‘C'est grossier’ : Les entreprises de trottinettes électriques menacent de quitter l'Italie après la mise à jour du code de la route

ACTUALITÉS

‘C’est grossier’ : Les entreprises de trottinettes électriques menacent de quitter l’Italie après la...

Peur pour les emplois après que le parlement a voté pour des casques, une assurance et de lourdes amendes pour les conducteurs ‘indisciplinés’ et le stationnement sauvage, au milieu d’une augmentation des accidents de la routeSur une route près de la congestion routière de la Piazza Venezia à Rome, un conducteur de trottinette électrique zigzague à travers une foule de piétons, qui essaient à leur tour de ne pas trébucher sur une trottinette abandonnée sur le trottoir. À la traversée adjacente, deux conducteurs de trottinette électrique passent à toute vitesse devant un feu rouge tandis qu’un autre glisse autour du virage avec son passager capturant le trajet sur son téléphone mobile.De telles scènes sont devenues courantes dans la capitale italienne et d’autres villes ces dernières années, au milieu de l’explosion de popularité des trottinettes électriques en libre-service. Mais maintenant, le gouvernement durcit le ton sur l’utilisation indisciplinée de ces véhicules dans le cadre d’une réforme plus large du code de la route.

Procès du RN : Marine Le Pen, la cheffe d'un gang qui se croit au-dessus des lois

MEDIA

Procès du RN : Marine Le Pen, la cheffe d’un gang qui se croit au-dessus des lois

Ultime semaine dans le procès des assistants parlementaires européens du Front national, le “parti le plus propre de France” – selon ses dirigeants. Semaine consacrée aux plaidoiries de la défense dans cette affaire de détournement de fonds publics au Parlement européen, évalué à 4,5 millions d’euros.Après le réquisitoire des procureurs (des peines de prison, des amendes, de l’inéligibilité ont été demandées), les représentants du Rassemblement national ont lancé “l’opération victimisation” : procès politique ! Complot visant à déclarer Marine Le Pen inéligible !Les faits sont accablants, mais on ne sait pas ce qui adviendra : le réquisitoire des procureurs ne sera pas forcément suivi par les juges. Mais il existe une probabilité que Marine le Pen ne puisse pas se présenter en 2027.Quel que soit le candidat qui s’y présentera, on pourra à nouveau mesurer à quel point ses électeurs parviennent à surmonter mentalement toutes ces contradictions : le “seul parti intègre”, mais qui détourne 4,5 millions ; le parti qui réclame le retour de l’autorité, mais attaque l’Etat de droit ; les contempteurs du “laxisme” de la justice, mais qui pleurnichent quand elle s’applique à eux.

Guide de protection des services publics

ECONOMIE

Guide de protection des services publics

Tempête en vue pour les services publics. Le ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, a « hâte de partager avec [Elon Musk] les meilleures pratiques pour combattre l’excès de bureaucratie, diminuer la paperasse et repenser les structures publiques pour optimiser l’efficacité des agents publics ».

En observant ce qu’il qualifie de gaspillage, il évoque la prétendue « problématique de l’absentéisme » dans le secteur public. Dans un cadre de discussion budgétaire où le gouvernement espère réaliser 60 milliards d’euros d’économies pour freiner l’accroissement du déficit public (6,1 % cette année et 7 % prévu pour l’année suivante), les services publics sont clairement dans la ligne de mire, représentant près de 40 % de la dépense publique (600 milliards d’euros sur 1 600 milliards).

Les écoles, les universités, les hôpitaux, les tribunaux ou la police sont déjà dans une situation délicate. Les conditions de travail difficiles des agents nuisent à la qualité du service fourni et accroissent la méfiance des usagers. Pourtant, les services publics ne doivent pas être vus uniquement comme une charge, mais comme un véritable investissement. Ils répondent collectivement à des besoins fondamentaux et tracent un avenir de cohésion et de justice sociales.

C’est un projet sociétal qu’il est urgent de réengager et de protéger.

