Procès de Saint-Étienne-du-Rouvray: Rachid Kassim, le grand absent
Le père Hamel a été tué, égorgé par deux assaillants alors qu’il officiait lors de la messe matinale dans son église. Adel Kermiche et Abdel Malik Petitjean, retranchés dans l’édifice religieux, ont été tués peu après l’attentat lors de l’intervention des hommes de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) de Rouen et de la brigade anticriminalité. Quatre autres personnes, accusées de complicités diverses, comparaîtront devant la cour d’assises spéciale de Paris.
Trois sont accusés d’association de malfaiteurs terroriste en vue de commettre des crimes d’atteinte à la personne ou complicité d’assassinat: Farid K., Yassine S. et Jean-Philippe Steven Jean-Louis auraient porté assistance aux deux tueurs ou auraient eu connaissance du projet d’assassinat du père Jacques Hamel. Ils encourent jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle.
Mais dans les faits, ce ne sont pas quatre, mais trois hommes qui se tiendront sur le banc des accusés. Rachid Kassim, qui aurait tenu un grand rôle dans l’attentat, est en effet le grand absent de ce procès. Et pour cause: il est présumé mort en Syrie depuis cinq ans.
L’ombre de Rachid Kassim derrière la mort du père Hamel
Rachid Kassim est considéré comme l’instigateur de l’attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray. Il a, selon les juges, “sciemment encouragé et facilité le passage à l’acte” des deux assaillants avec des “conseils opérationnels et des instructions en vue de commettre l’attentat”.
Visé par un mandat d’arrêt. Il est toutefois présumé mort: il aurait été tué le 8 février 2017 dans la zone irako-syrienne dans un bombardement de la coalition contre Daech. Cet ancien animateur social a rejoint la Syrie en 2012 avec sa famille.
Avant de se lancer sur la route sanglante du jihad, Rachid Kassim était un jeune “sans histoire” habitant à Roanne (Loire). Il y menait une vie d’agent municipal, employé par la mairie en qualité d’animateur dans un centre social. C’est après un voyage en Algérie en 2011 que le jeune homme change, et entame son processus de radicalisation.
Il attire notamment l’attention de son employeur lorsqu’il demande une salle de prière sur son lieu de travail. Requête qui lui a été refusée. Selon le Dauphiné Libéré, l’intéressé a quitté la France en 2012.
Attentats de Nice et Magnanville, attentat manqué de Notre-Dame…
Direction l’Égypte où il disparaît des radars, avant de réapparaître en 2016 dans la vidéo de revendication de l’attentat de Nice qui avait fait 86 morts le 14 juillet sur la promenade des Anglais. “Visage découvert, vêtu d’un treillis militaire, il glorifiait l’action du tueur de Nice, profère des menaces à l’encontre de la France et décapite, en pleine rue, un otage de sang froid”, décrivait L’Express.
Sur les réseaux sociaux, et notamment récemment via l’application Telegram, Rachid Kassim se distinguait par sa capacité à multiplier les appels à commettre des attentats sur le sol français. Et pour augmenter ses chances d’être suivi, le jihadiste proposait différents modes opératoires, pour faciliter le passage à l’acte des aspirants terroristes. Ainsi, comme l’a repéré le spécialiste du terrorisme Jean-Charles Brisard, le mode opératoire de l’attentat avorté à Notre-Dame a été préconisé par Rachid Kassim un mois avant la découverte du véhicule.
Parmi les modes opératoires qu’il a pu énumérer figurent les modes d’action des terroristes de Saint-Étienne-du-Rouvray et de l’attentat au camion-bélier de Nice. Par ailleurs, le jihadiste avait aussi fourni une liste de cibles aux candidats aux attentats. Une liste qui avait été citée par Larossi Abballa après son attentat à Magnanville.
Outre cet aspect purement pratique, Rachid Kassim assurait aussi le côté spirituel du passage à l’acte. “Si on n’a pas de signe particulier et si on n’est pas top niveau religion, peut-on attaquer la France? – Sache que les gens qui ont le moins de signes sont ceux qui ont la plus grande force. (…) Le meilleur remède pour le pécheur, c’est le jihad”, expliquait-il dans une conversation captée par Le Monde. Et concernant le lien avec l’État islamique, c’était également le Roannais qui s’en occupait: “avant l’attaque, envoyez-moi une vidéo avec une dawa et une allégeance”. La coalition contre Daech aura donc réussi, quelques mois après la mort du père Jacques Hamel, à mettre fin à ses agissements.
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