Publiée dimanche, cette enquête, à laquelle ont collaboré environ 600 journalistes, s’intitule Pandora Papers, référence à la légende de la boîte de Pandore. Elle s’appuie sur quelque 11,9 millions de documents provenant de 14 sociétés de services financiers et a mis au jour plus de 29.000 sociétés offshore.
Parmi les personnalités citées figurent la chanteuse colombienne Shakira, le mannequin allemand Claudia Schiffer ou la légende indienne du cricket Sachin Tendulkar. Apparaissent aussi les noms de l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, pour l’achat d’un bien immobilier à Londres, et de l’ancien ministre français Dominique Strauss-Kahn.
L’ex-directeur général du Fonds monétaire international (FMI), devenu consultant et conférencier, a fait transiter plusieurs millions de dollars d’honoraires par une société marocaine exempte d’impôts, selon l’enquête.
“Je suis résident fiscal marocain depuis 2013 et (…) j’y paye mes impôts à hauteur de 23,8 % de mes bénéfices, soit 812.000 euros pour les années 2018, 2019 et 2020”, s’est défendu DSK sur Twitter s’agaçant que “la méchanceté devient mensonge”. “Vos équipes de professionnels auraient pu vérifier que je suis résident fiscal marocain”, écrit-il à l’attention de l’émission “Cash Investigation”.
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Quand la méchanceté devient mensonge. Vos équipes de professionnels auraient pu vérifier que je suis résident fiscal marocain depuis 2013 et que j’y paye mes impôts à hauteur de 23,8 % de mes bénéfices, soit 812.000 euros pour les années 2018, 2019 et 2020.— DSK (@dstrausskahn) October 4, 2021
Selon Le Monde, 600 Français apparaissent dans l’enquête. Dans la plupart des pays, ces faits ne sont pas susceptibles de poursuites. Mais l’ICIJ dresse un parallèle entre le discours de certains dirigeants et leurs placements dans des paradis fiscaux.
Selon ces documents, le roi Abdallah II de Jordanie a créé au moins une trentaine de sociétés offshore, c’est-à-dire dans des pays ou territoires à fiscalité avantageuse, et acheté par leur biais 14 propriétés de luxe aux États-Unis et au Royaume-Uni, pour plus de 106 millions de dollars. Des “informations de presse inexactes, déformées et exagérées”, a riposté lundi le Palais royal.
Mis en cause également, le Kremlin a rejeté des “allégations infondées”. Selon l’ICIJ, Svetlana Krivonogikh, une femme présentée par des médias russes comme une ex-maîtresse du président Vladimir Poutine, a acquis en 2003 un appartement pour quatre millions de dollars à Monaco via des comptes offshore. D’autres proches du président sont également cités.
Le Premier ministre ivoirien Patrick Achi, qui contrôlait une société aux Bahamas jusqu’en 2006 au moins selon l’enquête, a démenti lundi toute “action illicite”. Dimanche déjà, le Premier ministre tchèque, Andrej Babis, s’était défendu d’avoir placé 22 millions de dollars dans des sociétés écran pour financer l’achat d’un château dans le sud de la France. “Je n’ai jamais rien fait d’illégal ou de mal”, a-t-il tweeté, “mais cela ne les empêche pas d’essayer de me dénigrer et d’influencer les élections législatives tchèques”, prévues vendredi et samedi prochain.
336 responsables politiques épinglés
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a fondé son image sur la lutte contre la corruption, a selon l’ICIJ mis en place à partir de 2012 un réseau d’entreprises offshore qui a servi notamment à acheter trois propriétés cossues à Londres. Un moyen, selon l’administration présidentielle ukrainienne, de se “protéger” contre les “actions agressives” du régime de l’ex-président pro-russe Viktor Ianoukovitch.
Au total, des liens ont été établis par l’ICIJ entre des actifs offshore et 336 dirigeants et responsables politiques de premier plan qui ont créé près de 1.000 sociétés dont plus des deux tiers aux Iles Vierges britanniques.
L’enquête pointe également le “rôle majeur dans l’évasion des taxes” du cabinet d’avocats panaméen Alcogal (Aleman, Cordero, Galindo & Lee), des accusations rejetées par l’entreprise.
Pour la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, ces pratiques sont “complètement inacceptables” et l’UE doit “travailler davantage” sur la question.
Entité indépendante, l’ICIJ compte des journalistes d’investigation dans plus de 100 pays et territoires, avec quelque 100 médias partenaires. Elle s’est fait connaître en 2016 avec les Panama Papers, enquête appuyée sur quelque 11,5 millions de documents provenant d’un cabinet d’avocats panaméen.
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