Emmanuel Macron a demandé “aux administrations publiques et aux grands groupes de préparer un plan de sobriété énergétique” pour faire face à l’éventualité d’une coupure totale et de longue durée des livraisons de gaz russe vers l’Europe, qui représente 18% du gaz consommé en France. “Cette guerre va durer”, a-t-il également estimé.
En anticipation et face à la hausse des prix de l’énergie, le gouvernement a déjà lancé, le 29 juin, trois premiers groupes de travail. Objectif? Établir une feuille de route globale permettant de réduire la consommation d’énergie de 10% par rapport à 2019. Cela pour “une première étape” et avec “l’ambition que cela produise des effets dès l’hiver 2022-2023″. L’ensemble du plan doit être présenté fin septembre, avec deux points d’étapes d’ici là, confirme le ministère de la Transition énergétique.
“Il faut passer de la parole aux actes”, a demandé de son côté l’opposition à gauche. “Ce sont d’abord les plus gros qui peuvent commencer à faire ces efforts”, a également pointé le député LFI, Adrien Quatennens. “Les 10% les plus riches consomment 20 fois plus que les 10% les plus pauvres”, au niveau mondial, a-t-il ajouté. Le HuffPost fait le point sur les pistes avancées pour les administrations, les entreprises et les particuliers.
L’État pour montrer l’exemple
Pour l’administration publique et les collectivités locales, le groupe de travail s’intitule “l’État exemplaire”. Et pour le devenir, c’est la gestion du parc immobilier qui est présentée comme “prioritaire”, avec la volonté d’engager de nouveaux chantiers de rénovation thermique et de poursuivre les mesures de sobriété en matière de chauffage et de climatisation des bâtiments.
Le code de l’énergie de 2016 prévoit déjà d’interdire le chauffage au-dessus de 19 degrés dans les entreprises et les établissements publics ou la climatisation dans les bureaux en dessous de 26 degrés. “Une réduction d’un degré de la température de chauffe représente une diminution moyenne de 7% de la consommation de gaz” d’un bâtiment, fait valoir le gouvernement, qui appelle à ce que les règles s’appliquent.
Les capteurs de présence, pour éteindre la lumière quand une pièce est vide, devraient également être multipliés. Une possible coupure de l’éclairage de certains bâtiments la nuit, comme la Tour Eiffel, a également été évoquée dans la presse ces derniers jours. À la mairie de Paris, on ne balaye pas l’idée d’un revers de main. “C’est un bon sujet à regarder, mais au plan national. Si jamais on doit décider d’éteindre la Tour Eiffel, il faudrait le faire de manière coordonnée par l’ensemble des grands monuments français”, explique-t-on au HuffPost. “La sobriété est un sujet essentiel sur lequel chacun peut prendre sa part et nous le faisons d’ailleurs depuis plusieurs années”.
Concernant la consommation de carburants dans le secteur public, l’objectif est de ”renforcer l’attractivité du vélo et du covoiturage”, ainsi que de “favoriser le télétravail”. Il serait désormais possible de cumuler le forfait mobilité durable avec le remboursement partiel d’un abonnement de transports en commun et d’en bénéficier y compris lorsque le nombre de déplacements annuels de l’agent est inférieur à 100 jours.
Les commerces et les entreprises sollicités
Comment baisser la consommation d’énergie des magasins, des restaurants, des grandes surfaces ou encore des salles de spectacle? C’est la question posée aux deux autres groupes de travail. La gestion de la température dans ces bâtiments est également mise sur la table. La Fédération du commerce et de la distribution propose déjà de réduire d’au moins un degré la température dans les magasins, en la passant cet hiver de 20 à 19 degrés en moyenne.
Des dispositifs de contrôle de présence, de mobilités plus sobres, qu’il s’agisse de celle des employés ou des transporteurs de marchandises, sont également mis sur la table, comme différents dispositifs de soutien aux salariés (forfait mobilités durables, prime transport pour l’aide au carburant, auto-partage, ou encore label employeur pro-vélo).
Côté éclairage, l’arrêté du 27 décembre 2018 sur les nuisances lumineuses prévoit que les vitrines de magasins de commerce doivent être éteintes à 1 heure du matin au plus tard ou 1 heure après la cessation de l’activité.
“Je vais demander dans les toutes prochaines heures aux grands opérateurs, je pense à la SNCF, au secteur aérien, de dire dès la fin de l’été quelles sont les mesures supplémentaires qu’on peut prendre pour accélérer en termes d’éclairage, de consommation du quotidien”, a, lui, déclaré vendredi 15 juillet sur franceinfo Clément Beaune, ministre délégué chargé des Transports, rappelant que le secteur représente 30% des émissions de gaz à effet de serre.
“Il faudra à l’automne, avoir pour l’hiver, un plan d’économies qui implique tout le monde, mais ça commence par donner l’exemple dans nos grands secteurs et nos grandes administrations”, a-t-il expliqué.
De simples incitations chez les particuliers?
Faut-il également s’attendre à des contraintes chez les particuliers? Le gouvernement et certains dirigeants de grands groupes du secteur de l’énergie ont déjà demandé aux Français “un effort immédiat, collectif et massif”. Principales recommandations: ne pas laisser brancher ses appareils électriques ou ses lampes quand c’est “inutile”.
Soit de simples recommandations, sans contraintes, ni obligations, qui seraient dans tous les cas très difficiles à mettre en place, sauf à limiter le nombre de kilowattheures délivré en fonction de la taille des foyers ou de la taille de leur domicile. “La mobilisation générale, ça veut dire, oui, qu’il faut tous faire des efforts dans nos vies quotidiennes”, a expliqué Clément Beaune ce vendredi matin, rappelant que ”ça veut dire aussi les gros avant les petits”.
“Ce n’est pas une forme d’austérité énergétique, ce n’est pas une forme de punition, c’est juste reconnaître une situation difficile”, a-t-il ajouté.
Une mesure d’incitation est cependant déjà réclamée aux fournisseurs d’électricité par Agnès Pannier-Runacher. La ministre de la Transition énergétique a écrit à EDF et à ses concurrents pour leur demander de revoir leur grille tarifaire et mettre en place des contrats plus avantageux (“une offre à tarification dynamique”) pour les Français et les entreprises qui réduiraient leur consommation pendant les périodes de tensions du réseau.
“L’idée c’est de faire passer le message de l’incitation à ces groupes et dire aux Français que c’est aussi un moyen de faire des économies”, explique-t-on au ministère. Une forme de contrat gagnant-gagnant économiquement et écoresponsable, sans mesure punitive pour les Français.
À voir également sur Le HuffPost: Crise de l’énergie : en 1973, les (gros) efforts des Français pour éviter la pénurie