Un homme dont le portrait se précise d’heure en heure. Militaire formé à l’école française, il est devenu le bras armé d’une force anti-terroriste de plus en plus puissante en Guinée et est donc aujourd’hui à la tête d’un changement que la population réclamait depuis la deuxième réélection d’Alpha Condé fin 2020.
Pourtant, Mamady Doumbouya était un proche, ou du moins un fidèle du président déchu et l’une des principales figures militaires du pays. En octobre 2018, à l’occasion du soixantième anniversaire de l’indépendance de la Guinée, il était apparu pour la première fois aux yeux du grand public en défilant fièrement à la tête de son Groupement des forces spéciales (GFS), l’unité anti-terroriste dont il avait obtenu la création.
Un miliaire expérimenté et instruit
C’est cette troupe d’élite, dotée d’armes modernes et connaissant à la perfection le terrain -dans la capitale Conakry comme ailleurs dans le pays-, dont les hommes sont apparus au côté du lieutenant-colonel Doumbouya, cagoulés et lourdement armés, durant ses différentes prises de parole ayant suivi le putsch.
L’unité ne cessait de gagner en puissance ces derniers mois, au point même d’inquiéter certains responsables politiques. Le journaliste Bangaly Touré, qui a rencontré plusieurs fois Mamady Doumbouya, a expliqué sur France 24 que c’était particulièrement le cas au sein du ministère de la Défense.
Après ce parcours, l’officier s’est progressivement immiscé dans les cercles du pouvoir guinéen à partir de l’élection d’Alpha Condé, parvenu au pouvoir en 2010 en prenant la suite d’un coup d’État militaire survenu deux ans plus tôt. Le lieutenant-colonel est ainsi arrivé dans les sphères de décision sans avoir progressé petit à petit au sein de la hiérarchie de l’armée guinéenne, mais avec une expertise et une formation reçues à l’étranger, réussissant un coup de force en obtenant finalement la création de son GFS.
La force pour instaurer la démocratie réelle
Un passé qui lui permet aujourd’hui, après le putsch, de tenter de se démarquer des juntes militaires précédentes ou des pouvoirs déjà éprouvés par la population. C’est ainsi qu’il a affirmé au cours de ses différentes prises de parole répondre à une demande populaire en assumant le pouvoir. Une partie du peuple gronde en effet depuis qu’Alpha Condé a refusé fin 2020 de quitter la présidence comme le prévoyait la Constitution, pour s’offrir au moyen d’un référendum une troisième élection.
Dans une interview accordée à France 24, le soldat à la large carrure a par exemple expliqué vouloir organiser une transition vers une démocratie réelle, se positionnant en opposition au pouvoir déchu. “Un système qui n’est pas inclusif, qui ne permet pas à tous les Guinéens de se rassembler, c’est un système qui ne pourra pas déboucher sur la paix”, a-t-il déclaré.
Titulaire d’un Master 2 de défense et dynamiques industrielles de l’université parisienne de Panthéon-Assas, comme le rapporte l’AFP, Mamady Doumbouya a donc voulu marquer sa différence en évoquant Jerry Rawlings, arrivé par la force à la tête du Ghana dans les années 1980 après de pacifier le pays et d’instaurer une démocratie durable. Un homme que le lieutenant-colonel espère être un modèle et auquel il a repris cette phrase célèbre: “Si le peuple est écrasé par ses élites il revient à l’armée de rendre au peuple sa liberté.”
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