Après de longues minutes à tourner dans le prétoire et à faire glisser des chocolats sous son masque, son supplice a pris fin. Et c’est devant une salle comble pour la première fois depuis l’ouverture des débats que Nicolas Sarkozy a fini par être appelé et répondre par un “oui” qui n’a surpris personne quand la présidente lui a demandé s’il tenait à prononcer un propos liminaire.
16 minutes d’indignation. 16 minutes durant lesquelles il a fustigé les “mensonges” de l’accusation et énuméré les événements qui trahissent, selon lui, une cabale judiciaire menée à son encontre. Et s’il a affirmé que ses déclarations ne s’adressaient qu’au tribunal, sa longue introduction, tout comme la teneur de ses réponses, ont pris des allures de meeting, comme s’il s’agissait de les faire résonner en dehors de la 32e chambre correctionnelle.
Bismuth Mr le procureur, c’est WhatsApp!Nicolas Sarkozy
À plusieurs reprises, sa voix s’emporte et son verbe s’enflamme, jusqu’à provoquer les rires de la salle, comme lorsqu’il veut schématiser le bien fondé de l’ouverture d’une seconde ligne pour discuter de sujets sensibles. “Si WhatsApp avait existé, je n’aurais pas eu besoin de Bismuth. Si Telegram avait existé, je n’aurais pas eu besoin de Bismuth. Bismuth M. le Procureur, c’est WhatsApp!”, a lancé Nicolas Sarkozy, qui a plusieurs fois donné dans la punchline un brin provocatrice. Interrogé sur le nombre de fois qu’il avait vu Gilbert Azibert, il a répliqué en haussant les épaules: “Je l’ai vu plus de fois depuis le début du procès que durant toute ma vie”.
Un coup de pouce pour faire plaisir à ThierryNicolas Sarkozy
Tout au long de ses réponses, Nicolas Sarkozy a tenu la même stratégie. À savoir la thèse d’un banal concours de circonstances dont les éléments à charge auraient été montés de façon inéquitable. “Le pacte, il n’existe pas. Il n’a jamais existé. Ce n’est qu’une conversation avec un frère, qui me demande un service”, a-t-il insisté, minimisant ce que l’accusation fait valoir, à savoir la possible promesse de son influence contre une information qui devait rester confidentielle dans une autre affaire le concernant, le dossier Bettencourt. Une lecture des faits qu’il réfute, admettant toutefois avoir envisagé un vague “coup de pouce pour faire plaisir à Thierry”.
À plusieurs reprises, Nicolas Sarkozy a plaidé la naïveté, comme lorsqu’il parle de la Cour de cassation, une institution qu’il décrit comme un “club” dont il ne connaîtrait pas bien les codes, ou de la banalité d’un “coup de pouce” demandé à un responsable politique de son envergure. “Si j’avais su que j’aurais des ennuis judiciaires pour ça, j’aurais dit ‘mais c’est dingue!’”, s’est-il écrié, masque chirurgical tombé sous le menton en se tournant (encore) vers ses proches, dont ses fils Jean et Pierre, présents au premier rang.
La famille. Il en a d’ailleurs été (beaucoup) question ce lundi, lors d’une audience qui a traîné en longueur. Comme lorsqu’il a évoqué Thierry Herzog, son “frère” plus qu’un ami, ou “Carla” qu’il a cité à de très nombreuses reprises. Une façon pour le prévenu d’assurer que ses préoccupations étaient au moment des faits à “mille années lumières” du pacte de corruption évoqué par le parquet. C’est pourtant pour ces faits présumés qu’il est poursuivi devant le tribunal correctionnel. Il encourt une peine maximale de 10 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende.
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