Trump souhaite éliminer les réglementations sur l'IA, mais la Californie s'oppose.

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Trump souhaite éliminer les réglementations sur l’IA, mais la Californie s’oppose.

Alors que l’UE dispose actuellement d’une législation régissant l’utilisation de l’IA, l’AI Act, les États-Unis semblent vouloir exploiter tout le potentiel de cette technologie en éliminant toutes les régulations. C’est ce qu’en tout cas espère le président récemment réélu, Donald Trump. Il affirme que les protections contre l’IA sont inutiles et souhaite absolument annuler le décret qui imposait de telles protections.

Une confrontation va alors se dessiner entre Gavin Newsom, gouverneur de Californie, et Donald Trump, nouvellement élu président américain.

Newson, en compagnie des législateurs de Californie, essaye de protéger le pays contre cette décision de Trump.

Mais parviendront-ils à contrecarrer le nouveau président ? Quoi qu’il en soit, une session législative exceptionnelle débutera le 2 décembre prochain.

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Conflit entre Trump et la Californie concernant les régulations de l’IA

Donald Trump a fait savoir son projet de révoquer le décret présidentiel de Joe Biden qui mettait en place des recommandations volontaires pour réguler l’intelligence artificielle , destinées aux entreprises technologiques et aux agences gouvernementales.

Les militants craignent également que la future administration n’utilise ces technologies pour faciliter des expulsions massives, conformément aux engagements pris durant la campagne.

Pendant ce temps, la Californie a déjà initié des démarches réglementaires sur l’IA plus tôt cette année.

Cependant, les législateurs locaux indiquent que d’autres priorités pourraient dominer les discussions lors de la session extraordinaire de Newsom.

Néanmoins, les observateurs considèrent que des signes d’un nouveau conflit politique potentiel se dessinent.

L’intelligence artificielle pourrait rapidement passer d’un sujet technique abstrait à un champ de bataille entre l’administration Trump et les dirigeants démocrates californiens.

Cette situation représenterait une opportunité supplémentaire pour les démocrates de remettre en question les politiques de Trump. Mais également celle de ses nouveaux alliés technologiques qui, eux aussi, soutiennent un désengagement réglementaire concernant l’IA.

Un risque inacceptable pour la sécurité et les droits civiques

Quoi qu’il en soit, les experts en sécurité de l’intelligence artificielle ne se concentrent pas sur des scénarios apocalyptiques non fondés.

Ils se préoccupent plutôt de l’utilisation des outils d’IA dans des domaines délicats. Ces domaines incluent la santé, le logement, l’emploi, les applications juridiques, l’immigration et le secteur militaire.

Ces spécialistes soulignent également que les risques réels associés à ces technologies s’articulent autour de la discrimination, ainsi que de la surveillance intrusive et de la violation des droits civiques.

De son côté, Samantha Gordon, directrice des programmes chez TechEquity, met en lumière une question essentielle.

Ces systèmes, bien que conçus pour modéliser des situations, sont de plus en plus employés comme des substituts de prise de décision par le secteur public et privé.

« Recourir à l’IA dans la prise de décision est une pratique que je qualifie de risquée », a-t-elle déclaré. 

Elle met également en exergue les dangers potentiels de confier des choix cruciaux à des algorithmes dépourvus de jugement éthique.

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« Il n’existe pas vraiment de régulations concernant l’IA à déréglementer »

Il convient de noter que la domination californienne dans le secteur de l’intelligence artificielle est en grande partie due à un environnement concurrentiel quasiment inexistant.

Au niveau national, le cadre législatif demeure largement stable, avec un Congrès qui, jusqu’à présent, n’a pas élaboré de réglementation significative sur le sujet.

La députée démocrate Rebecca Bauer-Kahan souligne d’ailleurs cette absence de réglementation

Selon elle, face aux intentions de déréglementation de Trump et de la majorité républicaine, il existe très peu d’éléments à déconstruire.

En l’absence d’un cadre légal fédéral, le président Biden a pris l’initiative en octobre 2023 de publier un décret énonçant des principes directeurs pour l’usage de l’IA.

Ce texte repose principalement sur cinq axes politiques. Ainsi, de veiller à la protection du public américain lors de la création, de l’utilisation et de la mise en œuvre de systèmes automatisés.

Le décret demande alors aux agences fédérales de développer des stratégies qui favorisent à la fois l’innovation technologique et la protection contre les risques.

Dans cette dynamique, l’administration a créé l’US AI Safety Institute, placé sous l’égide du ministère du Commerce.

Son objectif est de renforcer les mécanismes de supervision et de sécurité concernant l’intelligence artificielle.

Dès le premier jour de son mandat …

Donald Trump a d’ores et déjà révélé son projet de révoquer le décret de Biden. Même dès son premier jour en fonction.

La plateforme républicaine pour 2024 qualifie ce décret d’entrave à l’innovation technologique. Mais lui reproche également d’imposer des croyances idéologiques radicales au développement de l’IA.

Avec une nouvelle administration, des agences comme le département de la Sécurité intérieure pourraient, en effet, bénéficier d’une large latitude d’action.

Les défenseurs des droits rappellent pourtant que les garde-fous existants étaient déjà assez fragiles.

Et selon le rapport de l’organisation Mijente, le département n’a même pas donné suite aux recommandations limitées de l’administration Biden.

A la suite de la victoire électorale de Trump, certains acteurs du secteur technologique ont manifeste un optimisme compréhensible.

Comme le montre Marc Andreessen, investisseur influent, qui a ouvertement déclaré sur X la fin des limitations.

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Julie Gervais : « Le manque de financement des services publics contribue également à dévaloriser les fonctionnaires »

ECONOMIE

Julie Gervais : « Le manque de financement des services publics contribue également à dévaloriser les...

