Après dix-huit ans de diffusion, Plus belle la vie tire sa révérence vendredi 18 novembre avec un prime time inédit de 90 minutes suivi, en deuxième partie de soirée, d’un documentaire réunissant les témoignages des comédiens. Ces derniers ont pu croiser, jusqu’au dernier jour de tournage en septembre dernier, leurs fans hardcore réunis devant le studio 37.

On s’est rendu sur place et on a suivi pendant plusieurs jours ces passionnées. Actifs en ligne, ils sont capables d’avaler les kilomètres pour se rapprocher de leurs idoles. Philippe, qui dit adorer les personnages de Kevin et Baptiste parce qu’il les a vus « grandir », a même déménagé pas loin de la Canebière.

Laëtitia fait elle des sacrifices pour pouvoir se payer ses voyages et avoir l’impression de remplir son rôle de fan quatre à cinq fois par an, une semaine entière. Elle a cette fois-ci décidé de rester dix jours pour « leur dire vraiment au revoir » et les soutenir avec ses pancartes. Elle est rejoint par Steffie qui imagine déjà un épilogue réunissant tous les habitués du Mistral. À sa manière, chacun fait le deuil de la série culte de France 3 et répond à nos questions ci-dessous.

Laëtitia, 36 ans

VICE : Bonjour Laëtitia, peux-tu te présenter et dire depuis quand tu regardes PBLV ?
Laëtitia Moiroux :
Je viens de Valence, dans la Drôme. Je suis maman, célibataire et sans emploi. J’ai bientôt 36 ans et je regarde la série depuis que j’en ai 15. Mes parents ne voulaient pas trop que je regarde la télé quand j’étais au collège mais j’ai rattrapé la 1re saison à sa sortie en DVD.

Comment la série est-elle devenue une passion ?
C’est une série conviviale et les endroits filmés donnaient envie de les visiter. Si je devais la résumer en trois mots, ça serait : magie, bonheur et partage. Et puis je me suis souvent identifiée à des personnages. Pas forcément pour ce qu’ils sont mais plus pour des histoires qui m’ont touchée ou qui ont touché des gens de ma famille. Quelque chose de l’ordre de l’intime.

C’est quoi être fan pour toi ?
Je n’utiliserais pas la définition du dictionnaire. Être fan, ça se vit du début à la fin. Je considère que quelqu’un est fan à partir du moment où il vit et ressent les émotions à travers un artiste ou une série. Ce qui me plaît dans le fait d’être fan, c’est d’aller à la rencontre des artistes, de les chercher comme dans une chasse au trésor et de ressentir l’adrénaline monter quand je suis face à eux. C’est mon petit bonheur à moi.

Est-ce que tu as déjà été critiquée pour ta passion ?
Bien sûr, ça m’est souvent arrivé. Mais ma devise c’est, quand on a une passion, il faut la vivre à fond sans se poser de questions. Le reste on s’en fiche. Je vis pour moi, pas pour les autres. Il y a quelques années, j’ai perdu des amis qui ne comprenaient pas ma passion. Je préfère rester seule plutôt que mal accompagnée. Aujourd’hui, s’ils m’entendent, je leur réponds que moi, j’ai vécu ma passion à fond pour PBLV. Je suis fière d’avoir fait ce que j’ai fait pour la défendre jusqu’au bout et d’avoir soutenu ma série préférée jusqu’au dernier jour.

Comment imagines-tu l’épilogue du dernier épisode ?
J’ai fait ce rêve où il y aurait une grande fête sur la place du Mistral et où les Mistraliens se diraient au revoir puis partiraient vers de nouvelles aventures.

Qu’est-ce qu’il y aura après PBLV ?
Je regarde déjà Demain nous appartient et Ici tout commence, du coup je n’aurais pas ce vide complet que les fans de PBLV ressentiront. Mais depuis 2-3 jours, je le vis assez mal émotionnellement. Je pense qu’on réalisera vraiment le 18 novembre ce que ça représente. Le lendemain de la diffusion, je boycotterai France 3 car je suis catégorique. Je préfère me dire que j’ai vécu une belle histoire pendant 18 ans. Si ça reprend après, ça ne sera que du bonheur.

VICE : Bonjour Philippe, peux-tu te présenter et dire depuis quand tu regardes PBLV ?
Philippe Canyon :
Je m’appelle Philippe Canyon, rapport au Grand Canyon. J’ai 56 ans. J’ai été maître-chien pendant 10 ans à Metz et j’ai tenu un bar en Lorraine pendant 6-7 ans. J’habite à Marseille depuis 2 ans mais je regarde PBLV depuis 2004. Les trois premières années, je n’ai pas suivi car ce n’était pas la tasse de thé de mon ex-femme.

