Tirs policiers à Paris: Le témoignage d’un passager du véhicule
“On était à un feu rouge et un policier à vélo est venu taper à la vitre du conducteur pour lui demander de se mettre sur le côté pour un contrôle”, raconte Ibrahima, qui se trouvait sur la banquette arrière. “Mon ami a bougé la tête comme s’il disait ‘oui, je vais me mettre sur le côté’, a avancé un peu et ne s’est pas arrêté”, poursuit-il.
Le véhicule se retrouve alors arrêté un peu plus loin à cause du trafic. Si bien que les policiers réussissent à le rattraper. “Ils sont revenus à côté de nous et nous ont braqués directement”, assure le passager sur RTL, alors que les policiers demandent au conducteur de sortir du véhicule. “Mon ami n’a pas osé regarder du côté gauche, il a regardé du côté droit et a fait comme s’il ne les voyait pas”, enchaîne Ibrahima, qui assure que le conducteur “n’a percuté aucun policier”, la voiture étant selon lui à l’arrêt.
“On disait au conducteur ‘gare-toi, sors’, mais il ne voulait pas regarder le policier. (…) Après, moi j’ai vu, ils (les policiers) étaient trop en train de trembler (…) avec leurs pistolets”, témoigne-t-il. “On était tous en panique, on a tous crié, moi j’ai crié ‘baissez-vous, baissez-vous!’. Après on a entendu que les coups de feu, les vitres qui pètent, au moins dix coups de feu.”
“Après ça, nous sommes sortis de la voiture et avons vu que la fille devant était pleine de sang, inconsciente”, continue Ibrahima, à propos de la passagère avant, qui est décédée dimanche des suites de ses blessures. Sur le moment, les policiers lui prodiguent un massage cardiaque, en vain.
“Pourquoi ils ont tiré dans la tête de la fille?”, se demande Ibrahima. “On connaît des histoires pour de vraies choses, la personne qui aurait essayé de foncer dedans, qui aurait mis les gens en danger. Mais il n’y avait rien de tout ça”, assure encore Ibrahima au micro de RTL.
Une vidéo existe, selon l’avocat des policiers
Invité sur le plateau de BFMTV ce lundi soir, l’avocat des trois policiers, Laurent-Franck Liénard, a lui livré une version bien différente du passager de la voiture.
Les trois policiers “ont été dans une situation très dramatique, où leur vie était véritablement en danger, où ils ont dû faire usage de leur arme, ce qui est vraiment l’ultime recours policier”, raconte-t-il.
“Vous savez, c’est la première fois qu’ils tiraient, les trois. C’est un très grand moment de solitude pour un policier qui se retrouve avec l’arme à la main, et qui est obligé d’appliquer des tirs sur quelqu’un. Donc ils ont été contraints de le faire (…) et ils n’en démordent pas”, continue l’avocat. “Ils disent: ’si nous n’avions pas tiré, il y aurait eu de toute façon des blessures graves voire des morts dans nos rangs’. Face à cette équation, ils ont décidé de tirer.”
“On a des témoignages et il y a une vidéo”, assure encore Laurent-Franck Liénard, qui indique qu’il a pu voir les images dans le cadre de la garde à vue, mais qu’il ne peut en dire davantage. “L’issue judiciaire de cette affaire, ce ne sera pas demain, ce sera dans deux ans ou dans cinq ans”, prévient-il.
Le conducteur brièvement placé en garde à vue
Le conducteur soupçonné d’avoir refusé d’obtempérer lors du contrôle a été très brièvement placé ce lundi en garde à vue pour “tentative d’homicide sur personne dépositaire de l’autorité publique”, selon le parquet de Paris.
Sa garde à vue à l’hôpital en début d’après-midi a été levée peu de temps après, l’homme de 38 ans n’étant finalement pas en état d’être entendu à ce stade, selon la même source. Il a été grièvement blessé par balle au niveau du thorax par des tirs des policiers.
Parallèlement, la garde à vue entamée dimanche dans les locaux de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) des trois policiers, deux hommes et une femme qui auraient tiré sur le véhicule, a été prolongée ce lundi, selon le parquet.
Ils sont entendus pour “violences ayant entraîné une ITT (interruption totale de travail) de plus de 8 jours avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique” et désormais également pour “violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner par personne dépositaire de l’autorité publique”.
La mesure de garde à vue a été prise “en raison de la gravité des conséquences des tirs réalisés et afin de vérifier les conditions d’usages de leurs armes par les intéressés”, selon le parquet.
Le contrôle s’est déroulé samedi en fin de matinée dans le XVIIIe arrondissement, dans le nord de la capitale.
Des fonctionnaires à VTT ont d’abord remarqué “une voiture avec quatre passagers dont l’un ne portait pas sa ceinture de sécurité”, avait relaté samedi une source policière.
Alors qu’ils s’en approchent, la voiture “prend la fuite à très vive allure”. Un peu plus loin, alors que les policiers tentent à nouveau de le contrôler, le conducteur démarre et “fonce sur l’équipage de policiers à VTT”, selon le récit de la police.
Les fonctionnaires “font alors usage de leurs armes” à plusieurs reprises et blessent gravement “le conducteur et le passager” à l’avant, transportés à l’hôpital, selon la source policière, tandis que les deux passagers à l’arrière n’ont pas été blessés.
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