Lors de sa prise de fonction en tant que Premier ministre, Michel Barnier a fait preuve d’audace. Il semblait avoir saisi l’importance des services publics : « La lutte contre les déserts médicaux et la pénurie de personnels soignants sera l’une des priorités du gouvernement », « l’éducation continuera d’être au premier plan », déclarait-il le 1er octobre dernier lors de son allocution de politique générale.

Cependant, son ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, a chaleureusement exprimé son soutien à la nomination d’Elon Musk à la tête d’un nouveau ministère de l’Efficience gouvernementale : il a hâte de collaborer avec le milliardaire « pour partager les meilleures pratiques en matière de réduction de la bureaucratie ».

Le projet de loi de finances et le budget de la Sécurité sociale, actuellement en discussion au Parlement, incluent significativement des réductions budgétaires qui impacteront les services publics : le gouvernement vise à réaliser 60 milliards d’euros d’économies. Les services publics représentent presque 40 % du budget des administrations publiques (600 milliards d’euros sur un total de 1 600 milliards). De plus, la représentation du fonctionnaire, souvent perçue de manière stéréotypée et abstraite, est bien éloignée de la diversité des métiers au sein de la fonction publique, ce qui la rend souvent répulsive.

C’est ce dilemme que met en lumière la politiste Julie Gervais, co-auteure avec Claire Lemercier et Willy Pelletier de La Haine des fonctionnaires (Amsterdam, 2024), suite à un ouvrage collaboratif antérieur, La Valeur du service public (La Découverte, 2021).

Tous les politiciens prétendent défendre les services publics. Est-ce une bonne nouvelle ?

Les discours sur la dégradation des services publics sont omniprésents à l’heure actuelle, car nous atteignons un tournant : les réformes menées au cours des trente dernières années pour démanteler les services publics ont eu des effets cumulés qui s’intensifient. Nous sommes au seuil de la phase terminale de l’érosion des services publics, juste avant qu’il ne soit trop tard. Pour Claire Lemercier, Willy Pelletier et moi-même, notre livre, La haine des fonctionnaires, s’est donc imposé comme une réponse urgente.

Cependant, au-delà des discours, il est nécessaire d’évaluer les politiques mises en œuvre. Malheureusement, la réduction sans précédent des dépenses publiques s’annonce catastrophique. Soyez vigilants face au « service public washing » qui, de manière similaire au « greenwashing », clame défendre ce qu’il est en train de détruire.

Vous évoquez une détérioration des services publics au cours des dernières décennies. S’agit-il d’une frénésie gestionnaire ou d’une orientation idéologique ?

Les deux sont étroitement liés. Le cadre néolibéral actuel impose des limites budgétaires, la quête de rentabilité, la financiarisation… Tout cela est déjà présent dès la formation initiale des hauts fonctionnaires, dans les grandes écoles, telles que Polytechnique ou l’Ecole des ponts et chaussées. Dès les années 1960-1970, l’idée que les dirigeants du secteur public doivent passer de l’administration à la gestion, comme dans le secteur privé, s’est répandue. Ce nouveau paradigme de management public est également enseigné dans la fonction publique territoriale.

Il existe donc un cadre idéologique fort qui ne se couve jamais d’un discours explicitement anti-services publics : les restrictions budgétaires ne sont jamais présentées comme des mesures visant à détruire les services publics. Ceux-ci sont fermés, fusionnés, réduits, simplifiés, mais toujours sous prétexte d’une prétendue modernité et d’une efficacité supposée, pour « débureaucratiser ».

N’y a-t-il pas des améliorations à envisager en matière d’efficacité ?

L’efficacité est souvent un terme trompeur lorsqu’on parle de services publics. Que signifie réellement ce terme ? Quel critère est retenu ? Le soupçon d’incompétence qui plane sur les agents publics contraste avec une vision idéalisée du secteur privé. L’efficacité désigne souvent, en réalité, l’intensification du travail. Pourquoi ne pas mettre davantage en avant un travail bien fait, serein, utile et de qualité, réalisé à 100 %, et non à 200 % ?

La quête de l’efficacité s’accompagne fréquemment d’une logique d’individualisation, d’une compétition qui sape les collectifs et démoralise les équipes. Elle s’inspire habituellement de mots d’ordre du secteur privé inadaptés au secteur public, contribuant ainsi à son incapacité. De plus, cette quête implique généralement le recours à des cabinets de conseil dont les services coûtent souvent plus cher que l’utilisation des ressources internes.

C’est au nom de l’efficacité qu’il est exigé d’être en permanence en mouvement, qu’il ne faut pas s’enliser. D’ailleurs, c’est une condition pour « faire carrière » : à l’IGN, l’Institut national de l’information géographique et forestière, les cadres en souffrance côtoient des directeurs qui ne possèdent aucune connaissance de leurs métiers et imposent des solutions toutes faites. Ces directeurs, qui jouent le jeu managérial pour accéder à des promotions, désorganisent les services en les réajustant.

Comment interpréter le sentiment d’incompétence souvent attribué aux fonctionnaires, surtout lorsqu’ils exercent des fonctions de bureau ?

La « haine des fonctionnaires » est aussi ancienne que la notion même de fonctionnaire. Elle trouve ses racines à la Révolution française, comme l’explique l’historien Emilien Ruiz. Elle repose sur une image stéréotypée, celle du rond-de-cuir, popularisée par l’écrivain Courteline à la fin du XIXe siècle. Toutefois, elle a évolué historiquement : au XIXe siècle, elle était associée à un individu considéré comme un lèche-botte soumis à l’autorité, n’ayant pas encore de véritable statut.

Actuellement, lorsqu’ils sont interrogés sur les suppressions de postes, les responsables politiques désignent souvent soit la fonction publique territoriale, qu’ils ne comprennent pas vraiment, soit « le travail de bureau », qu’ils identifient mal. Pourtant, il existe une immense diversité parmi les métiers de fonctionnaires et d’agents participant au service public. Les jardiniers municipaux, souvent fonctionnaires en catégorie C, partagent davantage de similarités avec des ouvriers qu’avec des hauts fonctionnaires.

