Selon le journal Napoli Today, certains disent que la puttanesca a été inventée par le propriétaire d’un bordel aux portes de Rome, d’autres par le propriétaire d’un bordel du quartier espagnol de Naples, d’autres encore que son nom fait référence au vert, au rouge et au violet de la sauce, toutes les couleurs des sous-vêtements portés par les femmes travaillant dans ces bordels, et d’autres encore qu’elle a été inventée par une travailleuse du sexe nommée Yvette la Francese, qui lui a donné le nom de son métier.
Mais il y a quelques problèmes avec cette théorie du bordel. Tout d’abord, les ingrédients sont tellement communs et faciles à assembler que ses origines supposément colorées semblent un peu farfelues. Par exemple, dans le livre Cucina Teorico-Pratica (« Cuisine théorique-pratique ») d’Ippolito Cavalcanti, datant du XIXe siècle, il est fait mention de vermicelles aux câpres, olives et anchois, qui sont considérés comme l’un des fondements de la tradition culinaire napolitaine moderne.
L’autre question est de savoir quand le nom apparaît pour la première fois. La première référence à la sauce puttanesca que j’ai pu trouver se trouve dans un guide gastronomique et œnologique publié en 1932 par l’organisation touristique italienne Touring Club. Mais dans ce livre, le plat est appelé maccheroni alla marinara. Dans le roman Blessé à mort de Raffaele La Capria, paru en 1961, soit trois ans après l’interdiction des maisons closes en Italie, il est décrit comme un plat sicilien.
Les hypothèses les plus récentes sur l’origine du nom nous conduisent à Ischia, une magnifique île méditerranéenne au large de Naples. Le livre La Cucina Napoletana (« La cuisine napolitaine »), publié en 1977 par Jeanne Carola Francesconi, attribue l’invention du plat à un peintre local nommé Eduardo Colucci, qui invitait souvent des amis sur son île natale et leur préparait sa spécialité, les maccheroni alla puttanesca.
Un article paru en 2005 dans un journal local affirme que la sauce a été créée dans les années 1950 par le neveu de Colucci, l’architecte et jet setter Sandro Petti. Il était propriétaire du restaurant Il Rancio Fellone et a affirmé qu’un soir, il a improvisé un dîner rapide pour ses invités en rassemblant des « trucs au hasard » – ou una puttanata, comme on dit en italien, une expression courante qui se traduit littéralement par « une action de pute ». Cette théorie est également soutenue par l’écrivain culinaire Jeremy Parzen.
L’expression « puttanata » n’est pas exactement une aberration dans la langue italienne – de nombreux jurons italiens font référence aux femmes, à leurs organes génitaux et au travail du sexe. Si ce type de langage est de plus en plus considéré comme dépassé en anglais, ces discussions ne font que commencer en Italie. Si les féministes italiennes utilisent désormais des traductions de mots anglais pour faire référence au travail du sexe de manière non stigmatisante, la plupart des expressions faisant référence au travail du sexe sont négatives et encore très courantes dans le vocabulaire italien.
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