La vérité sur le viol facilité par des drogues : « Quand je me suis réveillée, mon corps était meurtri »

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La vérité sur le viol facilité par des drogues : « Quand je me suis réveillée, mon corps était meurtri »

Gisèle Pelicot a renoncé à son anonymat pour mettre le viol facilité par des drogues sous les projecteurs, et ses expériences de violence sexuelle ont choqué le monde. Que savons-nous d’autre sur ce crime des plus cachés ?Magistrate et cadre des ressources humaines dans la cinquantaine avancée, stable, célibataire, sans fréquentations ni activité sexuelle, Jo sentait que son risque de devenir victime de viol était passé, ou était certainement faible – et que le viol facilité par des drogues, en particulier, était quelque chose qui arrivait aux jeunes, dans les clubs, lors de fêtes, « sur les applis ». Lorsqu’il lui est arrivé il y a deux ans, c’est son fils adulte qui a dû en faire le sens, et expliquer pourquoi elle s’était réveillée nue à côté d’un homme pour lequel elle n’avait aucun sentiment, du sang sur le lit, une douleur entre les jambes, sa mémoire de cette nuit étant un espace vide.Son violeur était quelqu’un qu’elle connaissait depuis le secondaire, un ancien camarade de classe qu’elle n’avait pas vu depuis leur dernier A-level, jusqu’à cette semaine de novembre 2022. À un moment donné, il avait émigré et s’était ensuite reconnecté avec Jo (ce n’est pas son vrai nom) via Friends Reunited. Ils échangeaient des messages une fois par an autour de leurs anniversaires, qui sont proches l’un de l’autre. C’était le seul contact qu’ils avaient jusqu’à ce qu’il prenne contact pour dire qu’il était de retour pour rendre visite à sa famille, et que dirait-elle d’un café ? Continue reading…

La cour d'appel roumaine trouve des défauts dans l'affaire contre Andrew Tate

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La cour d’appel roumaine trouve des défauts dans l’affaire contre Andrew Tate

Les juges ordonnent aux procureurs de retirer ou de modifier l’accusation contre l’auto-proclamé « influenceur misogyne »Un tribunal en Roumanie a statué que l’une des affaires des procureurs publics contre l’auto-proclamé « influenceur misogyne » Andrew Tate comporte de nombreuses irrégularités et leur a ordonné de la modifier ou de la retirer dans un délai de cinq jours.Dans un revers pour l’unité de poursuite anti-crime organisé du pays, Diicot, la cour d’appel de Bucarest a déclaré mardi qu’elle « considérait certaines des objections de la défense comme valables » et avait trouvé plusieurs défauts dans l’accusation. Continue reading…

La démythification de la droitisation française, et 3 autres recommandations de lecture

ECONOMIE

La démythification de la droitisation française, et 3 autres recommandations de lecture

Chaque samedi, Alternatives Economiques met en avant des livres qui méritent votre attention. Cette semaine, nous vous suggérons : La droitisation française, par Vincent Tiberj ; Le jardin et la jungle, par Edwy Plenel ; Quand les travailleurs sabotaient, par Dominique Pinsolle ; Critique de la raison décoloniale. Sur une contre-révolution intellectuelle, par un collectif de chercheurs.

1/ « La droitisation française. Mythe et réalités », par Vincent Tiberj

A l’époque où Cnews triomphe, le Rassemblement national (RN) affiche des résultats historiques et Bruno Retailleau devient ministre de l’Intérieur, il est difficile de penser que la France ne s’oriente pas vers la droite. Pourtant ! Dans son dernier livre, Vincent Tiberj démontre, en utilisant un indicateur statistique inédit – les indices longitudinaux de préférence –, que les citoyens sont de plus en plus culturellement ouverts, de moins en moins xenophobes, et qu’ils ne deviennent pas plus libéraux.

Comment peut-on alors expliquer les résultats électoraux, clairement en faveur de la droite ? En s’appuyant sur ses études sur l’abstention électorale, le sociologue met en évidence les faiblesses de la démocratie française. Il décrit une « grande démission » des citoyens qui, loin d’être apolitiques, rejettent le système institutionnel et partisan. Une bonne nouvelle pour la gauche, ces citoyens de plus en plus progressistes sont bien présents.

Cependant, des réformes institutionnelles et politiques profondes seront nécessaires pour persuader ces électeurs de retourner aux urnes par choix, et non par obligation quand la situation l’exige.

Vincent Grimault

La droitisation française. Mythe et réalités, par Vincent Tiberj, PUF, 2024, 310 p., 15 €.

2/ « Le jardin et la jungle. Adresse à l’Europe sur l’idée qu’elle se fait du monde », par Edwy Plenel

Le haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères, Josep Borrell, a comparé l’Europe à un jardin et le reste du monde à une jungle, ce qui a choqué Edwy Plenel, journaliste et cofondateur de Mediapart. En rappelant à quel point la violence est une composante essentielle de l’histoire européenne, à travers la colonisation, les guerres mondiales, les génocides perpetrés sur le continent ou encore la répression des étrangers, l’auteur remet en question l’idée que le Vieux Continent serait un espace de sérénité.

Face à l’humanité sélective des dirigeants européens, Edwy Plenel propose le droit international comme guide. On ne peut pas défendre le peuple ukrainien tout en ignorant les droits du peuple palestinien, car ce sont les mêmes principes en jeu. En négligeant les droits des Palestiniens, on renforce l’extrême droite et les fascistes, qui sont les principaux opposants à l’égalité des droits.

