leur maison de campagne de Fleury-en-Bière. Elle décrit avec enthousiasme comment elle a “attrapé le virus” de l’information alors qu’elle suit à la radio les événements de la guerre d’Algérie. Avant de s’obstiner, à 16 ou 17 ans, à appeler Europe 1 qui donne la parole à ses auditeurs pour questionner, déjà, les plus grands hommes politiques.
“Le chapitre impossible” sur DSK
Au détour de ses souvenirs professionnels, elle évoque le sexisme auquel les femmes journalistes étaient et sont confrontées, ses meilleurs et pires souvenirs d’interviews de Simone Veil à Madonna en passant par François Mitterrand, et à quel point le monde de la télévision et de l’information a muté. “Curieusement, le monde s’est élargi et l’angle des JT s’est rétréci”, constate-t-elle.
Ce n’est qu’au bout de 300 pages, dans “le chapitre impossible” qu’Anne Sinclair évoque “le tsunami” de mai 2011, lorsque Dominique Strauss-Kahn qui était alors son époux est accusé de viol et arrêté à New York. “Il fallait bien en arriver là. Je me suis longtemps accrochée à la fiction que je pourrais écrire mes souvenirs, quelques fragments de vie, et éviter ce passage”, confie-t-elle.
Mais lorsqu’on cède à l’envie d’écrire ses Mémoires, encore faut-il accepter de ne pas occulter les moments sombres de sa vie. “Il aurait été incompréhensible, dans un ouvrage où je balaie les moments forts de ma vie, que je passe sous silence ce qui fut un ébranlement majeur pour moi comme pour la société française qui ne cesse d’y revenir”, livre celle qui assure s’être efforcée “d’être juste, pas exhaustive mais sincère” dans cet ouvrage.
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