Séance unique le lundi 5 Février à 20h,
en présence de Stephan Urbinati, expert en survie,
instructeur, explorateur qui profite de ses voyages pour réaliser des longs-métrages documentaires via sa série de films Légende. La séance sera suivie d’un débat et d’une discussion autour de différents thèmes : Fuite et voyage ; Émancipation et rencontres ; Habitude et anxiété ; Effet négatif et positif de l’isolement…
4€ pour les étudiants
Écrit et réalisé par Matt ROSS – USA 2016 2h VOSTF – avec Viggo Mortensen, Frank Langella, George Mackay, Samantha Isler, Annalise Basso, Nicholas Hamilton…
Du 05/02/24 au 05/02/24
Pas de confusion, pas d’à priori, pas de méfiance : le « Captain Fantastic » du titre n’a rien d’un super-héros en collant moulant gonflé aux stéroïdes dont la mission pseudo-divine serait de sauver l’humanité et d’abord les Etats-Unis d’Amérique. C’est même quasiment tout le contraire. Le personnage principal est un homme somme toute ordinaire qui a décidé de mener une vie extra-ordinaire, au sens littéral de « hors des sentiers battus », et le film est une très belle fable philosphico-écolo-familiale, profonde sans en avoir l’air, qui porte un regard décalé autant qu’incisif sur l’occidental way of life traditionnel et dominant. Ni militant ni apocalyptique ni moralisateur, Captain Fantastic se révèle riche en idées, en propositions, en contradictions qui nous captivent de bout en bout tout en semant des interrogations toujours pertinentes sur des valeurs, des mécanismes, des habitudes tellement ancrés dans nos modes de vie qu’on finit par ne plus en avoir conscience. Quelque part entre Little miss Sunshine – pour la saga familiale emballante – et Vie sauvage, le film de Cedric Kahn avec Mathieu Kassovitz – pour les interrogations sociétales et éducatives –, Captain Fantastic est aussi divertissant que stimulant – et parfois très émouvant – et peut se voir avec des enfants et ados à partir de 10/12 ans, échanges vivifiants à prévoir !
La scène d’ouverture, étonnante , nous met dans le bain. On y voit des enfants et des adolescents couverts de boue arpentant la forêt, on ne comprend que peu à peu que toute cette famille/tribu est en train de chasser le cerf à l’ancienne, pour se nourrir, sans meute ni fusil à lunettes. Bienvenue au sein de la famille de Ben Cash qui, au cœur des magnifiques forêts montagneuses du Nord-Ouest américain, vit en quasi autarcie et autosuffisance avec ses six enfants. Au programme, point de livraison de junk food, point de tablettes ni de consoles, mais entraînements pour le moins sportifs, nécessaires à la survie en milieu éventuellement hostile, pratique de la chasse, de la cueillette et entretien du potager. Côté intellectuel, une éducation basée sur la découverte et l’étude des textes fondateurs de la démocratie américaine et des œuvres de philosophes ou écrivains plus hétérodoxes. Chez les Cash on ne boit pas de coca, on ne regarde pas la télé, on construit des cabanes et en guise de Noël, tradition de moins en moins chrétienne et de plus en plus mercantile, on préfère s’offrir des cadeaux (généralement des couteaux de chasse dès l’âge de huit ans) pour célébrer la Saint Noam Chomsky !
Ce monde à part, harmonieux, qu’on qualifierait volontiers de paradisiaque, va vaciller, voire menacer de s’effondrer quand la mère va décéder à l’hôpital, que toute la petite famille va devoir traverser les Etats Unis et s’imposer à ses funérailles au Nouveau Mexique, auxquelles elle n’est pas forcément la bienvenue.
C’est le début d’un road movie initiatique, à la découverte du monde extérieur face auquel les convictions des uns et des autres risquent bien de se trouver remises en question.
Magnifiquement mis en scène – le rythme, le cadre, la beauté de la photo – passionnant à suivre, servi par l’interprétation du toujours grandiose Viggo Mortensen, splendide en père intransigeant dans ses choix de vie mais en proie au doute, entouré de jeunes comédiens épatants, Captain Fantastic s’impose donc comme une superbe réflexion sur les conséquences pour les enfants des choix de vie de leurs parents, une ode au pas de côté en douceur, dans le respect de la personnalité de chacun et même des oppositions des détracteurs, parcourue d’un souffle libertaire humaniste, doux et tendre dans lequel on s’enveloppe avec un plaisir sans partage.