« Bruno Reidal », itinéraire d’un ado meurtrier
Pour son premier long métrage, Vincent Le Port s’est inspiré d’un fait divers qui a eu lieu le 1er septembre 1905 en fin d’après-midi dans la forêt qui borde Raulhac, bourg situé à quelques kilomètres d’Aurillac. Reidal s’appelle encore Jean-Marie Bladier, 17 ans, 1m62, 50 kg, d’apparence délicate, carrure faible, poitrine étroite, musculature grêle, corps maigre et chétif, légèrement voûté, la tête inclinée sur la poitrine et penchée du côté droit. Il rejoint dans le bois Jean Raulnay, 13 ans, parti couper des herbes ou ramasser des branches mortes, et lui propose, une fois la besogne accomplie, d’aller cueillir quelques noisettes. Alors que Raulnay se hausse sur la pointe des pieds pour atteindre une branche, Bladier se jette brusquement sur lui, le renverse, lui tranche la gorge avec son couteau de poche et une précision qui surprendra le médecin légiste rapporte La Gazette. « Décollation pratiquée sur le vivant » : la tête de Raulnay est retrouvée à quelques mètres du corps. Bladier se rend dans la foulée de son forfait. Il est qualifié de « monstre » par le Courrier de Saône-et-Loire qui l’accuse d’avoir tué sans raison aucune et pour le simple plaisir. Sa confession et son absence de remords attirent l’attention d’une sommité de la médecine légale, le professeur Alexandre Lacassagne qui, accompagné de deux aliénistes, les docteurs André Papillon et Auguste Rousset, va l’interroger en prison pour statuer sur son hypothétique folie. Une demande un peu particulière est faite au meurtrier : le récit écrit et circonstancié de sa vie jusqu’au crime. Derrière les barreaux, Bladier rédige onze carnets d’écoliers dans lesquels il narre son enfance, le quotidien d’un jeune pâtre dans le Cantal de la fin du XIXe siècle qui lutte contre l’envie de donner la mort. Une partie de ce texte est reproduite dans le rapport médical, publié en 1907 aux Archives d’anthropologie criminelle, de…