De surcroît, la plupart des usagers ont une vision vague du métier de fonctionnaire. Les cheminots ou les facteurs, souvent cités à titre d’exemple, ne le sont pas toujours. Le service public peut également être accompli par des agents ou des structures (associations, entreprises publiques ou privées) qui ne relèvent pas de la fonction publique mais de contrats de droit privé ou public.

De nombreuses missions permanentes du service public sont actuellement réalisées par des agents sous contrat précaire, tels que les vacataires dans le milieu universitaire, sans lesquels certains départements ne pourraient pas fonctionner. Est-ce un modèle d’avenir ? Ce délitement du service public de l’enseignement supérieur alimente la montée en puissance de l’enseignement supérieur privé, nuisant ainsi à l’accessibilité pour tous à la formation et aux diplômes.

N’y a-t-il pas un paradoxe à abhorre les fonctionnaires tout en défendant les services publics ?

En effet. La haine des fonctionnaires englobe différentes formes de ressentiment. Une haine émanant de hauts responsables et d’intellectuels d’entreprise. Une autre se manifeste chez les usagers, provenant souvent des milieux populaires, qui sont ceux qui interagissent le plus avec les services et souffrent le plus de leur dégradation.

Ce ressentiment peut influencer un vote en faveur du RN, chez des individus qui perçoivent le statut des fonctionnaires comme un privilège, alors que ces derniers sont en réalité victimes de conditions de travail difficiles. Dans le livre, nous citons l’exemple d’un motard victime d’un accident qui se plaint des fonctionnaires n’ayant pas tassé les gravillons, alors que les agents des routes se lèvent avant l’aube pour déneiger en hiver et que les restrictions budgétaires les obligent à utiliser un enrobé moins performant.

Ce paradoxe entre le discours de soutien au service public et la haine des fonctionnaires se manifeste-t-il également ailleurs en Europe ?

Bien que le service public soit particulièrement ancré en France, les mêmes clichés se retrouvent ailleurs, avec l’image du paresseux derrière le guichet. Au Royaume-Uni, un rapport sur le système de santé a constaté le nombre de décès causés par des retards aux urgences, et le Premier Ministre, Keir Starmer, a affirmé que le National Health Service avait « rompu le contrat qu’elle avait avec le public », sans mentionner le sous-financement dont il souffre depuis des décennies. La mise en faillite des services publics est alors utilisée pour dénigrer les fonctionnaires : une telle présentation du débat est indigne.

L'Humanité, Jaurès et le secteur économique

ECONOMIE

L’Humanité, Jaurès et le secteur économique

Les Lumières ? XXIe siècle ? Perspectives sociétales ? Au final, Jaurès et ses camarades ont opté pour L’Humanité. Alors que la France émerge des turbulences de l’affaire Dreyfus, ce choix rappelle que les socialistes ambitionnent d’être les plus fervents défenseurs des droits humains. Face à l’impact dévastateur des civilisations engendré par la colonisation européenne, en particulier française, cela souligne également les droits des populations indigènes.

À une époque où le nationalisme monte en flèche et où des conflits menacent en Europe, cela appelle à une mobilisation inéluctable pour la paix. Dans un contexte d’échanges intensifiés et de concurrence globale, cela constitue un rejet du repli nationaliste. Alors que la prospérité est de retour, mais ne profite guère aux classes populaires, cela traduit un désir d’offrir un avenir meilleur pour le peuple français. En ce début de siècle nouveau, il s’agit de porter un projet socialiste pour l’humanité tout entière.

Dans L’Humanité, Jean Jaurès, rédacteur en chef, définit la ligne éditoriale. À travers une abondance d’articles (environ 2 600, quatre à cinq chaque semaine pendant une décennie), la politique nationale et internationale est en première ligne. Suit ensuite le champ social. Les questions économiques sont peu explorées dans ses écrits, comme dans l’ensemble du quotidien.

Cela s’explique par plusieurs raisons. D’abord, pour la plupart des socialistes au tournant du XXe siècle, l’analyse du capitalisme a été réalisée par Marx de manière approfondie, et Jaurès s’en nourrit, tout en restant critique. La deuxième raison concerne la dynamique parmi les socialistes français et dans l’Internationale ouvrière.

Lors du congrès de l’Internationale en 1904, les socialistes français sont exhortés à s’unir, ce qui se concrétise en 1905 avec la création de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) sur des bases qui, bien que différentes de celles de Jaurès, reposent sur celles de Vaillant et de Guesde : les syndicats et les coopératives sont exclus du parti et la participation des socialistes à un « gouvernement bourgeois » (à l’exemple de Millerand dans le gouvernement Waldeck-Rousseau) est rejetée.

Par conséquent, les socialistes négligent de saisir le pouls du capitalisme pour mieux le réformer de l’intérieur ; la réalisation d’objectifs économiques et sociaux cède la place à l’objectif prioritaire : le combat politique. Journal socialiste dreyfusard, humaniste, républicain et réformiste à ses débuts, L’Humanité de Jaurès, qui aspire à devenir la voix de tous les socialistes au fil des ans, souligne d’abord ce combat politique. Et lorsque l’économie est abordée dans les articles, c’est principalement sous l’angle des questions politiques.

Améliorer le sort des plus vulnérables

Néanmoins, Jaurès est persuadé que la seule voie révolutionnaire réaliste est la voie réformiste (qu’il résume dans l’expression « évolution révolutionnaire »). Il plaide pour des réformes économiques et perçoit dans l’action syndicale, le mouvement coopératif ou encore les relations économiques internationales organisées, des facteurs de progrès. Cette réflexion s’inscrit néanmoins d’abord dans un cadre national et dans la conception du socialisme « dans son premier état », déjà développée par Jaurès en mars 1895 dans la Revue socialiste :

« Le socialisme, dans son principe et sa définition la plus générale, c’est l’intervention de la société dans les rapports économiques que crée entre les hommes l’existence de la propriété (…). C’est là l’état d’esprit de ceux qui veulent par des actes variés de la puissance publique, enseignement gratuit, assistance sociale, menues faveurs aux syndicats ouvriers ou même réglementation légale du travail et des salaires, adoucir la condition des faibles. C’est dans cette zone encore vague et préliminaire du socialisme que se distribuent tous ceux que répugne le “laisser-faire, laissez-passer”.»

