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Phoebe Dynevor qui joue le rôle de Daphné Bridgerton et Regé-Jean Page incarnant Simon Basset dans “La chronique des Bridgerton” sur Netflix.

SÉRIE – La Régence anglaise est une période de l’histoire britannique qui a inspiré de nombreux auteurs de fictions en livre, au cinéma ou au théâtre. La dernière en date c’est “La chronique des Bridgerton”, une série Netflix de Shonda Rhimes, connue notamment pour avoir réalisé “Grey’s Anatomy”. Le HuffPost a interrogé une spécialiste de la littérature britannique ancienne Lise Guilhamon, pour connaitre son avis.

Un peu d’Histoire britannique d’abord. Au sens strict, la Régence est une période très courte, elle dure de 1811 à 1820.  À ce moment, le Roi George III souffre d’une maladie mentale lui donnant des accès de folie, il n’est donc plus apte à assurer ses fonctions. C’est alors, son fils ainé, le Prince de Galles autrement dit le Prince Régent qui le remplace pendant pendant neuf jusqu’à sa mort. Cette décennie est caractérisée par l’excès de l’aristocratie. Dans le domaine de la culture, la période est parfois plus longue débutant dès la fin du 18e siècle et le début du 19e siècle parfois.

Si William Tackeray est officiellement le premier à trouver son inspiration dans la période de la Régence avec son roman Vanity Fair publié en 1846, Georgette Heyer, quant à elle, confirme le genre littéraire de la “Regency romance” à part entière dans les années 1940. En effet, cette dernière est connue pour ses romans Regency Buck ou An Infamous army aux détails minutieux sur la vie sous la “Regency”. Elle a elle-même servi de modèle aux futurs auteurs de fictions.

“Un aboutissement d’idées du passé”

La Régence britannique, même si elle a été une “période de flottement” entre deux règnes, n’est pas une période de transition soudaine selon l’historienne. C’est plutôt “un continuum de l’époque géorgienne du 18e siècle”. Elle est la suite logique d’idées sociales et économiques qui étaient de plus en plus répandues. Durant l’ère géorgienne, on commence à parler de l’abolition de l’esclava, du féminisme, des sentiments, mais aussi de la modernisation industrielle. Finalement, d’après Lise Guilhamon, la Régence “est l’aboutissement d’idées du passé”.

Au niveau culturel, on assiste à plusieurs nouveautés: “La question de la sensibilisation, mais aussi les mouvements esthétiques du Sublime ou du Beau vont trouver leur forme d’expression la plus forte durant cette période”, précise la docteure en littérature britannique.

S’identifier dans les personnages

Cette modernisation économique, culturelle et démocratique des années 1811-1820 permet aux auteurs comme aux lecteurs et téléspectateurs de facilement s’identifier aux personnages. D’après Lise Guilhamon, cette période correspond en fait au “début de la modernité telle qu’on la connait aujourd’hui”. D’où son côté universel.

La Régence britannique “est reconnaissable comme suffisamment proche de nous par comparaison à la société du 17e siècle ou du début 18e siècle”. Et à la fois, “il n’y avait pas de téléphone portable, il fallait s’envoyer des lettres, la société était pleine de contraintes”. De 1811 et 1820, la haute société est de plus en plus codifiée. Outre la classe sociale d’appartenance, une importance grandissante est accordée à l’apparence physique et aux bonnes manières. Tout repose sur des conventions.

Et cela inspire rapidement les auteurs comme Jane Austen, mondialement connue pour ses comédies romantiques dont Orgueil et préjugés publié en 1813, ou William Tackeray avec son roman Vanity fair.

Un genre “sur-littérarisé”

Selon Lise Guilhamon, cette décennie “n’est pas seulement une période qui a existé, mais une période qui devient littérairement un symbole”. Elle s’inscrit comme “un lieu codifié” pour les écrivains.

Au 20e siècle, Georgette Heyer et Barbara Cartland confirment les codes du genre de la “Regency romance”. Mais, il existe toujours un décalage entre les attendus de la société de l’époque et des personnages qui, eux, sont presque toujours plus modernes.

D’après l’historienne, ces décalages par rapport à la réalité que l’on aperçoit dans les fictions récentes comme dans “La chronique de Bridgerton” sur Netflix sont dus au phénomène de “sur-littérarisation qui fonctionne par répétition”. Autrement dit, il y a tellement d’auteurs qui ont couvert la période de la Régence anglaise que “ce n’est plus un monde tel qu’il existait vraiment, mais c’est un monde qui est toujours déjà écrit”.

Finalement, la vision qu’ont les lecteurs et téléspectateurs de la Régence anglaise “est en partie nourrie par celle des Regency romance dont les adaptations d’Austen sur la BBC et les codes qui y sont représentés”, explique-t-elle. Ce qui entraîne bon nombre d’inexactitudes et d’anachronismes. Jane Austen déjà dans ses romans ne dépeignait pas la réalité, car elle représentait seulement la classe supérieure de la société.

Et plus l’époque est racontée et scénarisée, plus la tâche des auteurs et réalisateurs actuels est simplifiée: “À force d’être réécrite, ils ont toutes sortes d’associations leur viennent à l’esprit. Cela leur permet d’ailleurs d’aller beaucoup plus vite lorsqu’ils écrivent, car les règles sont déjà en place”.

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