Quand la « guerre du raï » agitait l’Île-de-France
Festival de la chanson Raï en France (1986), de gauche à droite : Cheb Mami, Khaled, Cheb Hamid, Cheb Sahraoui. Au tournant des années 1980, d’un peu partout dans l’Île-de-France, résonnent de nouvelles sonorités entrainantes venues tout droit de l’Ouest algérien. Des décennies après son essor de l’autre côté de la Méditerranée, le raï arrive enfin à s’implanter ici, avec ses têtes de proue comme Khaled ou Cheb Mami. Et certains sentent le filon de ce nouveau genre musical né dans la région d’Oran : ils décident d’ouvrir des discothèques où les DJs jouent donc du raï, quand ce ne sont pas directement les artistes qui viennent s’y produire en show case. Or, plusieurs de ces nouveaux acteurs de la nuit francilienne ont un point commun : faire partie du grand banditisme de l’Hexagone. Et, comme l’on pouvait sans doute s’y attendre, l’histoire ne s’est pas forcément bien finie. Publicité Cette « guerre du raï » est, entre autre, le sujet du récent ouvrage Maghreb Connection (Robert Laffont) écrit par les journalistes Stéphane Sellami et Brendan Kemmet, qui retracent l’influence grandissante de ces voyous originaires du Maghreb dans la voyoucratie française. L’ouvrage fait notamment la part belle à Mohamed Amimer, dit « le grand Momo » ou « l’Élégant ». Un membre éminent de cette famille décomposée du grand banditisme, connu pour ses braquages et évasion de prison spectaculaires, qui est aussi un des premiers à avoir senti le bon coup du raï en France. Avec sa discothèque baptisée « Le Triangle » et posée en banlieue parisienne dans la petite ville d’Andilly, Amimer dit avoir ouvert la voie à d’autres. Pour comprendre pourquoi une grande partie des discothèques de raï des années 1990 se sont retrouvées dans l’escarcelle de voyous, on a passé un coup de fil à un des auteurs, Brendan Kemmet. VICE : Est-ce bien…
Cartouche, itinéraire du premier bandit français
La France sait exporter ses bandits de fiction. Arsène Lupin, le gentleman cambrioleur de Maurice Leblanc adapté par Netflix et porté par Omar Sy, n’est-il pas ce carton d’audience planétaire vendu par la plateforme de streaming et ses chiffres (un poil) romancés ? Un succès qui aura fini par invisibiliser les figures de la rapine hexagonales faites de chair et d’os. Ces destins de « brigands d’honneur » comme celui de Louis Dominique Cartouche qui sévit au XVIIIe siècle avec sa bande et se distingue à grands coups de braquages de diligences et de casses spectaculaires, devenant même un des premiers bandits « médiatisés » dont la courte carrière sera retracée par des chansons et des pièces de théâtre. « Cartouche, je l’ai découvert probablement comme beaucoup de gamins de ma génération, par le film de Philippe de Broca, quand il est sorti au cinéma [1962], raconte Patrick Pécherot, auteur d’un texte consacré au « prince des voleurs » dans le recueil Bandits & Brigands, (ouvrage publié aux éditions L’Échappée, dans la collection Lampe –Tempête). Pour moi, ça a été un éblouissement. Il m’est apparu dans sa forme sublimée et bondissante [incarné par Jean-Paul Belmondo] mais j’avais aussi été très sensible au changement de ton qui se produit dans le film. De la comédie picaresque de cape et d’épée au drame et cette scène finale qui laisse deviner le sort réservé à Cartouche. » Avant que ne s’abatte la masse du bourreau un jour de novembre 1721 en place de Grève à Paris, Cartouche aura multiplié les coups d’éclat, forgeant une légende qui l’accompagne encore aujourd’hui de « bandit social ». On le décrit comme un homme rusé, à l’intelligence d’Ulysse, tantôt manipulateur, acrobate, ou séducteur. Pourtant, contrairement à un de ses successeurs, Louis Mandrin, qui redistribuait assez largement le butin arraché aux collecteurs d’impôts, Cartouche ne faisait pas systématiquement ruisseler ses…
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