CULTURE
Hajer Ben Boubaker est une chercheuse indépendante et documentariste, reconnue pour ses travaux primés par l’UNESCO. En septembre, elle a publié son premier livre, intitulé “Barbès Blues – Une histoire de l’immigration Maghrébine à Paris”. Cet ouvrage se penche sur l’histoire des immigrés maghrébins à Paris, de leur arrivée au début du XXe siècle jusqu’à la fin des années 1980, tout en explorant les rues de la capitale. Dans une interview, elle a évoqué l’impact culturel de cette immigration, son attachement au quartier de Barbès, la fermeture du célèbre Tati, symbole du lieu, et les transformations profondes de la ville de Paris.
Hajer Ben Boubaker a expliqué comment elle est passée d’une étude sur la musique à une exploration sociologique de l’immigration maghrébine. Après avoir travaillé sur l’histoire et la diffusion des musiques arabes en France, elle a constaté des interactions avec la sociologie quotidienne de cette communauté. Ses recherches à l’échelle locale l’ont amenée à créer une cartographie plus complète de Barbès, et elle a pu élargir son étude grâce à un documentaire réalisé pour France Culture sur le Mouvement des Travailleurs Arabes, qui a mis en lumière les luttes pour les droits des immigrés.
Pour la collecte des témoignages, elle a exploré une grande diversité de sources, allant des archives policières aux archives militantes, en passant par les musiques et les archives sonores de l’INA. Sa démarche a été riche et minutieuse, impliquant des années de recherche pour retrouver des militants et les convaincre de partager leur expérience.
Dans “Barbès Blues”, l’auteure fait preuve d’une grande capacité à mélanger les genres littéraires, créant une narration qui, bien que fondée sur des faits vérifiés, témoigne également d’une dimension romanesque. Elle a tenu à préserver les voix des personnes interviewées, en leur laissant la liberté de s’exprimer sans correction, ce qui illustre leur authenticité et leur vécu.
En discutant des cafés, elle souligne leur importance pour les immigrés maghrébins, évoquant comment certains ouvriers ont pu acheter et gérer des cafés, souvent en reprenant ceux laissés par des Auvergnats. Des Kabyles ont eu un rôle significatif dans la gestion de ces établissements, transmettant ce savoir à leurs enfants.
Hajer Ben Boubaker note que le paysage parisien a drastiquement changé au fil du temps, et même si elle reconnaît qu’il n’est pas forcément négatif que les quartiers soient moins prolétaires qu’auparavant, elle critique la spéculation immobilière qui a chassé les personnes moins favorisées de la ville. Paris, autrefois un bastion ouvrier, est désormais devenue une ville de plus en plus chère et bourgeoise.
Elle choisit d’intituler son livre “Barbès Blues” car ce quartier est intimement associé à la communauté maghrébine, qui s’y est fortement implantée sur les plans commercial, politique et culturel. Barbès est reconnu bien au-delà de ses frontières, et cet ouvrage lui rend hommage.
Enfin, concernant le Tati de Barbès, elle évoque son rôle historique dans la mémoire collective des immigrés et sa signification dans le cadre des responsabilités familiales, tout en notant une baisse de fréquentation de cet établissement face à l’augmentation des prix et à la réduction des offres disponibles.
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