Ainsi, une multitude d’articles dans L’Humanité abordent les luttes sociales, la nécessaire intervention de l’État en matière de droit du travail, la protection sociale, et l’État redistributif. Dès son origine, L’Humanité dispose d’une rubrique Mouvement social et enrichit au fil des ans ses comptes rendus des luttes sociales tout en développant sa Tribune syndicale. Jaurès participe activement en soutenant le combat des 200 000 grévistes pour le repos hebdomadaire et la réduction de la durée de travail (15 mai 1906).

Il publie son premier article sur l’impôt sur le revenu dans L’Humanité le 22 novembre 1904, faisant des comparaisons avec l’Income Tax anglaise, un impôt progressif instauré depuis 1842 (24 avril 1907) – il abordera régulièrement cette question jusqu’en 1914, année de l’adoption de la loi instituant cet impôt. Jaurès dresse dans L’Humanité du 27 décembre 1912 le portrait d’un capitalisme à visage humain où le progrès social et le progrès économique vont de pair (voir encadré).

Évidemment, en tant que bon socialiste, Jaurès ne s’arrête pas là. Son objectif est « le collectivisme, but suprême du socialisme ». Dans un article intitulé Unité et diversité, dès le 22 juillet 1904, il esquisse une conception marquée par la diversité et la décentralisation du collectivisme : il ne sera pas réalisé « ni en une fois ni pour toujours »  et il précise :

« Il faudra trouver des formes subtiles de liens entre Etat, communes, coopératives, organisations professionnelles, des individus entre eux et avec chacun de ces groupes .»

Cet article reflète l’intérêt croissant de Jaurès pour le mouvement coopératif. Bien qu’il reste subordonné dans son esprit à l’action politique, ce mouvement occupe une place de plus en plus centrale dans son projet, sous l’influence d’un jeune intellectuel socialiste, neveu et disciple du sociologue Emile Durckheim et fondateur en septembre 1899 de la Boulangerie socialiste à Paris : Marcel Mauss.

Jaurès lui confie d’ailleurs la rubrique Coopératives de L’Humanité naissante. Marcel Mauss rédige un grand article, La coopération socialiste, publié dans le numéro du 3 août 1904. Cela n’empêche pas Jaurès de débattre amicalement avec L’Unité coopérative de Charles Gide, non socialiste, à qui il reproche son « primat du consommateur sur le producteur » et surtout son absence de perspective politique. Pour Jaurès, la « lente végétation indéfinie du système coopératif » ne pourrait « se substituer à la conquête du pouvoir par le peuple » (La Petite République, 19 juillet 1900).

Position ambivalente sur la colonisation

Jaurès est d’autant moins enclin à se contenter de cette « lente végétation » que le contexte international exige des prises de position vigoureuses, d’abord sur le plan politique, mais également économique : colonisation, concurrence internationale, mouvements de capitaux sont des sujets récurrents dans les colonnes du journal.

La colonisation, notamment celle du Maroc, occupe une place significative dans L’Humanité. La position du journal, comme celle de tous les socialistes, est clairement ambivalente. L’Humanité condamne la colonisation, en particulier ses méthodes et son mépris des peuples : Jaurès se bat donc « pour que les indigènes d’Afrique du Nord aient des représentants pour les défendre contre les colons et l’armée » (L’Humanité du 4 février 1912).

Le journal dénonce également le pillage des colonies par les « oligarchies » capitalistes internationales : sont ainsi mis en lumière, au Maroc, les « accapareurs des mines », comprenant des groupes français (Schneider, la Compagnie des forges de Chatillon-Commentry et Neuves-Maisons), allemand (Krupp), anglais (Williams), mais aussi espagnol, italien et belge (L’Humanité, 28 mars 1911).

Le journal oppose à ces « ennemis des colonies » la proposition d’une coopération avec la métropole :

« A chacune de nos possessions, nous devons donner un régime douanier spécial, librement délibéré entre elle et la métropole, marqué fortement de l’esprit de réciprocité, mais adéquat aux besoins et à la situation géographique de la colonie » (L’Humanité, 28 mars 1911).

Cela ne bloque néanmoins pas le journal, au détour d’un article sur la rareté du coton brut en Europe, d’oublier « l’esprit de réciprocité » et de craindre que le continent ne soit pas « capable de tirer des colonies le coton nécessaire pour compenser la quantité manquante aux besoins européens » (article de V. Renard, le 12 février 1913)…

Contre un protectionnisme rétrograde

On retrouve ici un autre thème récurrent, celui de l’internationalisation des économies dans un contexte de tensions entre nations européennes, tensions qui demeurent au cœur des préoccupations du journal. Sur ce sujet, L’Humanité peut parfois céder à une langue de bois. V. Renard, dans l’article mentionné, aborde le déclin britannique :

« Concurrencés au point de vue métallurgique par l’Allemagne et les Etats-Unis, au point de vue textile par l’Amérique et les Indes anglaises où la main-d’œuvre indigène est à un prix dérisoire, menacés de perdre la prépondérance économique qu’ils avaient jusqu’ici sur le marché universel, les Anglais vont entrer, ou sont entrés, serait mieux dire, dans une ère de difficultés.»

Face à ces défis qui touchent de nombreux pays européens, dont la France, quelle solution ? « S’acheminer vers la solution socialiste qui est pour le prolétariat mondial la seule issue pour sortir de la géhenne capitaliste », conclut l’auteur.

