Le coup de maître antidémocratique contre l'équité fiscale

ECONOMIE

Le coup de maître antidémocratique contre l’équité fiscale

« Les impôts représentent le coût d’une société civilisée », déclarait Henry Morgenthau, ministre des Finances de Franklin D. Roosevelt en 1937. « Trop de citoyens aspirent à une civilisation à bas prix », ajoutait-il. Une réflexion prémonitoire sur notre situation budgétaire actuelle.

Malheureusement, c’est la conclusion que l’on peut tirer de la récente séquence à l’Assemblée nationale. Rappelons les événements. La politique macroniste a entraîné un glissement considérable de nos finances publiques et le gouvernement souhaite y remédier par un budget d’austérité qui mise trop sur la réduction des dépenses, nuisant ainsi à l’activité et à l’emploi.

<p Lors des travaux de la commission des Finances, puis en assemblée plénière, la gauche a réussi à faire adopter des amendements permettant un double rééquilibrage : des recettes fiscales additionnelles, basées sur une justice fiscale accrue.

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Dans cet ensemble de mesures, seuls les très riches et les grandes entreprises étaient ciblés. Mentionnons la taxation des biens des ultrariches, l’augmentation des impôts sur les revenus du capital, y compris une contribution exceptionnelle sur les dividendes versés par les sociétés du CAC 40.

Front de rejet antigauche

Les grandes entreprises faisaient face à une imposition sur les superprofits et à une régulation de l’une de leurs principales niches fiscales, le régime mère-fille qui permet d’exonérer une partie des paiements des filiales à leur société mère. Il faut également ajouter une augmentation de la taxe sur les transactions financières et un retour progressif des impôts de production pour les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard d’euros.

L’Assemblée visait donc à maîtriser le déficit budgétaire par le prisme de la justice fiscale. Cela était inacceptable pour le gouvernement. Charles de Courson, rapporteur du budget, avait néanmoins évalué à 12 milliards le montant des recettes supplémentaires résultant des mesures adoptées, alors que Laurent Saint-Martin, ministre du Budget, l’a estimé à 35 milliards, qualifiant cela de « budget Frankenstein ». La justice fiscale est perçue comme un monstre.

Le bloc des droites, allant de la macronie au Rassemblement national, a formé un front antigal pour rejeter toutes ces propositions. Le débat se déplacera au Sénat puis reviendra à l’Assemblée, avec de fortes chances de se conclure par un 49-3.

À l’heure actuelle, le RN opte pour un soutien sans implication au gouvernement. Comme l’évoque le philosophe Michel Feher, cela constitue plus qu’une simple étape vers un gouvernement commun. Ce sera l’héritage politique d’Emmanuel Macron.

Qui est donc l’auteur du don d’un million d’euros pour la restauration de l’église de Saint-Omer ?

ACTUALITÉS

Qui est donc l’auteur du don d’un million d’euros pour la restauration de l’église de Saint-Omer ?

Aussi bienveillant que réservé. Un donateur énigmatique a pris l’initiative, par le biais d’une collecte en ligne, de fournir un million d’euros pour la réhabilitation de l’église de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais, dévastée en septembre par un feu, comme l’indique Europe 1.

Peu de temps après l’incendie criminel qui a endommagé le bâtiment sacré, une campagne de financement avait été lancée par la Fondation du patrimoine. Plus de 135.000 euros avaient déjà été collectés. Cela reste éloigné des cinq millions d’euros prévus pour la restauration. Cependant, ce montant a été revu à la hausse grâce à la contribution d’un mécène.

Un suspense prolongé

<pAprès avoir gardé le mystère pendant un certain temps, la mairie de Saint-Omer a divulgué ce vendredi soir le nom de ce généreux contributeur. Il s'agit du groupe Dassault, à travers sa fondation Dassault Histoire et Patrimoine, comme l’a rapporté la Voix du nord. D’après le magazine Challenges, la fortune des Dassault était évaluée à 28,6 milliards d’euros en 2022.

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INVESTIGATIONS

«Abonnez-vous matin»: lecture de Mediapart et journée LVMH avec Khedidja Zerouali

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L'établissement scolaire souffrant de l'évaluationnite

ECONOMIE

L’établissement scolaire souffrant de l’évaluationnite

L’évaluation représente un aspect fondamental de l’enseignement. C’est un moyen pour les éducateurs d’ajuster et de réguler leur pratique, et c’est un feed-back essentiel tant pour eux que pour leurs élèves.

Cependant, une forme spéciale d’évaluation a pris une ampleur considérable ces dernières années : les évaluations nationales. Initiées en CE2 en 1989 et élargies à partir de la rentrée 2018, elles ont continué à se développer et impliquent désormais les niveaux de CP, CE1, CE2, CM1, CM2, 6e, 4e, 2nde et la première année de CAP.

Ainsi, 2024 sera une année record pour l’Education nationale en matière d’évaluations ! Plus de 6 millions d’élèves ont effectué des tests standardisés au début de l’année scolaire. Quel est l’objectif de cette évaluation inutile ? Quels sont les rôles de ces tests et quels sont les effets indésirables que critiquent les syndicats d’enseignants qui s’y opposent ? Que révèle cette évaluation incessante sur l’évolution de l’école et de la profession enseignante ?

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Considérons le cas du CP. Selon les informations fournies sur le site du ministère, en septembre, les élèves ont passé trois tests de dix minutes en français, et deux de onze minutes en mathématiques. Ensuite, à la fin janvier, en français, il y aura deux sessions d’évaluation de dix minutes et deux épreuves individuelles d’une minute chacune (si vous avez 25 élèves, il faudra s’organiser pour occuper les autres en attendant !). Enfin, en mathématiques, un test de huit minutes et un autre de treize minutes.