Comment la série est-elle devenue une passion ?
Au départ, avec les tournages en extérieur, ça m’a fait découvrir la ville de Marseille. C’est ce qui m’a fait aimer la ville et c’est aussi ce qui m’a fait déménager. Je crois que j’ai aussi accroché parce que la série parlait du quotidien – en période d’élections, il y avait toujours une référence à la politique. Ça aborde beaucoup de sujets qui pourraient aider les Français à se débarrasser de certains préjugés, notamment sur l’homosexualité ou les personnes transgenres. Je trouve que c’est une bonne chose que l’on voit ça à la télé. Si je devais résumer la série en trois mots, je dirais : détente, abstraction (des problèmes au quotidien) et fierté. Fierté de la ville. Quand on accepte Marseille, Marseille nous accepte en retour.

Qu’est-ce qu’être fan ?
Être fan, c’est faire plus que simplement regarder la série. C’est rester jusqu’à minuit près des studios pour tenter d’apercevoir les acteurs. Eux, ce sont les fans qui les font vivre. On les connaît sans les connaître mais on a fini par créer un espèce de lien. Ça fait 7-8 ans que je vais les voir au studio. En été, je m’y rends même deux fois par semaine.

Est-ce que tu as un objet préféré dans ta collection de souvenirs ?
J’ai un t-shirt avec une photo de Samia et Jean-Paul Boher lors de leur mariage dans la série. Je l’ai fait moi-même. Il y a aussi un t-shirt avec écrit Plus belle la vie et une kalash, ce qui représente bien les deux côtés de Marseille.

Est-ce que tu as déjà été critiqué pour ta passion ?
J’en suis à mon 4e divorce en 18 ans alors que je n’ai jamais trompé. Moi, je vis au quotidien avec PBLV.

Comment imagines-tu l’épilogue du dernier épisode ?
Je vois bien la dernière scène avoir un lien avec la première qui a eu lieu en 2004. On irait de la plage des Catalans jusqu’à la chambre de Ninon.

Qu’est-ce qu’il y aura après PBLV ?
Rien. Je ne vais pas regarder d’autres feuilletons. Je suis trop attaché à celui-là pour avoir envie de me mettre à suivre un nouveau truc. Même après la fin de la série, je continuerai probablement à poster des vidéos et des photos-souvenirs sur le groupe Non à l’arrêt de PBLV. On est 15 000 dessus, en 6 mois. C’est moi qui l’ai fondé.

Steffie, 41 ans

VICE : Bonjour Steffie, peux-tu te présenter et dire depuis quand tu regardes PBLV ?
Steffie :
J’ai 41 ans et je suis aide-soignante en Ehpad depuis 24 ans. Je suis mère de trois enfants et j’habite à Pontault-Combault en Seine-et-Marne. Je regarde PBLV depuis le 30 août 2004. C’est mon ex-mari qui m’a mise dedans. Je n’ai pas raté d’épisode ni de prime depuis.

Comment la série est-elle devenue une passion ?
Quand on ne rate pas un épisode, on s’attache aux personnages – mon préféré c’est Léo Castelli. Je ne m’identifie pas spécialement à un personnage en particulier mais j’ai été happée par un ensemble ; les intrigues autant que les décors. Depuis 4-5 ans, avec les réseaux sociaux, j’ai commencé à communiquer avec d’autres fans et ça a renforcé ma passion. En 2018, je suis descendue à Marseille pour la première fois. Depuis, j’ai fait une dizaine d’allers-retours. PBLV en trois mots ? Passion, échappatoire et intergénérationnel parce que je parle beaucoup de la série avec mes patients.

C’est quoi être fan pour toi ?
C’est quand on commence à aller à la rencontre des acteurs, à demander des photos, à acheter des objets… On rentre dans une sorte de sphère. Être fan, c’est un réconfort. La série fait partie de moi et de ma journée. J’ai hâte d’être le soir, à 20 h 20 et de me mettre devant la télé. Les photos, les discussions qu’on peut avoir avec les acteurs – et qui ne tournent pas forcément qu’autour de la série – c’est ce qui fait qu’on a un rapport différent. Plus profond, plus intime.

Est-ce que tu as un objet préféré dans ta collection de souvenirs ?
Depuis cinq ans, je collectionne des tasses dans lesquelles je bois mon café́ tous les jours. J’ai aussi fait une coque de portable avec un montage de selfies des acteurs et des vrais autographes.

Comment imagines-tu l’épilogue du dernier épisode ?
Tous les Mistraliens sur la place devant le Mistral. On sait déjà que ça s’appelle Sept mariages pour un enterrement et je ne veux rien savoir de plus avant la diffusion. J’ai envie de garder l’effet de surprise.

Qu’est-ce qu’il y aura après PBLV ?
Pour être tout à fait honnête, je regarde déjà Ici tout commence depuis trois ans donc je pense que je vais me raccrocher à ça. Je n’ai pas raté un seul épisode et je crois que je vais aller là où ils tournent avec Laëtitia qui est déjà partie jeter un œil. Il y a un moment donné où je vais craquer. Il va falloir que je me remette dans cette « énergie »… les photos, les rencontres.

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