Jaurès, quant à lui, approfondit l’analyse ainsi que la recherche de solutions. Celles-ci passent d’abord par la quête de régulations internationales : il soutient ainsi la position de l’ancien président américain Théodore Roosevelt qui a évoqué l’idée, dans le domaine économique, d’un arbitrage international (L’Humanité du 14 novembre 1910). Sur le plan national, il aborde la question du protectionnisme et du libre-échange, dans un cadre où presque tous les pays adoptent des mesures protectionnistes, et où même la libérale Angleterre envisage de renoncer au libre-échange.

Jaurès s’inscrit alors dans le débat français opposant le libre-échangiste Caillaux à Méline, qui a promulgué des mesures protectionnistes depuis 1892. En 1904, les discussions portent sur la surproduction dans l’industrie cotonnière. Jaurès, qui prévoit que le nationalisme sous-jacent au protectionnisme et le laissez-faire libéral sont problématiques, blâme les deux tendances de mener au chômage ouvrier soit par surplus de production, soit par une limitation délibérée de celle-ci.

Il n’envisage comme solution que la régulation collective de la production (L’Humanité du 12 août 1904). Une régulation qui peut alors revêtir un aspect protectionniste. Ainsi, en 1912, les députés socialistes proposent, concernant les céréales, que « l’Etat ait le monopole d’importation des blés étrangers pour exercer sur le cours du blé une action régulatrice et modératrice » (L’Humanité du 14 juin 1912). Cependant, le journal, opposé à un protectionnisme rétrograde, précise : « Il ne s’agirait point de stabiliser et immobiliser les prix dans la routine, mais de stimuler le progrès technique. »

Mouvements de capitaux et sentiment anti-allemand

Enfin, la question la plus discutée concernant les flux internationaux, car elle est très liée aux problèmes politiques, concerne les mouvements de capitaux, extrêmement libres à l’époque. La condamnation des prêts français à la Russie tsariste, alliée de la France, fait l’unanimité parmi les rédacteurs et Jaurès n’est pas en reste. Sous le titre Mauvais emprunt, mauvais voyage, il écrit dans le numéro du 22 novembre 1907 :

« Ce n’est pas à un régime constitutionnel, c’est au despotisme restauré, c’est au coup d’Etat tsariste qu’irait la subvention de la France ».

Plus généralement, la question des mouvements de capitaux français est débattue dans les colonnes du journal. Une quinzaine d’articles publiés en 1911-1912 par Lysis (pseudonyme du journaliste Eugène Letailleur) s’attaquent aux capitalistes français agissant contre les intérêts de la France. L’auteur critique « nos grandes banques françaises, tutrices de notre épargne et gérantes de notre fortune nationale, fonctionnant régulièrement au service de l’Allemagne contre notre pays » ayant ainsi aidé Guillaume II à dominer l’économie de la Turquie et à l’en faire une alliée. D’autres articles du journal déplorent la domination des capitaux allemands dans la sidérurgie normande.

Sur toutes ces questions, Jaurès adopte une position nuancée qui se démarque du climat nationaliste, mais doit en tenir compte. Tout d’abord, dans une Réponse à Lysis, où il l’invite à écrire dans L’Humanité (31 mai 1910), il souligne le rôle bénéfique de la concentration bancaire :

« C’est, selon les Saint-Simoniens, le premier organe de la grande production socialement coordonnée.

Et, influencé par l’Affaire Dreyfus, il avertit contre toute « contrefaçon socialiste de la démagogie antisémite ». En essence, dans un article du 3 janvier 1913 intitulé Finances nationales, il prend position :

« Oui, il est vrai qu’il est impossible d’enfermer dans les limites de la France les richesses de la France (…). Rien ne serait dangereux comme une politique de défiance ou de prohibition contre “l’étranger”. »

Il n’en demeure pas moins, poursuit-il :

« Pour les concessions minières pour les établissements industriels de Normandie, une question se pose : alors qu’en France abondent les capitaux et les compétences techniques, comment se fait-il qu’une aussi grande part de l’activité économique de toute une province soit livrée à des Allemands (…). On peut se poser le problème en ces termes, qui sont les vrais, sans être coupable d’un chauvinisme grossier et d’un protectionnisme étroit. »

Déplorant le manque d’investissements de la bourgeoisie française dans l’industrialisé, mais craignant de contribuer à la germanophobie générique, Jaurès préfère conclure son article en posant une autre question essentielle :

« Mais tout d’abord, pour discuter utilement de ces questions, il faudrait savoir, je veux dire qu’il faudrait posséder des documents précis et des statistiques certaines sur la marche de la production en France, sur les conditions dans lesquelles les entreprises nouvelles sont créées, sur les directions que prend l’épargne nationale. (…) Quand donc aurons-nous un census de la production française, une statistique sérieuse des mouvements des capitaux et des entreprises ? »

La tentation antimondialiste

Établir des arguments et des actions non pas sur de vagues informations et des slogans, mais sur une compréhension approfondie de la réalité économique, voilà une position… qui fait d’Alternatives Economiques un héritier légitime de la pensée jauressienne ! Et notre journal ne peut que se retrouver dans la détermination de Jaurès à défendre les intérêts des travailleurs tout en se gardant de tout nationalisme.

Cependant, la position de L’Humanité dans son ensemble est ambiguë et cède parfois à l’antimondialisation, utilisant un terme contemporain. Bien sûr, Suzanne Berger, dans son récent ouvrage Notre première mondialisation, souligne que « loin de la vision antimondialiste de la plupart de la gauche actuelle, la gauche d’alors soutenait généralement l’ouverture des frontières aux capitaux, aux marchandises et au travail parce qu’elle voyait dans ces mouvements un puissant ressort de solidarité internationale ».

