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Emmanuel Macron à la Convention Citoyenne pour le Climat au Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) à Paris, le 10 janvier 2020. (Photo YOAN VALAT/POOL/AFP via Getty Images)

Pour ceux qui ignoreraient la littérature de Christophe et le sapeur camember, on rappellera le célèbre aphorisme lancé par le père Fenouillard: “Quand la borne est franchie, il n’est plus de limites.” C’est ce qui nous arrive avec la palanquée de textes destructeurs du droit de l’environnement et de la démocratie environnementale dont un des premiers à être examiné par le Parlement sera la réforme du CESE. On aurait pu imaginer qu’après les gilets jaunes, après le succès de la Convention Citoyenne pour le Climat, le gouvernement aurait à cœur de transformer le Conseil Economique Social et Environnemental en grande chambre de la société civile dotée de réels pouvoirs. Il faudra attendre un autre gouvernement et un autre président pour qu’il en soit ainsi.

Le projet présenté par le gouvernement, sous prétexte de renforcer les pouvoirs de cette troisième assemblée, ne vise en réalité qu’à réduire encore le peu de ce qui reste des contre-pouvoirs en matière environnementale.

Ce n’est évidemment pas la question de la réduction du nombre de membres qui pose problème même si la part des représentants de l’environnement et des collectivités territoriales reste congrue par rapport à celle du monde économique. Le problème est ailleurs.

Tout d’abord, il faut souligner le fait que le CESE ne pourra donner des avis que pour autant qu’on le lui demandera; en effet, l’auto-saisine sur les projets de loi est refusée au motif qu’une telle faculté présenterait des difficultés de mise en œuvre et changerait la nature de cette institution. Mais, d’une part c’est largement inexact, car donner un avis n’a jamais contraint celui qui le reçoit à le suivre et d’autre part l’objectif est précisément de changer l’institution pour en faire réellement une représentation forte de la société civile. Ainsi, le Conseil Economique Social Environnemental ne pourra-t-il au titre de l’article 2 qu’être saisi si dans sa “haute sagesse” le gouvernement le souhaite ou si le Parlement le demande.

En second lieu, est présentée comme une avancée majeure le fait que le Conseil puisse organiser à sa propre initiative ou à la demande du gouvernement des consultations publiques. Sauf qu’en réalité, c’est une grande régression environnementale qui est là programmée puisqu’elle contient en germe la disparition de la Commission Nationale du Débat Public. Celle-ci, qui a fait un travail tout à fait intéressant pour développer les conférences de consensus, a eu le grand malheur de déplaire en rappelant des principes de base lors de l’organisation des débats liés à la crise des gilets jaunes. Il faut donc détruire ce contre-pouvoir “nocif” et la meilleure manière n’est-elle pas de donner sans aucune méthodologie et aucune contrainte au CESE la possibilité d’organiser des débats publics rendant bien évidemment à terme inutile une instance dont c’est précisément l’objet.

Mais comme il existe probablement encore un risque que le CESE puisse ne pas être l’organe d’enregistrement que l’on attend de lui, il faut aussi réduire le temps donné pour émettre un avis en cas de procédure simplifiée et mieux encore en diminuer la possibilité à l’assemblée plénière de se prononcer.

La cerise sur le gâteau est probablement l’article 6 qui permet au gouvernement de ne pas consulter les organismes prévus par la loi ou le règlement dès lors que le CESE a été consulté sur un projet de loi. Ainsi, toute une série d’organismes qui ont pu marquer leur opposition ou leur réserve ne pourront-ils plus le faire puisqu’ils ne seront tout simplement plus consultés. Seules les autorités administratives indépendantes, les commissions relatives au statut des magistrats des fonctionnaires et des militaires ainsi que les collectivités territoriales échappent à cette disparition.

Ainsi, une fois encore, le gouvernement, sous couvert d’améliorer et de renforcer le conseil économique social et environnemental, procède à une mise en coupe réglée des organismes et des règles de la démocratie environnementale. Jusqu’où iront-ils dans cette destruction à l’échelle industrielle des conquêtes environnementales des quatre dernières décennies?

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