Pour une législation globale contre les violences sexistes et sexuelles

ECONOMIE

Pour une législation globale contre les violences sexistes et sexuelles

Alors que le procès des viols à Mazan se déroule et que la date du 25 novembre, journée internationale contre les violences faites aux femmes, approche, la prise de conscience concernant l’ampleur des violences sexistes et sexuelles (VSS) est grandissante.

Effectivement, sept ans après le début du mouvement #Metoo, le discours se libère de plus en plus : en 2023, les forces de l’ordre ont enregistré 271 000 victimes de violences conjugales, la majorité étant des femmes, un chiffre qui double par rapport à 2016. D’après l’étude annuelle du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), 85 % des victimes sont des femmes, alors que 86 % des mis en cause sont principalement des hommes de nationalité française (83 %).

Pourquoi une coalition pour une loi-cadre intégrale ?

La newsletter d’Alternatives Économiques

Chaque dimanche à 17h, notre analyse de l’actualité de la semaine

Malgré une hausse massive des plaintes (+ 282 % entre 2018 et 2022), les VSS demeurent largement impunies. En 2021, 94 % des affaires de viol ont été classées sans suite, une statistique alarmante qui met en lumière l’échec des systèmes existants à faire face à ce problème social important. C’est pourquoi 60 associations, incluant La Fondation des femmes, le planning familial et le Collectif national des droits des femmes, ont initié le 18 octobre 2024 une coalition visant à mettre un terme à l’impunité et à protéger les victimes.

Cette Coalition pour une Loi Intégrale contre les violences sexuelles regroupe des organisations féministes, de défense des droits des enfants, ainsi que des syndicats (CGT, FSU et Solidaires) et aussi des expert·es, juristes et défenseur·es des droits humains. Le texte final, précis et exhaustif, comprenant pas moins de 140 propositions, a été dévoilé au cours d’une conférence de presse le 21 novembre 2024.

Il s’agit d’un ensemble de dispositions législatives et réglementaires « pour s’attaquer aux racines de ces violences systémiques et mettre fin à l’impunité », afin que les pouvoirs publics apportent enfin une réponse globale et cohérente à ce problème majeur.

De quelles violences parle-t-on ?

Toutes les formes de violences sexuelles sont concernées : viols, agressions sexuelles, harcèlement sexuel, système prostitutionnel, proxénétisme, trafic d’êtres humains, ainsi que violences gynécologiques et obstétricales, mutilations sexuelles féminines, mariages forcés et violences sexuelles en ligne, que les auteurs et les victimes soient majeur·es ou mineur·es, que ces actes se produisent au sein ou en dehors du couple, sur le lieu de travail ou à domicile.

Il est à noter que cette définition très englobante des violences ne mentionne pas explicitement les violences économiques, qui concernent pourtant une grande nombre de femmes subissant un contrôle de leurs finances, un manque de ressources ou des menaces économiques.

Quelles propositions concrètes ?

<pTout d'abord, le texte préconise une politique publique continue, coordonnée et dotée de ressources adéquates pour combattre toutes les VSS. Pour cela, il est impératif qu'un ministère délégué aux Droits des femmes, disparu depuis cette mandature, supervise une instance interministérielle pour coordonner tous les ministères concernés (Éducation nationale, Intérieur, Justice, Travail, Santé…). De plus, une demande récurrente depuis des années de financement substantiel doit être envisagée.

Actuellement, l’État n’investit que 12,7 millions d’euros par an dans cette lutte (0,003 % de son budget), alors que la Fondation des femmes estime qu’il faudrait, au minimum, 344 millions par an. Et jusqu’à 2,2 milliards d’euros annuels pour garantir un soutien à toutes les femmes victimes de violences, y compris en dehors du couple.

La question de l’éducation, de la formation et de la prévention des VSS est également essentielle. Pour faire reculer « la culture du viol », il est nécessaire de systématiser trois séances d’éducation à la vie affective et sexuelle ainsi que des séances consacrées à l’égalité entre les sexes, à la lutte contre les stéréotypes sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes. Il en va de même pour la formation de tou·tes les professionnel·les concernés (police, justice, Éducation nationale, médecine, travail social…).