Cela paraît légèrement optimiste. Il s’agit sans doute de la pensée sous-jacente qui éclaire les articles de Jaurès, lequel affirmait à la Chambre des députés, le 13 janvier 1911 :

« Le réseau des intérêts économiques et financiers oblige tous les peuples à se ménager les uns les autres, à éviter les grandes catastrophes de la guerre ». Cependant, la gauche d’alors n’était pas insensible aux appels nationalistes, comme le prouvera la suite. Et sous prétexte de dénoncer les agissements des oligarchies financières en lien avec leurs homologues allemandes, la germanophobie n’est pas loin, surtout dans les articles de Lysis publiés dans L’Humanité.

Cependant, il est vrai que la mondialisation économique ne se présente pas au début du XXe siècle comme l’adversaire désigné de la gauche. Les socialistes de l’époque ne se trouvent effectivement pas sur la défensive. Ils sont investis dans une perspective alternative internationale et sociale, percevant non pas une menace dans l’interconnexion des économies nationales, mais dans les tensions entre nations européennes disposées à exploiter leur puissance économique dans une guerre destructrice.

Et L’Humanité de Jaurès marquera l’histoire avant tout comme un organe politique de lutte pour le socialisme et contre la guerre.

Cet article a été publié pour la première fois le 1er avril 2004.

Matt Gaetz facture 500 $ pour réaliser des vidéos personnalisées pour ses fans sur le site Cameo

ACTUALITÉS

Matt Gaetz facture 500 $ pour réaliser des vidéos personnalisées pour ses fans sur le site Cameo

« J’ai servi au Congrès », indique la page de Gaetz. « Trump m’a nommé procureur général des États-Unis (ça n’a pas fonctionné). »Le républicain de Floride Matt Gaetz a fait son premier grand geste depuis son retrait de la considération pour être procureur général de Donald Trump – en créant un compte sur Cameo, le site web qui permet aux gens ordinaires de payer pour des messages vidéo de célébrités, douteuses ou non.Le site d’actualité Semafor a d’abord rapporté la nouvelle vendredi. La révélation est survenue un jour après que Gaetz s’est retiré du processus de confirmation, attaqué en raison d’une enquête du comité d’éthique de la Chambre sur des allégations d’inconduite, notamment le fait d’avoir prétendument payé une mineure pour des rapports sexuels – toutes accusations que Gaetz nie fermement. Continue reading…

Le régulateur britannique affirme que les règles d'Apple limitent la concurrence des navigateurs iOS

TECHNOLOGIES

Le régulateur britannique affirme que les règles d’Apple limitent la concurrence des navigateurs iOS

L’Autorité de la concurrence et des marchés (CMA) du Royaume-Uni a « provisoirement conclu » que les politiques restrictives d’Apple en matière de navigateurs mobiles limitent l’innovation. Après qu’un groupe d’enquête indépendant a partagé ses conclusions sur la concurrence entre navigateurs sur iOS et Android, le conseil d’administration de l’organisme prévoit de mener une évaluation approfondie de la manière dont Apple et Google restreignent les navigateurs tiers sur leurs plateformes. Cependant, Apple — avec son écosystème plus fermé — semble avoir été la principale cible des préoccupations de la CMA.
L’enquête de la CMA repose sur l’idée qu’Apple et Google ont un duopole efficace sur les plateformes mobiles, leur permettant de fixer les règles de fonctionnement des navigateurs mobiles. Le conseil affirme que les développeurs de navigateurs tiers se sont plaints d’être limités par des règles telles que l’exigence d’Apple d’utiliser le moteur de navigateur WebKit de la société.
« Le groupe a provisoirement conclu que les règles d’Apple empêchent d’autres concurrents de proposer de nouvelles fonctionnalités innovantes qui pourraient profiter aux consommateurs », a écrit la CMA. « D’autres fournisseurs de navigateurs ont souligné qu’ils n’ont pas pu offrir une gamme complète de fonctionnalités de navigateur, comme un chargement plus rapide des pages web sur iPhone. »
La loi sur les marchés numériques, la concurrence et les consommateurs (DMCC), adoptée plus tôt cette année, donnera à l’organisme britannique une puissance supplémentaire pour mener ses prochaines étapes. L’équivalent britannique de la loi sur les marchés numériques (DMA) de l’UE peut désigner les grandes entreprises technologiques comme ayant un « statut de marché stratégique » avec un « pouvoir de marché substantiel et enraciné » et une « position de signification stratégique ».
Tout comme la version européenne, la loi permet au Royaume-Uni de négocier et d’imposer des concessions aux géants de la tech qui, du moins aux États-Unis, semblent souvent intouchables : la DMCC habilitera le conseil britannique à infliger des amendes allant jusqu’à 10 % des revenus mondiaux des entreprises contrevenantes.
Le résumé de la CMA sur l’audience d’Apple révèle que le fabricant de l’iPhone a soutenu qu’il restreint les moteurs de navigateur pour « s’assurer que les utilisateurs bénéficient de la meilleure sécurité, confidentialité et performance sur les appareils iOS » — un argument familier pour ceux qui ont suivi les précédents procès pour concurrence d’Apple. Apple a affirmé qu’une concurrence saine existe, en raison de la présence de navigateurs tiers avec des fonctionnalités telles que le blocage des publicités, les VPN et l’IA. La société a également déclaré qu’elle prenait régulièrement en compte les retours des développeurs et n’avait pas eu vent de plaintes concernant ses règles actuelles sur les navigateurs.
En contradiction avec cela, la CMA a déclaré que d’autres fournisseurs de navigateurs ont souligné des fonctionnalités qu’ils ne peuvent pas mettre en œuvre sur iOS, comme un chargement plus rapide des pages web. « De nombreux petits développeurs d’applications britanniques nous ont également dit qu’ils aimeraient utiliser des applications web progressives — un moyen alternatif pour les entreprises de fournir des applications aux utilisateurs mobiles sans télécharger d’applications via une boutique d’applications — mais que cette technologie ne peut pas pleinement se développer sur les appareils iOS », a écrit le conseil.
La CMA a également déclaré que la manière dont les choix de navigateurs sont présentés aux utilisateurs permet à Apple et Google de « manipuler ces choix pour rendre leurs propres navigateurs l’option la plus claire ou la plus simple ». En outre, elle a souligné un accord de partage des revenus entre les deux entreprises qui « réduit considérablement leurs incitations financières à rivaliser dans les navigateurs mobiles sur iOS ».
La prochaine étape du conseil est une période de commentaires ouverts sur ses conclusions, qui se terminera le 13 décembre. Après son enquête, la CMA prévoit de rendre sa décision finale en mars 2025.Cette article est apparu à l’origine sur Engadget à https://www.engadget.com/big-tech/uk-watchdog-says-apples-rules-restrict-ios-browser-competition-201106359.html?src=rss