Il faut envisager les élèves de CP, qui n’ont eu en septembre qu’une seule semaine de cours depuis la rentrée : ils ont changé d’établissement, de rythme, sont assis plus longtemps qu’en maternelle, ont leur cartable et leurs affaires à gérer… et ils se retrouvent déjà en situation d’évaluation.

Des évaluations dissociées des apprentissages

Ce que la présentation officielle omet de mentionner, c’est le temps d’explication nécessaire pour des élèves un peu stressés et désorientés, les soucis d’organisation matérielle, le simulacre du chronométrage… Après la passation, il y a également la saisie des résultats par l’enseignant (il serait intéressant de discuter des applications et logiciels utilisés dans l’Education nationale et de l’obsolescence du matériel…), sans oublier leur traitement ultérieur.

Ce mélange entraîne le stress des examens, la surcharge de travail des enseignants et la perte de temps qui nuit aux apprentissages. En effet, ces tests sont principalement effectués au début de l’année, période où les élèves commencent à établir quelques repères et habitudes de travail… qu’ils perdent en raison de ces évaluations gourmandes en temps et déstabilisantes.

Nombreux sont les enseignants qui déplorent la perte du plaisir d’apprendre et de la motivation sous la pression de la performance et des risques d’échec. Il est important de noter que ces évaluations sont critiquées depuis leur introduction par les enseignants, car elles ne reflètent pas ce qui se passe en classe.

Souvent, des connaissances non encore abordées sont évaluées. Ces examens imposent des standards aux niveaux de classe, alors que l’éducation est organisée par cycles, qui englobent plusieurs niveaux (CP/CE1/CE2 pour le cycle 2, CM1/CM2/6e pour le cycle 3), permettant normalement des apprentissages prolongés.

« Peser un cochon ne l’a jamais fait grossir », selon un proverbe rural. Le temps consacré à ces tests, qui ne sont pas en lien avec le travail des enseignants, ne contribue que très peu à la remédiation et encore moins aux apprentissages. Ces activités envahissent le temps sans réelle efficacité pédagogique.

Rappelons que l’évaluation en soi n’est pas problématique. Tous les enseignants testent leurs élèves et proposent des évaluations diagnostiques (avant les apprentissages), formatives (pendant) et sommatives (après). Tous cherchent à déterminer le niveau des enfants qui leur sont confiés. Mais pas de cette manière !

Qui est évalué : les élèves ou les enseignants ?

Alors, quelles sont réellement les fonctions de ces évaluations nationales ? Pour répondre à cette question, il est essentiel de remonter à leur origine. Historiquement, il y a toujours eu des dispositifs pour évaluer la performance du système éducatif. Toutefois, pour cela, il n’est pas nécessaire de faire passer des tests à tous les élèves, un échantillon pourrait suffire (comme pour Pisa).

Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education de 2017 à 2021, a eu une influence significative dans l’adoption généralisée des évaluations. Elles se sont intensifiées avec l’expérimentation des dédoublements dans les classes de CP et CE1 dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP).

Le ministre considérait qu’il était nécessaire que ces dispositifs soient mesurables. « Il doit y avoir une hausse des évaluations, non pas pour le plaisir d’évaluer, mais parce que c’est un levier indiscutable d’amélioration », affirmait-il en 2018.

Cependant, bien qu’elles soient présentées comme un outil d’évaluation des politiques publiques, elles fonctionnent avant tout comme un outil de pilotage. Au final, elles servent également et surtout à évaluer et contrôler les enseignants.

Comme nous l’avons constaté, cela entraîne effectivement une certaine standardisation des pratiques des enseignants. C’est l’évaluation (l’aval) qui conditionne l’approche pédagogique (l’amont). C’est ce qu’on appelle le « teaching to test ». Si l’on se concentre uniquement sur les « fondamentaux », on risque de n’enseigner que ces éléments.

Ce pilotage et cette normalisation se manifestent tant au primaire qu’au secondaire. Et, au collège, ils se combinent avec une dynamique de sélection, illustrée par les fameux « groupes de niveaux ».

D’une certaine manière, nous assistons à une dépossession du métier d’enseignant qui remet en question la liberté pédagogique. L’école ne doit ni devenir ni être une institution avec des pratiques uniformisées, éloignées des besoins des élèves.

Quantophrénie

Au-delà des évaluations nationales, l’Education nationale souffre d’un mal qui touche de nombreux autres organismes et services publics : la quantophrénie. Ce terme spécifique, introduit par le sociologue américain Pitrim Sorokin, désigne « la maladie qui vous pousse à tout mesurer et à tout quantifier ».

Le sociologue Vincent de Gaulejac l’évoque pour parler de « l’idéologie managériale » dans son ouvrage La Société malade de la gestion. Cela rejoint l’affirmation du célèbre auteur de management Peter Drucker, qui disait que « vous ne pouvez pas gérer ce que vous ne pouvez pas mesurer » : là où le qualitatif serait nécessairement subjectif, le quantitatif offrirait l’objectivité.

Les directeurs d’école et les personnels de direction des établissements secondaires peuvent en témoigner. Une partie de leur travail consiste à compléter des tableaux Excel pour le niveau supérieur.

Les évaluations nationales ne sont qu’une extension de la mesure aux enseignants et aux élèves, illustrant une idéologie managériale appliquée aux services publics. Mais peut-on réduire l’acte éducatif à des tests standardisés et des statistiques ? Bien qu’il soit essentiel d’évaluer, laissons aux enseignants le soin de le faire à leur rythme et selon leur méthode ! C’est leur profession et leur expertise.