« Du coup, on est vraiment partis en voyage, poursuit Jonas. Le premier projet c’était au Mozambique en 2019, et puis l’année d’après on a fait la Zambie. C’était le plan. Au Mozambique, on a construit deux skateparks avec un petit local sur le côté. Mais en Zambie, je voulais faire les choses différemment. Je voulais prendre mon temps pour faire des photos et apprendre à mieux connaître les gens. »
Après avoir atterri à Lusaka, la capitale de la Zambie, l’équipe avait encore un voyage de 600 km à faire. « On s’était pas vu·es depuis deux ans, alors tout le monde était vraiment impatient de faire ce voyage, explique Jonas. Quand on est finalement arrivé·es à Mongu, il faisait nuit noire, mais on y était. Dix jours plus tard, l’autre partie de l’équipe est arrivée, et à ce moment-là, tous les préparatifs du chantier devaient être terminés pour qu’on puisse commencer à construire. »
La communauté de Mongu, où Jonas et les autres volontaires ont séjourné, est établie au sommet d’une montagne. « Le skatepark est aussi au sommet, remet Jonas. Alors à chaque fois qu’on descendait en skate à vingt voire trente personnes pour aller au magasin ou en ville, les gens nous regardaient bizarrement. Mais après quelques semaines, tout le monde savait ce qu’on faisait ici. » Avec une vingtaine de travailleur·ses du coin, Jonas et les autres bénévoles ont ainsi construit un skate park de 700 m² : « Tout le monde était méga enthousiaste. Le jour de l’ouverture, plus de 1 200 personnes étaient là, c’était vraiment fou. »
Jonas explique aussi que la scène skate en Zambie est déjà plus développée qu’au Mozambique. Et c’est en grande partie grâce à Johnny Kalenga, un homme dont la vie sera très probablement adaptée un jour en documentaire.
Johnny a grandi dans l’ouest de la Zambie. Pendant sa jeunesse, dans sa région natale, il n’y avait pas ou peu de routes pavées, de parcs ou de sentiers. Le skate, et tout ce qui s’apparente aux sports de glisse, était tout sauf un passe-temps évident à pratiquer. « J’avais jamais fait de skate avant, mais j’ai directement su que c’était ma passion », explique-t-il dans un Ted Talk.
Les parents de Johnny n’étaient pas du genre enthousiaste quant à ses projets d’avenir, d’autant plus qu’il a dû être hospitalisé pendant plusieurs mois suite à un grave accident de voiture. Mais dès qu’il a été autorisé à retourner à l’école, il a commencé à mettre des thunes de côté : « Quand j’ai enfin eu assez d’argent pour acheter un skateboard, je n’ai plus rien fait d’autre. J’en faisais vraiment tous les jours, dans le but de m’améliorer. »
Des enfants de Mongu ont progressivement vu Johnny faire du skate dans les rues et ont commencé à lui demander s’il pouvait leur apprendre aussi. Sans vraiment s’en rendre compte, Johnny est devenu prof de skate. Il a fini par partager sa culture de la glisse et sa planche avec quasi tous les enfants du village. « Quand on est arrivé·es, Johnny avait déjà bâti une communauté de plus de 400 enfants », raconte Jonas.
Mais plus il y avait d’enfants, plus l’attente se faisait longue niveau matériel. Le groupe a donc commencé à fabriquer ses propres planches à partir d’étagères, de bouteilles, de roues de malles, etc. « J’ai commencé à prendre des photos pour moi, raconte Johnny dans ce même Ted Talk, mais un jour je me suis réveillé et je me suis dit que le monde devait voir ça. » Il a donc créé une page Facebook qui a rapidement été relayée par des personnes dans le monde entier. Grâce à ça, les enfants ont commencé à recevoir des chargements remplis de sneakers, de nouvelles planches et autres équipements.
« Depuis le mois de mai, le skatepark de Mongu est enfin prêt, conclut Jonas. Tu peux sentir que cette scène est en plein essor ici. Au Mozambique, en Zambie ou encore au Ghana, les personnes impliquées dans le skate sont en contact permanent les unes avec les autres. On sent partout qu’un truc est sur le point de se produire. »
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