Le co-fondateur de LinkedIn, Reid Hoffman, met en garde contre le « conflit d'intérêts » d'Elon Musk dans l'élaboration des politiques en matière d'IA | TechCrunch

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Le co-fondateur de LinkedIn, Reid Hoffman, met en garde contre le « conflit d’intérêts » d’Elon Musk...

Reid Hoffman, co-fondateur de LinkedIn et d’Inflection AI, a partagé ses attentes concernant la future administration Trump dans une tribune pour le Financial Times. Et bien qu’il semble espérer que le président élu Donald Trump puisse ouvrir la voie à plus de concurrence et à une innovation plus rapide dans l’industrie technologique, Hoffman a également exprimé des inquiétudes quant au fait que Trump puisse offrir certains […]
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Le juge déclare que le processus d'annulation ennuyeux de SiriusXM est illégal

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Le juge déclare que le processus d’annulation ennuyeux de SiriusXM est illégal

Image : The Verge Un juge de New York a déterminé que le processus de résiliation "long et contraignant" de SiriusXM est illégal. Dans une décision rendue jeudi, le juge Lyle Frank a conclu que SiriusXM viole une loi fédérale exigeant que les entreprises permettent de résilier facilement un abonnement.La décision intervient presque un an après que la procureure générale de New York, Leticia James, a intenté une action contre SiriusXM, affirmant que l'entreprise rend les abonnements difficiles à annuler. Après une enquête, le bureau du procureur général a constaté que l'entreprise tente de retarder les résiliations en obligeant les clients à appeler un agent, qui les garde ensuite au téléphone pendant plusieurs minutes tout en leur proposant jusqu'à cinq offres de rétention.Comme indiqué dans la décision, le juge Frank a conclu que SiriusXM a enfreint la loi Restore Online Shoppers Confidence Act (ROSCA), qui exige que les entreprises mettent en place des "mécanismes simples" pour résilier un abonnement. "Leur procédure de résiliation n'est clairement pas aussi facile à utiliser que la méthode d'inscription", écrit le juge Frank, citant les "temps d'attente inévitables" liés à un appel avec un agent en direct et les offres d'abonnement qu'ils promeuvent.La Federal Trade Commission a également commencé à sévir contre les abonnements difficiles à annuler, avec une nouvelle règle "click to cancel" qui entrera en vigueur l'an prochain. Selon la loi, les entreprises doivent rendre l'annulation d'un abonnement aussi simple que l'inscription. "Cette décision a trouvé que SiriusXM a illégalement créé un processus de résiliation compliqué pour ses clients new-yorkais, les obligeant à passer un temps significatif à parler avec des agents qui refusaient de prendre 'non' pour réponse", a déclaré la procureure générale James dans un communiqué.À la suite de cette décision, SiriusXM doit modifier son processus de résiliation — mais uniquement...
Angela Merkel exprime une « immense préoccupation » concernant le rôle d'Elon Musk auprès du gouvernement américain

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Angela Merkel exprime une « immense préoccupation » concernant le rôle d’Elon Musk auprès du gouvernement...

L’ancienne chancelière allemande affirme que la politique doit régir l’équilibre social entre les citoyens puissants et ordinairesAngela Merkel, qui dans ses nouvelles mémoires exprime des craintes pour l’ordre démocratique occidental avec Donald Trump comme président des États-Unis, a également exprimé de profondes inquiétudes concernant le rôle démesuré que pourrait jouer Elon Musk dans l’administration Trump.L’ancienne chancelière allemande, qui, pendant le premier mandat de Trump, avait été désignée par certains observateurs comme la “leader du monde libre”, titre habituellement réservé aux présidents américains, a déclaré que ses 16 ans au pouvoir lui avaient appris que les intérêts économiques et politiques doivent être maintenus en équilibre subtil. Continue reading…

Haïti convoque l'ambassadeur de France après que Macron a qualifié ses dirigeants de « crétins »

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Haïti convoque l’ambassadeur de France après que Macron a qualifié ses dirigeants de « crétins »

Le gouvernement proteste contre les commentaires « inamicaux et inappropriés » du président français captés par une caméraLe gouvernement haïtien a convoqué l’ambassadeur de France dans le pays pour protester contre les commentaires « inamicaux et inappropriés » d’Emmanuel Macron, qui a été capté par une caméra qualifiant les dirigeants du pays de « crétins ».Le président français avait, mercredi, qualifié de « complètement stupide » la décision prise par le conseil présidentiel de transition de ce pays des Caraïbes de destituer le premier ministre plus tôt ce mois-ci, en pleine escalade de la violence des gangs. Continue reading…

En 2023, les pauvres ont été appauvris et les riches enrichis par le gouvernement

ECONOMIE

En 2023, les pauvres ont été appauvris et les riches enrichis par le gouvernement

Prélever 300 euros aux moins favorisés pour en faire bénéficier les plus aisés : tel est, en quelques mots, l’impact des décisions sociales et fiscales adoptées par le gouvernement en 2023, d’après un rapport dévoilé hier par l’Insee. Durant cette année, deux types de politiques publiques ont infléchi le niveau de vie des Français : d’une part, l’arrêt des aides exceptionnelles de pouvoir d’achat en 2022, qui a touché les moins privilégiés ; et d’autre part, l’ultime étape de la suppression de la taxe d’habitation, qui a favorisé les ménages les plus riches.

