Un agenda social qui révèle les défis du quinquennat qui s’ouvre, puisque ces mouvements mettent le doigt sur des dossiers à très fort potentiel polémique. Parmi eux, la suppression du corps diplomatique qui avait fait couler beaucoup d’encre durant l’entre-deux tours. Un décret datant du samedi 16 avril et publié un jour après, le dimanche 17, au Journal officiel, entérine la suppression de deux corps constituant la hiérarchie du ministère des Affaires étrangères: celui des conseillers des affaires étrangères et celui des ministres plénipotentiaires.
Crise diplomatique
Ce qui ne passe du tout chez les fonctionnaires concernés qui, sur les réseaux sociaux, s’alarment du démembrement du corps diplomatique via le hashtag #diplo2metier. En plus de provoquer des remous au sein du prestigieux ministère, où l’on ne transige pas avec l’appartenance au corps diplomatique, cette réforme avait provoqué un tollé sur le plan politique. “La France voit détruire au bout de plusieurs siècles son réseau diplomatique. Le deuxième du monde. Les copains de promo vont pouvoir être nommés. Immense tristesse”, avait notamment réagi Jean-Luc Mélenchon.
Pour faire simple, on craint en interne que le savoir-faire diplomatique reconnu à travers le monde disparaisse au profit du copinage. “Il est vital de renoncer à la réforme, car elle va transformer profondément le corps diplomatique, à partir du moment où les plus beaux postes seront attribués pour des raisons non diplomatiques, au risque d’une grande politisation”, s’alarme l’ancien chef de la Diplomatie Dominique de Villepin. Plus inquiétant pour l’exécutif, plusieurs ambassadeurs ont fait savoir qu’ils participeraient à la grève. Ce qui n’est pas forcément le meilleur signal à envoyer au monde en pleine guerre en Ukraine.
De l’avis de plusieurs observateurs, la nomination au poste de ministre des Affaires étrangères de Catherine Colonna, ex-ambassadrice à Londres, peut être interprétée comme un gage donné aux diplomates après une première levée de boucliers. Reste que le dossier ne manquera pas de réveiller les procès en copinage déjà instruit au Quai d’Orsay à l’encontre d’Emmanuel Macron.
En août 2018, le gouvernement avait nommé par décret l’écrivain Philippe Besson (proche du chef de l’État) au poste prestigieux de consul de Los Angeles. Décision cassée par le Conseil d’État. La raison? Le poste est dévolu aux diplomates de carrière. Un précédent qui ne sera pas de nature à calmer les esprits des détracteurs de cette réforme, qui vise justement à faire sauter ces verrous.
Salaires et inflation
L’autre dossier qui perturbe ce début de second quinquennat est celui mis sur la table par les professionnels des secteurs de l’électricité et du gaz. Ce qu’ils veulent? Des négociations salariales dans le contexte de forte inflation observé ces dernières semaines. Comme nous l’écrivions mardi, l’inflation dépasse les 5%. Du jamais vu depuis 1985. Un dossier qui n’est d’ailleurs pas décorrélé des questions diplomatiques citées plus haut, puisque les sanctions contre la Russie (et plus précisément l’embargo sur le pétrole russe) ne devraient pas arranger la situation.
Les professionnels de ces secteurs entendent donc faire pression sur EDF et ses filiales Enedis et RTE pour obtenir gain de cause, sans forcément affecter les usagers sur les factures. “On demande une revalorisation de la grille du salaire national de base pour que les salariés de la branche des IEG (industries électriques et gazières) ne perdent pas en pouvoir d’achat, d’autant que les premiers niveaux de rémunération sont passés en dessous du Smic”, a indiqué à l’AFP Amélie Henri, secrétaire nationale CFE-Unsa énergies pour EDF. Ce qui intéressera forcément l’exécutif, doublement impliqué au titre de la lutte en faveur du pouvoir d’achat et de la maîtrise des prix de l’énergie.
Orpea et crise la dépendance
Enfin, la grève annoncée vendredi 3 juin dans les Ehpads Orpea, devrait (encore) jeter une lumière crue sur la crise de la dépendance en France. Un secteur toujours ébranlé par la sortie du livre-enquête Les Fossoyeurs, qui a provoqué un scandale et une prise de conscience nationale, au regard des bénéfices monstres engrangés par le géant du secteur au détriment de l’accueil (et parfois de la dignité) de ses pensionnaires.
La raison de ce préavis? Le non-versement de la prime d’intéressement. “Sacré culot pour cette nouvelle direction et ce nouveau DRH que d’agir ainsi face à des personnels aux petits salaires qui ont tant donné et continuent de donner”, s’indigne auprès de l’AFP Dominique Chave, secrétaire général de la CGT “santé privée”. Au-delà du seul cas d’Orpea, ce mouvement rappellera que le secteur est toujours en crise. Et pour cause, le Synerpa, principal syndicat des Ehpad privés, a réclamé ce mercredi au gouvernement un plan d’urgence pour que le secteur puisse recruter suffisamment de personnel, dans le but de pouvoir répondre à la demande cet été.
“Nous savons que dans ces périodes pré-estivales c’est très compliqué de recruter du personnel soignant, nous avons besoin et demandons des mesures fortes dès aujourd’hui”, a déclaré Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa, promettant un été “difficile”. Un dossier sensible de plus à ajouter sur la pile, déjà bien haute, d’Emmanuel Macron.
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