Le livre, qui aborde en profondeur la question du colonialisme et fait quelques allusions à la Nouvelle-Calédonie, propose une analyse très pertinente des relations entre l’Europe et le reste du monde.

Eva Moysan

Le jardin et la jungle. Adresse à l’Europe sur l’idée qu’elle se fait du monde, par Edwy Plenel, La Découverte, 2024, 216 p., 18 €.

3/ « Quand les travailleurs sabotaient. France, Etats-Unis (1897-1918) », par Dominique Pinsolle

Il fut un temps où la CGT avait envisagé d’intégrer la pratique du sabotage dans ses méthodes d’action. Ici, le sabotage est à entendre comme un mauvais travail intentionnel : une lenteur excessive, laisser tomber ses outils dans la machine, etc., tout ce que la classe ouvrière pouvait imaginer comme « ruses de guerre » contre les capitalistes pour améliorer leurs conditions. Bien que ce phénomène ait été observé en Écosse dès 1889, il a été théorisé en France par l’anarchiste Emile Pouget. Cette pratique a traversé l’Atlantique pour se retrouver dans l’IWW, un syndicat révolutionnaire américain.

Le livre présente de nombreuses théories, mais la pratique est demeurée limitée, même si les adversaires des syndicats ont souvent exagéré cette question pour l’assimiler à la violence, la destruction et le crime. Les réflexions de Taylor sur l’organisation scientifique du travail ont émergé de cette problématique : comment éviter tout ce qui pourrait ralentir la production. Dès la fin des années 1910, l’idée même tombe en désuétude. Une partie méconnue de l’histoire économique.

Christian Chavagneux

Quand les travailleurs sabotaient. France, Etats-Unis (1897-1918), par Dominique Pinsolle, Agone, 2024, 455 p., 25 €.

4/ « Critique de la raison décoloniale. Sur une contre-révolution intellectuelle », par un collectif de chercheurs

S’il existe un domaine à l’interface de la sociologie et de l’histoire qui a connu un essor considérable récemment et où le débat est particulièrement vif, c’est celui des études décoloniales. Ce néologisme un peu particulier a établi une doxa selon laquelle il serait nécessaire de décoloniser tous les domaines (l’art, la connaissance, le droit…) au motif que les imaginaires et la culture occidentale sont fondamentalement coloniaux et donc porteurs de logiques racistes.

Comme le souligne Mikaël Faujour dans la préface de ce précieux livre collectif (écrit par des contributeurs d’Amérique latine) : « Bien que la théorie décoloniale se soit développée à partir de la spécificité de l’Amérique, considérant 1492 comme un tournant dans l’histoire, elle a dès son origine vocation à être transposée dans d’autres contextes géographiques et culturels, offrant ainsi un cadre d’analyse plus large du monde contemporain […]. »

De nos jours, il est évident que les thèses décoloniales sont de plus en plus acceptées par les jeunes et les étudiants militants. Ce livre, grâce à ses multiples éclairages puisant aux racines de ces théories, facilite la compréhension de leurs linéaments, de leurs complexités et des raisons de leur popularité dans presque toutes les régions du monde.

Christophe Fourel

Critique de la raison décoloniale. Sur une contre-révolution intellectuelle, par Collectif, Coll. Versus, L’échappée, 2024, 255 p., 19 €.

Bruno Retailleau : notre petit Donald Trump ?

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Bruno Retailleau : notre petit Donald Trump ?

Suite au triomphe électoral de Donald Trump aux États-Unis, la tendance conservatrice, voire nationaliste, est en plein essor, et le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, en est le plus notable représentant au sein de notre gouvernement. Celui-ci multiplie les interventions médiatiques et les controverses dignes d’un régime d’extrême droite. Il a notamment diffusé une information inaccurate concernant l’incident de Poitiers, qu’il a utilisé pour justifier une politique ultra-sécuritaire contre ce qu’il appelle ses propres termes, les narco-racailles. Le mois précédent, Bruno Retailleau avait également pris position contre l’État de droit. Quelles raisons expliquent que l’un des fondements majeurs de la démocratie soit aujourd’hui en péril à cause de notre ministre de l’Intérieur ? Trump et Retailleau ne reculent pas devant la manipulation de l’information pour servir leur récit nationaliste. On se rappelle de la fausse nouvelle de Trump sur les immigrants qui prétendument consommaient des animaux de compagnie… Bruno Retailleau a lui aussi recouru à la désinformation concernant la fusillade de Poitiers ayant coûté la vie à un adolescent. Le ministre de l’Intérieur avait déclaré à tort qu’une rixe avait impliqué entre « 400 et 600 individus ». Cependant, selon les autorités policières et judiciaires, les tensions n’ont touché que quelques dizaines de personnes présentes aux abords de la scène de crime. Et malgré ces éléments, et les demandes de la maire de Poitiers à Bruno Retailleau pour qu’il rétablisse les faits, aucun démenti n’a été publié. Retailleau a même affirmé à ce sujet : « Mon combat, ce n’est pas un combat statistique »… Comment peut-on expliquer cette incapacité des politiques réactionnaires à s’accorder avec la vérité et les faits ? Dans le cadre de cette analyse, nous allons élargir notre perspective à l’échelle internationale et examiner, avec Beligh, la montée des partis d’extrême droite en Europe et à travers le monde.