Une section est aussi consacrée à la protection des enfants contre les violences. Ce texte plaide en faveur de l’introduction d’une infraction d’inceste et d’une imprescriptibilité des ces agressions. Il met également l’accent sur la nécessité de lutter contre l’industrie pornographique criminelle et pédo-criminelle ainsi que contre la culture du viol en ligne.

Cependant, le volet peut-être le plus significatif de cette loi intégrale concerne l’amélioration du parcours judiciaire des victimes. Cela inclut une prise en charge et des soins pour toutes les victimes (avec notamment un remboursement total par la Sécurité sociale des soins psychologiques et des traitements du psychotraumatisme, ainsi que la création de centres d’urgence accessibles 24h/24, sur le modèle belge).

Tout le parcours judiciaire doit être repensé, depuis le dépôt de plainte jusqu’à la protection et la prise en charge des victimes pendant la procédure : recrutement de centaines d’enquêteurs et enquêtrices, généralisation des brigades de police et de gendarmerie spécialisées sur les VSS, accès à l’aide juridictionnelle dès le dépôt de plainte… Il est également demandé que « pour chaque plainte déposée pour violence sexuelle, certains actes d’enquête soient obligatoirement réalisés dans un délai raisonnable ».

La protection des victimes pendant l’enquête doit être renforcée par divers outils (téléphone grave danger, ordonnances de protection accessibles à toutes les formes de violence, places d’hébergement d’urgence) et les investigations sur le passé sexuel des victimes doivent être interdites. De même, il est essentiel que les victimes soient systématiquement informées de l’évolution de leur plainte et que les décisions accompagnées d’explications claires et détaillées en cas de « classement sans suite », ce terme devant être abandonné dans les cas où des recours sont encore possibles.

Pour tout cela, les signataires réclament des « ressources pour une justice vraiment spécialisée », par la création de tribunaux spécialisés, à l’instar de ce qui se fait en Espagne. Enfin, la France doit impérativement établir une politique de suivi des agresseurs par des équipes pluridisciplinaires pendant et après leur sanction pénale afin de prévenir la récidive.

Au travail aussi !

De nombreuses violences sexuelles se produisent au travail, un lieu où les rapports de pouvoir sont exacerbés, en particulier en raison de la dépendance financière des salariées. Au cours de leur carrière, 30 % d’entre elles déclarent avoir subi du harcèlement ou des agressions sexuelles en milieu professionnel. Cependant, la prise en charge des victimes y reste très insuffisante, alors même que l’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité de ses salarié·es.

La coalition propose dans ce sens des sanctions contre les entreprises qui n’ont pas mis en place de plan de prévention ni de procédures de signalement – procédures qui devront être réglementées. La prise en charge par l’employeur des frais des victimes de violences sexuelles au travail est également requise. Il est crucial de protéger l’emploi des victimes en réaménageant leurs horaires, leur espace de travail ou en leur accordant des jours de congé, comme c’est le cas en Irlande. Une proposition aborde également les VSS souvent ignorées qui touchent les travailleuses à domicile (aides à domicile, garde d’enfants…).

Enfin, il est également question de sujets négligés dans la lutte contre les VSS, tels que les violences obstétricales et gynécologiques ainsi que les mutilations sexuelles et les mariages forcés.

Ce texte constitue une somme d’initiatives. Et comme le rappelle la coalition, c’est un ensemble cohérent qui doit le rester : « Seule cette approche globale, socle de nos luttes, peut permettre le changement systémique, urgent et vital, pour lequel nous nous battons ». Espérons qu’à travers les manifestations d’aujourd’hui, le 23 novembre 2024, à travers toute la France, la coalition féministe sera enfin entendue.

