Portraits de l’identité butch lesbienne de la classe ouvrière
En tant que fille d’un couple italo-britannique issu de la classe ouvrière, la photographe Roman Manfredi a grandi dans une cité des années 60 à Kings Cross, Londres. Sur un autoportrait, on peut la voir revenir sur le lieu de ses origines sous les traits d’une femme forte et musclée, parée d’une chevelure grise coupée court et d’une attitude défiante. Cette image fait partie de sa nouvelle exposition We/Us, actuellement présentée à la Space Station Sixty Five et dont Ingrid Pollard est co-curatrice. Se sentant appelée à documenter l’existence des butches et des studs britanniques (lesbiennes noires et latinx s’identifiant à des hommes), Roman raconte leur quotidien dans les régions rurales, pauvres et peu flamboyantes du pays. Manfredi a voyagé du Kent au Tyne and Wear, de l’Essex au Lancashire afin de les photographier et d’enregistrer les témoignages oraux de leurs identités et de leurs expériences quotidiennes. Cette série est une ode à la résilience et à la force de caractère des butches et des studs de la classe ouvrière, dans un monde très éloigné des théories académiques sur la queerness. Beaucoup y sont fières de leurs emplois manuels, de leurs uniformes, de leur kurta et de leur kente, de leur militantisme, de leurs équipes de foot, de leurs grosses cylindrées et, dans un cas, d’un serpent rouge vif. Manfredi, qui a bossé dans l’industrie des services et exercé des métiers manuels avant de se reconvertir en tant qu’artiste, s’est assise avec VICE dans un pub du coin pour discuter de l’expo et de ce que ça signifiait d’être une butch en 2023. VICE : Comment ce projet a vu le jour ?Roman Manfredi : J’étais à la Brighton Pride il y a quelques années de ça, et j’ai entendu une jeune dire qu’elle n’avait plus besoin de s’identifier au modèle fem/butch, que…