Une nouvelle encourageante pour le secteur hospitalier en France ? Selon les comptes annuels de la santé publiés par la Drees, le volume d’activité des hôpitaux a connu une hausse de +5,7 % en 2023 par rapport à 2022, atteignant 122 milliards d’euros contre 115 milliards l’année précédente.
Cependant, cette croissance doit être nuancée. En effet, les années passées, malgré des chiffres moyens en hausse, le volume d’activité restait faible, témoignant des pressions exercées sur la productivité hospitalière. Ce phénomène a conduit à une situation paradoxale où un hôpital à faible coût est souvent synonyme de services de santé déficients. Qu’en est-il donc cette année ?
Bien que la moyenne générale affiche une augmentation de +5,7 %, les réalités varient considérablement. Malheureusement, les nouvelles ne sont pas encourageantes. En effet, cette hausse cache une tendance préoccupante : un transfert de l’activité du secteur public vers le secteur privé. En termes de soins délivrés, le secteur public a enregistré une augmentation de seulement 1,8 %, alors que le secteur privé a vu son activité croître de 6,3 %. Un écart significatif qui soulève des interrogations.
Pour mieux comprendre, l’augmentation de l’activité hospitalière publique, évaluée à 5,4 %, est principalement le résultat d’une hausse des prix (+3,6 %). Cela est attribuable à divers facteurs, notamment la revalorisation des rémunérations des fonctionnaires, l’augmentation des indemnités de garde, ainsi que l’impact de l’inflation sur les coûts énergétiques et des consommations intermédiaires.
Ces évolutions sont particulièrement préoccupantes dans certains domaines, comme les soins psychiatriques, qui ont chuté de 14,2 % par rapport à 2019, et les soins médicaux et de réhabilitation, en baisse de 11,5 % par rapport à la même année.
À l’inverse, le secteur privé affiche une augmentation de son activité en valeur de +6,4 %, presque entièrement due à l’accroissement du volume de soins délivrés (+6,3 %), tandis que les prix stagnent à +0,1 %.
Un affaiblissement du service public
La Drees explique cette disparité par des facteurs démographiques : la baisse des naissances impacte moins le secteur privé, qui prend en charge une plus grande proportion de cette population, tandis que l’augmentation des patients de plus de 70 ans, plus fréquente dans le secteur privé, lui est bénéfique.
Bien que cette explication soit plausible, elle reste incomplète et occulte une réalité bien documentée : la pénurie de soignants dans le secteur public, exacerbée par des conditions de travail difficiles.
Dans son rapport sur la santé en Europe, l’OCDE a souligné l’ampleur critique de cette pénurie au sein des États membres de l’Union européenne. En France, tous secteurs confondus, il manque 173 000 médecins, sages-femmes et infirmières, selon l’institution internationale.
Lorsque l’on se compare à l’activité hospitalière pré-Covid, on observe que le volume d’activité dans le secteur public n’a augmenté que de 0,5 % par rapport à 2019, ce qui est marginal. En revanche, le secteur privé a enregistré une hausse de 5,1 %, tandis que le privé non lucratif a connu une augmentation de 9,5 %.
À la fin octobre, le comité d’alerte sur l’Ondam (l’objectif national des dépenses d’assurance maladie) a révélé cette évolution contrastée. Il a noté que « 111 établissements, principalement publics, affichent une activité inférieure de plus de 10 % à celle de 2019, dont les CHU de Strasbourg, Orléans et Rouen ; l’activité de l’AP-HP reste inférieure de 4,5 % à celle de 2019. »
Dans un contexte où il est souvent difficile d’obtenir un rendez-vous à l’hôpital, et où les urgences sont encombrées, comme l’a récemment souligné la Cour des comptes, ces chiffres ne peuvent pas être interprétés comme un signe positif. L’affaiblissement du service public hospitalier est clairement visible à travers ces statistiques.
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