Le cinéma du Média #8. Justice pour Clint

MEDIA

Le cinéma du Média #8. Justice pour Clint

Il n’est pas encore confirmé si Juré n° 2 marquera la fin de la carrière de réalisateur de Clint Eastwood. Les nouvelles à ce sujet restent floues et pourraient changer. En revanche, il est avéré qu’Eastwood a célébré son 94e anniversaire au printemps, qu’il s’agit de son quarantième film en tant que réalisateur, que Warner l’a distribué de manière chaotique, que c’est un succès modeste mais indéniable, et que le type de récit dépeint dans Juré n° 2, basé sur un scénario complexe de Jonathan Abrams, est familier au maître américain. C’est moins une histoire qu’une série de questions. Que s’est-il réellement passé ? Peut-on vraiment le savoir ? Y a-t-il eu quelque chose de tangible ?Ces questions hantent l’acteur et réalisateur depuis environ trente ans. Et durant cette période, sa réponse a très peu varié, même si sa tonalité devient progressivement plus sombre : non, il est impossible de savoir ce qui s’est produit. Peut-être qu’un jour, nous l’aurons su. Mais pour l’instant, il semble que ce ne soit pas le cas, et nous risquons d’en savoir encore moins demain. La raison en est simple, bien que les résultats soient plus complexes : le film débute alors que tout a déjà eu lieu ; il est narré après les faits ; et ce retour en arrière est une arène où diverses versions s’affrontent sans parvenir à un consensus. La vérité existe, assurément, mais elle reste insaisissable ; et de toute façon, il est probable que cette vérité soit moins importante que les tentatives de la s’approprier. Le point de vue est tout, dans les sens cinématographique, narratif et moral du terme.Considérons Sur la route de Madison (1995) : la ménagère de l’Iowa (Meryl Streep), dans ses lettres et son journal, déclare que les quelques jours passés avec le photographe (Clint Eastwood) sont les plus heureux…

Le combattant de MMA Conor McGregor a agressé une femme dans un hôtel de Dublin, conclut le jury lors d'un procès civil.

ACTUALITÉS

Le combattant de MMA Conor McGregor a agressé une femme dans un hôtel de Dublin, conclut le jury lors d’un...

McGregor condamné à verser près de 250 000 € de dommages et intérêts à Nikita Hand après avoir été accusé d’agression en 2018Un jury lors d’un procès civil à la haute cour d’Irlande a conclu que le combattant irlandais d’arts martiaux Conor McGregor a agressé une femme qui l’avait accusé de l’avoir violée dans un hôtel à Dublin en décembre 2018.McGregor a été condamné à payer près de 250 000 € (210 000 £) de dommages et intérêts à Nikita Hand, également connue sous le nom de Nikita Ní Laimhín. Continue reading…

La Hongrie invite Netanyahu à visiter alors que les dirigeants mondiaux se divisent sur le mandat d'arrêt de la CPI

ACTUALITÉS

La Hongrie invite Netanyahu à visiter alors que les dirigeants mondiaux se divisent sur le mandat d’arrêt de la...

Viktor Orbán déclare qu’il n’appliquera pas la décision de la CPI exigeant que les membres de la cour arrêtent le Premier ministre israélien s’il entre dans leur paysCrise au Moyen-Orient – mises à jour en directPolitique britannique en direct – dernières mises à jourLe Premier ministre illibéral de Hongrie, Viktor Orbán, a déclaré qu’il inviterait son homologue israélien, Benjamin Netanyahu, à visiter en défiance d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale, alors que les dirigeants mondiaux se divisent sur la décision capitale de la CPI.La plus haute cour pénale du monde a émis jeudi des mandats contre Netanyahu, son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant et le commandant du Hamas Ibrahim al-Masri, communément appelé Mohammed Deif, qui est supposé être mort, pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité présumés. Continue reading…

Réinjecter des fonds dans les services publics, c’est faisable !

ECONOMIE

Réinjecter des fonds dans les services publics, c’est faisable !

« L’obsession » envers la dépense publique, voici l’adversaire. Ce reproche aura guidé les débats lors des discussions budgétaires d’automne. Les auteurs de ces accusations font semblant d’ignorer que les allègements de cotisations et les réductions d’impôts sont les principaux responsables de l’amplification du déficit depuis 2017 – 62 milliards d’euros par an, selon la Cour des comptes.

