Pourquoi la dette publique française est si attractive
Critiquée pour son poids par la plupart des libéraux, la dette publique française a pour elle de nombreuses qualités, comme le prouve l’attractivité qu’elle exerce sur les investisseurs. Une récente étude de la Banque de France permet de mieux comprendre ses atouts.
Elle montre que cette dette marie deux qualités à priori antinomiques. Elle est à la fois très liquide, c’est-à-dire qu’on peut en acheter et en vendre facilement, et en même temps détenue largement par des investisseurs stables qui souhaitent la conserver longtemps dans leur portefeuille de placements. Comment s’opère ce mariage des contraires ?
Le document permet déjà de préciser ce que l’on entend par « liquidité » d’une dette publique.
« La liquidité du marché se définit comme la capacité d’acheter et de vendre des actifs rapidement (immédiateté), en grand volume et à de multiples contreparties (profondeur et largeur) sans en affecter substantiellement le prix (étroitesse ou résilience). »
La dette publique française combine ainsi toutes ces caractéristiques : tous les créanciers – banques, compagnies d’assurance, fonds d’investissement, non-résidents… – qui veulent en acheter ou en vendre peuvent le faire entre eux quand ils veulent, au volume qu’ils souhaitent et sans que cela créé des variations importantes du prix de l’obligation.
A cet égard, on apprend dans la note que, selon les titres de dette, de 30 à 74 % des prix sont cotés par des algorithmes, une proportion ayant doublé au cours des trois dernières années.
Les créanciers ont confiance dans la dette française. En théorie, celle-ci est d’autant plus liquide qu’il y a d’institutions financières pour l’acheter lorsqu’elle est émise afin de la faire circuler ensuite. Pourtant, alors qu’il y a deux fois plus de ce genre d’institutions en Allemagne, les volumes moyens d’échanges traités chaque jour sur la dette française sont équivalents à ceux traités sur la dette allemande.
Les créanciers achètent de la dette française soit pour disposer d’un actif sûr – tous pensent, à juste titre, que la France remboursera toujours sa dette rubis sur l’ongle –, soit pour pouvoir l’utiliser en garantie pour obtenir du cash auprès d’autres acteurs financiers ou des banques centrales.
Les volumes de dette française mobilisés pour ce second objectif sont désormais supérieurs à ceux mobilisés sur la dette allemande. La dette publique française joue ainsi un rôle clé dans le bon fonctionnement de la finance.
Valeur sûre
La dette française est-elle surtout une valeur refuge ou une garantie en vue d’échanges ? Ces dernières années, la part de la dette mobilisable pour des échanges – ce qu’on appelle « le flottant » – n’a cessé de diminuer, perdant 16 points de pourcentage entre 2015 et 2021 pour se situer à un gros tiers (34,8 %) du total.
Les compagnies d’assurance, les banques centrales étrangères et la Banque de France pour la Banque centrale européenne détiennent le reste, dans l’objectif de le conserver. Ils représentent une part importante d’investisseurs stables.
C’est maintenant moins vrai pour la Banque de France, désormais engagée dans une politique de réduction de son bilan. Mais, au rythme prévu actuellement, il lui faudra environ 15 ans pour vider son portefeuille des obligations françaises achetées durant la période du Quantitative Easing, estime l’un des auteurs de l’étude.
La dette publique française joue un rôle clé dans le bon fonctionnement de la finance
Il ne faut cependant pas en conclure que le flottant disparaît. Compte tenu du niveau élevé en valeur absolu de la dette publique française, le montant total du flottant reste proche de son niveau d’avant-recul, autour de 700 milliards d’euros, et rend bien des services au fonctionnement de la finance.
La baisse du flottant et les possibles problèmes de liquidité qu’elle entraîne ne concernent pas que la dette française. La fin de la note souligne combien cette évolution fait l’objet d’une attention toute particulière un peu partout de la part des autorités budgétaires, monétaires et financières (à ce titre, le document détaille bien les mécanismes mis en place par la Banque de France et l’Agence France Trésor pour prêter au marchés les titres dont il aurait besoin).
A ce stade, la dette publique française ne rencontre pas de difficultés, à la fois détenue par des investisseurs de long terme et disponible aux échanges. Elle représente une valeur sûre pour les créanciers nationaux et internationaux.
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