Globalement, les choix opérés sous l’égide d’Elisabeth Borne (Première ministre de mai 2022 à janvier 2024) ont fait reculer le revenu disponible des ménages de 2,2 milliards d’euros. Si l’on compare avec une situation où ces décisions n’auraient pas été appliquées, cela équivaut à une diminution moyenne de 0,2 % du niveau de vie, soit 50 euros en moins par individu sur l’année.

Cependant, cet effet n’est pas uniformément réparti. La politique sociale et fiscale du gouvernement a généré 19 millions de perdants, soit deux ménages sur trois, contre 5,7 millions de gagnants. Ainsi, 70 % des Français les moins fortunés figurent parmi les victimes de ces mesures. Mais c’est le 1er décile de niveau de vie (les 10 % les plus pauvres) qui a été le plus durement touché : en moyenne, une perte de 290 euros annuels par personne, représentant un recul de 2,7 % de leur niveau de vie.

« 290 euros en moins chaque année, c’est dramatique, cela peut précipiter bien des individus », déclare Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde.

Dans le détail, c’est l’absence en 2023 de la revalorisation anticipée des minima sociaux, accordée en 2022, qui a le plus pesé sur le budget des plus modestes (- 2,2 milliards d’euros). Il en va de même pour la fin de l’indemnité inflation, introduite en 2021 pour une durée de deux ans et non prolongée en 2023. Cette décision a engendré un manque significatif dans le revenu disponible des Français (- 1,8 milliard).

Exit également le doublement du chèque énergie en 2022 par rapport à 2021 et l’attribution d’un chèque exceptionnel de 100 euros aux foyers modestes non éligibles à cette aide. Ces deux dispositions n’ont pas été reconduites en 2023 (- 1,3 milliard) et ont majoritairement affecté les 20 % les plus défavorisés. On peut aussi citer l’abandon de l’allocation exceptionnelle de rentrée scolaire (- 1,1 milliard) et l’absence de hausse anticipée des bourses secondaires (20 millions).

Bien sûr, ces soutiens avaient été annoncés comme temporaires lors de leur adoption. Il est donc délicat de reprocher leur mise en œuvre au gouvernement : « Ces mesures étaient indispensables en 2022, contribuant à limiter la montée de la pauvreté à ce moment-là, modère Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre. Mais étant donné la persistance de l’inflation en 2023, leur prolongation aurait été légitime tant qu’elles restaient utiles. » Une autre analyse de l’Insee rappelle que l’inflation s’élevait encore à 4,9 % en moyenne annuelle en 2023, seulement 0,4 point de moins qu’en 2022. Et l’organisme précise : « l’ampleur du choc a été deux fois plus importante pour les 20 % les plus modestes, déjà soumis aux contraintes économiques les plus élevées, que pour les 20 % les plus riches. » Entre 2022 et 2023, l’inflation a rogné 7,1 % du pouvoir d’achat du premier décile contre 3,1 % pour le dernier. De quoi justifier la nécessité d’un ciblage mieux ajusté en faveur des plus vulnérables. « Mais 2023 n’était pas une année présidentielle, contrairement à 2022 …», nuance Manuel Domergue.

« Ensemble, nous sommes parvenus à surmonter les crises sanitaire et inflationniste, estime Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité. Mais le quoi qu’il en coûte a manqué de discernement, et la suppression des mesures exceptionnelles se fait dans la confusion, en sacrifiant les plus fragiles qui en paient le prix fort. »

Petit lot de consolation : la prime de Noël destinée aux familles monoparentales au RSA a été augmentée de 35 % en 2023, ce qui représente un gain moyen de 10 euros pour les plus modestes. Cependant, cette initiative est jugée insuffisante par Marie-Aleth Grard :

« On ne peut répondre à ces problématiques par des mesures ponctuelles et précaires, qui inquiètent les personnes et bloquent toute projection à long terme. Ce sont des palliatifs dérisoires. Il faudrait une réelle revalorisation du RSA pour permettre aux plus précaires de retrouver une autonomie et s’insérer durablement. »

Champagne pour les plus riches

À l’opposé, les ménages les plus aisés n’ont guère de quoi se plaindre. Pour les 30 % les mieux nantis, les réformes sociales et fiscales de 2023 ont eu des effets tangibles : + 60 euros en moyenne pour le 8e décile et 280 euros pour le dernier décile. En particulier, la suppression finale de la taxe d’habitation a été un gain significatif : + 300 euros pour le dernier décile.

« On se demande vraiment qui sont les assistés, s’interroge Marie-Aleth Grard. C’est d’autant plus absurde que cela n’impacte pas leur quotidien et leur semble probablement risible, alors que de tels montants pourraient offrir un peu de stabilité aux plus démunis. »

La déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé (AAH) a également contribué à creuser les inégalités, car cette réforme a pénalisé certains bénéficiaires parmi les moins favorisés, notamment ceux en couple avec une personne ayant des revenus plus faibles.

En conclusion, « les mesures sociales et fiscales de 2023 ont amplifié les inégalités », affirme l’Insee. Tous les indicateurs habituels en attestent : l’indice de Gini, le rapport interdécile ou encore la répartition entre les niveaux de vie détenus par les 20 % les plus riches et ceux des 20 % les plus modestes, tous orientés à la hausse.

Sans compter l’augmentation de 0,6 point du taux de pauvreté monétaire consécutive à l’arrêt des mesures exceptionnelles de 2022. Et il est peu plausible que les choix politiques de 2024 aient corrigé le tir…