Pourtant, ces dépenses publiques, que l’on souhaite diminuer aujourd’hui, financent en grande partie les services publics. Mais à quel niveau ? La réponse n’est pas évidente. Contrairement à la protection sociale (710 milliards d’euros en 2023), dont le financement est clairement identifié, il est difficile de déterminer précisément la part destinée aux services publics dans le budget général des administrations publiques (1 578 milliards d’euros en 2023, incluant également les aides aux acteurs privés et le coût de la dette).

« Il n’existe pas de recettes spécifiques pour l’hôpital, l’école, la justice…, déclare l’économiste Elise Huillery. Les impôts et taxes collectés (impôt sur le revenu, TVA, taxes sur le tabac) vont dans un même pot, qui sert à financer les services publics mais aussi les soutiens aux entreprises. »

Dans une analyse réalisée par l’Institut La Boétie , les économistes Sylvain Billot et Vincent Drezet suggèrent d’estimer les dépenses pour les services publics en additionnant les consommations intermédiaires, les rémunérations des employés, les impôts sur la production et les investissements. Cela aboutit à une somme proche des dépenses de production des administrations publiques : 608 milliards d’euros en 2023.

Un projet sociétal

« Les dirigeants successifs, désireux de réduire les dépenses publiques et alléger la bureaucratie, sont incapables de préciser quels services publics ils envisagent d’abandonner », observe Johan Theuret, du think tank Sens du service public. En vérité, les écoles, hôpitaux, tribunaux ou forces de sécurité souffrent beaucoup. Réduire leur financement ne fera qu’exacerber les problèmes, avec des impacts négatifs notables.

D’abord parce que les services publics ne représentent pas uniquement des prestations offertes à la population. Ils incarnent un projet collectif visant à mutualiser les ressources pour produire des biens et services bénéfiques à tous. Ils jouent un rôle essentiel dans la cohésion sociale : chacun contribue via ses impôts et bénéficie selon ses besoins (éduquer ses enfants, recevoir des soins, résoudre des litiges…).

Les services publics sont également des instruments de redistribution, comme l’a mis en lumière l’Insee . Hormis la redistribution financière (prélèvements et prestations), l’Institut a étudié la « redistribution élargie », incluant la valeur monétaire des services publics. Ce calcul part « du principe qu’un impôt prélevé a, à terme, une contrepartie directe ou indirecte pour les ménages », explique l’Insee.

Quelles conclusions en ressortent ? En intégrant les services publics, la redistribution double. Avant transferts, les ménages les plus riches ont des revenus 18 fois supérieurs à ceux des plus pauvres. Après redistribution, cet écart tombe à 3. Les services en nature, notamment grâce à la taille des dépenses en santé et éducation, en représentent 53 % et les aides monétaires 40 %.

« Supprimer un service public ne fait pas disparaître le besoin qu’il remplit », rappelle l’économiste Elvire Guillaud. On le remplace généralement par un service privé marchand, qui ne possède pas cet effet redistributif, comme une assurance santé complémentaire prenant la place de l’assurance maladie.

Les services publics ont également une fonction économique. D’après l’Insee, en 2023, ils contribuaient à hauteur d’un cinquième (18 %, soit 466 milliards d’euros) à la valeur ajoutée nationale ou produit intérieur brut (PIB). Les fonctions régaliennes en représentent 37 %, l’éducation 24 % et la santé 16 % . La dépense publique n’est donc pas uniquement une redistribution ou des transferts entre foyers. De plus, pour prospérer, les entreprises ont intérêt à disposer de services publics performants : infrastructures routières, éducation qualifiée, système de santé robuste, etc.

Pourquoi augmenter les dépenses

Malgré une forte réduction depuis les années 1970, la France compte encore de nombreux jeunes quittant le système scolaire sans diplôme. Alors même que ce précieux sésame pour trouver un emploi et éviter le chômage n’a jamais été aussi crucial. En 2022, l’Insee recense 7,6 % de décrocheurs parmi les 18-24 ans.

