PEOPLE – If U Seek Amy de Britney Spears n’a rien à voir avec Amy Winehouse. L’affaire autour de la pop star qui secoue actuellement le monde médiatique, peut-être que si. Depuis l’éclosion du mouvement #FreeBritney, les fans pointent du doigt certaines similitudes avec le destin tragique de l’interprète de Rehab, dont ce vendredi 23 juillet marque les dix ans de sa disparition.
En cause? L’entourage des deux femmes, et notamment leurs pères. Comme celui de Britney Spears, que les défenseurs de la star accusent de conserver un contrôle tyrannique et financier sur sa fille, Mitch Winehouse a fort mauvaise réputation. Celui-ci a souvent été présenté dans les médias comme l’un des principaux responsables des addictions de la chanteuse londonienne, décédée en 2011 d’une overdose.
Certaines paroles de l’artiste, mais aussi une scène du documentaire Amy, laissent, par exemple, entendre qu’il l’aurait longtemps empêchée de se rendre en cure de désintoxication. Lui, a toujours nié, toujours réfuté chaque accusation. Le concert désastreux de Belgrade un mois avant sa mort? Il ne pouvait pas le prédire. L’équipe de tournage qu’il a fait venir à Sainte-Lucie, l’île sur laquelle la chanteuse s’était exilée pour trouver la paix? Il avait son accord.
À l’approche d’un documentaire de la BBC, qui doit être diffusé ce même vendredi à la télévision britannique, la mère d’Amy Winehouse tient, elle aussi, à mettre les pendules à l’heure: Mitch Winehouse n’est pas James Parnell Spears. “Ce n’était pas sa faute, assure cette dernière au micro de Radio Times. […] Ça ne s’est pas du tout passé comme ça. Nous faisons toutes et tous de mauvaises choses parfois. Mitch était une cible facile. Nous avons tous fait beaucoup d’efforts.”
“Je veux une enquête contre mon père”
D’après le psychiatre Jean-Victor Blanc, le rapprochement entre l’entourage des deux femmes est compréhensible, mais compliqué. ”Ça rentre dans l’intimité familiale, sphère à laquelle nous n’avons pas accès, et fait intervenir en même temps des enjeux financiers qui, ici, dépassent les questions de santé mentale”, nous souffle l’auteur de Pop & Psy: Comment la pop culture nous aide à comprendre les troubles psychiques, essai qui accorde notamment un chapitre au cas d’Amy Winehouse.
Contrairement à la pop star américaine, l’interprète de Back to Black n’a jamais été sous la tutelle de son père, du moins juridiquement. Cette mesure, selon le spécialiste, est censée assurer la sécurité et les soins d’une personne en danger. Pour Britney Spears, “elle a été mise en place lors d’un moment de détresse absolue intense, rappelle le médecin. Ça l’a éloignée d’un environnement toxique, ça lui a permis d’être soignée et de suivre un traitement.”
Contrairement à beaucoup de célébrités, à l’instar de Mariah Carey qui a déjà expliqué combien le suivi médical pour le trouble bipolaire dont elle souffre lui fait du bien, Britney Spears, elle, est toujours restée discrète au sujet de sa santé mentale.
Ses dernières révélations sur la tutelle vont plutôt dans le sens inverse. Ce régime controversé aux États-Unis, comme peut en témoigner le filmI Care a Lot, elle n’en veut plus. “Je veux une enquête contre mon père”, a-t-elle assuré au cours du mois de juillet, mentionnant même une possible “ordonnance de protection” à son encontre. En larmes, la chanteuse a supplié le tribunal de mettre fin à cette “tutelle abusive”. “La situation paraissait judicieuse au début et là, plus du tout”, constate Jean-Victor Blanc.
Leur souffrance moquée
Amy Winehouse pensait-elle la même chose de son père? Le psychiatre ne peut pas se prononcer. Ce dont il peut parler, ce sont des trajectoires de vie des deux femmes et de leurs similitudes, “d’un point de vue culturel et sociétal”. “Au tournant des années 2000, toutes les deux allaient très mal”, se souvient-il.
Amy Winehouse souffre alors de boulimie et de dépendance à l’alcool et diverses drogues. En 2008, les premiers signes d’une maladie pulmonaire apparaissent. Un an plus tôt, Britney Spears, elle qui a longtemps été l’incarnation d’une Amérique puritaine et saine, aurait enchaîné les centres de désintoxication après ce jour fatidique où elle s’est rasé le crâne dans un salon de coiffure de Los Angeles aux yeux de tous.
Concerts ratés, apparitions publiques en état d’ébriété… Leurs déboires sont épiés. “Leur souffrance a nourri les paparazzis et les tabloïds, commente Jean-Victor Blanc. C’était traité sur le ton de la moquerie, sous une forme de rigolade.” Les surnoms dégradants qui leur ont été donnés à l’époque peuvent en témoigner, à l’image de Wino [en français, “pocharde”] pour Amy Winehouse.
Un nouveau contexte
Une dizaine d’années plus tard, il ne reste que Britney Spears. Le contexte a changé. Les “frasques” des célébrités ne sont toujours pas épargnées par la presse à scandale, mais “on essaye un peu plus de comprendre ce qu’il y a derrière”, poursuit le psychiatre. Nombreuses sont les célébrités, en tout cas aux États-Unis, à s’exprimer sur leur santé mentale. C’est le cas de Selena Gomez ou de Kanye West. “Un travail a été fait entre temps”, ajoute Jean-Victor Blanc.
Sans doute triviale aux yeux de certains il y a dix ans, la bataille judiciaire de Britney Spears remplit les pages des grands médias. Elle est au coeur d’un documentaire du New York Times. Chez nous, en Une du numéro de Libération de ce lundi 19 juillet. Les répercussions dans la société sont là. Le public s’y sensibilise.
Les autorités, aussi. De l’autre côté de l’Atlantique, des parlementaires ont récemment présenté un projet de loi, intitulé le “Freedom and Right to Emancipate from Exploitation Act”, visant à mettre fin aux abus en matière de tutelle. Des zones d’ombre persistent. “On suit cette ‘saga’ révélation après révélation”, observe Jean-Victor Blanc. Et elles jettent un jour nouveau sur le destin passé de nombreuses femmes, dont celui d’Amy Winehouse.
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