Dans la santé, chaque année voit des patients décéder seuls dans les couloirs d’hôpitaux. Une nuit aux urgences sur un brancard accroît de 40 % le risque de mortalité hospitalière . En 2018, bien avant la pandémie de Covid, plus de 100 000 patients avaient passé une nuit dans ces conditions. La situation s’est depuis aggravée, et le fonctionnement en « mode dégradé » se diffuse peu à peu.

Dans le domaine de la justice, ce n’est guère mieux : en 2023, les affaires civiles mettent en moyenne plus de huit mois pour être jugées en première instance, selon le ministère de la Justice. En appel, cela grimpe à près de quatorze mois. Cela va à l’encontre du droit à un « délai raisonnable », garanti par la Convention européenne des droits de l’homme.

Côté protection sociale et accès aux droits, le tableau est tout aussi préoccupant : le non-recours au minimum vieillesse atteint 50 %, 34 % pour le RSA et 30 % pour l’assurance chômage, selon la Drees et la Dares. Ces taux reflètent la complexité de l’accès aux droits en France aujourd’hui.

Afin de remédier à ces constats, il est impératif de débloquer des ressources pour des services publics dignes, universels et ambitieux. Mais comment procéder et jusqu’où aller ?

Un chiffrage a été mené uniquement par la commission économique du Parti communiste français (PCF) lors des élections de 2022 : 124 milliards sur cinq ans, soit environ 25 milliards par an, pour revaloriser les salaires des fonctionnaires et recruter et former de nouveaux agents.

Un choix politique

Les économistes interrogés évitent de suggérer un montant global. Fixer le « bon » niveau des dépenses n’est pas une démarche technique, mais un choix politique qui devrait être débattu démocratiquement.

Des priorités pressantes existent, telle l’urgence climatique. En avril, un rapport de Jean-Pisani-Ferry et Selma Mahfouz estimait à 30 milliards d’euros annuels les sommes nécessaires pour rénover bâtiments, infrastructures et logements. Toutefois, il s’agit ici de dépenses publiques au sens strict, non spécifiquement de services publics.

« Les services publics doivent répondre aux besoins d’une population », commente Elvire Guillaud. Avec le vieillissement démographique et les maladies chroniques à gérer, des dépenses de 10 milliards par an ont été estimées pour la dépendance.

Pour l’éducation, Elise Huillery voit des besoins de financement chiffrés à 15 milliards : rendre le métier d’enseignant attractif, une École réellement gratuite avec prise en charge par les collectivités des fournitures scolaires, transports, restaurants, internats, et activités péri-éducatives, en plus d’axer sur le bien-être et de nouvelles approches pédagogiques stimulant la motivation des élèves.

Les moyens existent

Où trouver l’argent ? Le PCF, comme le Parti de la gauche européenne, propose un fonds européen pour financer les services publics, alimenté par la création monétaire de la Banque centrale européenne. Cette solution semble toutefois difficile à court terme.

« Des marges de manœuvre existent pour accroître les recettes et réparer les services publics, même en réduisant le déficit », fait remarquer Elvire Guillaud.

Anne-Laure Delatte préfère « améliorer l’existant plutôt que créer de nouveaux impôts ». Un contre-budget du Nouveau Front populaire (NFP) prévoit 49 milliards de recettes fiscales annuelles supplémentaires, en associant ISF vert, taxation des multinationales et réformes des niches fiscales. Une partie de ces recettes comblerait le déficit (18 milliards), tandis que l’autre (31 milliards) serait investie dans les services publics.

Les assurances sociales ont aussi un appui fort de la population, démontre Elvire Guillaud . Ce financement, s’il est bien programmé et prévisible, peut être mis en place efficacement, avec un large soutien.

Au-delà des limites actuelles, les leviers pour investir dans des services publics rénovés sont bel et bien disponibles, à condition de s’engager dans cette voie.

Découvrez ici notre dossier « Manuel de défense des services publics »

Charger plus Tous les Articles sont chargés