À partir de ce moment-là, le numerus clausus pour la formation des médecins ne cessa de diminuer drastiquement chaque année.
Ce calcul simpliste, non seulement ne prenait pas en compte d’autres facteurs, tel que le fort taux de chômage qui sévissait dans ces années-là et qui, de ce fait, grevait d’autant les recettes de la Sécurité sociale ayant pour conséquence de creuser ce fameux “trou”. Mais, plus grave, il ne semblait se baser sur aucune projection démographique à plus long terme, sachant qu’il faut en moyenne dix ans pour former un médecin.
Fermetures et pénuries
De même, en raison de la pénurie de médecins généralistes, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à ne plus avoir de médecin référent, ils peinent également à trouver un rendez-vous chez un spécialiste et lorsqu’ils en ont trouvé un, ils doivent patienter encore pendant de nombreux mois avant leur rendez-vous.
Ces phénomènes entraînent une perte de chance pour les patients qui, à défaut d’obtenir rapidement un rendez-vous médical, seront mal ou non soignés.
Des solutions d’urgence à prendre
- La pyramide des âges et la génération des baby-boomers: soixante-dix ans plus tard, ils sont devenus du fait de leur âge, de plus grands consommateurs de soins médicaux;
- Cette même génération a fourni également bon nombre de professionnels de santé désormais en âge de prendre leur retraite, ce qui a pour effet de creuser le déficit de l’offre de soins;
- La féminisation de la profession: les femmes assument non seulement leurs maternités, mais aussi, aménagent plus souvent que les hommes leur temps de travail pour se consacrer à leurs enfants. Ceci n’est pas un propos sexiste, étant moi-même une femme médecin mère de deux enfants;
- Une médecine de plus en plus technique, sophistiquée et hyper spécialisée, qui offre une palette de soins plus large à la faveur des patients, mais qui nécessite aussi davantage de praticiens formés dans ce sens pour pouvoir la pratiquer;
- Des internes qui ont acquis des droits, ce qui est une bonne chose, comme le repos compensateur après une garde, ou un nombre maximum de trois gardes mensuelles, mais ce qui contribue à accentuer la pénurie;
- De jeunes médecins formés, rappelons-le, aux frais de l’État, qui une fois leurs études terminées, ne veulent pas exercer ni à l’hôpital, ni en libéral, et préfèrent se contenter de quelques jours par mois de remplacements. Il est étonnant de constater qu’à peine 10% des jeunes médecins s’installent en libéral! Quant aux postes non pourvus dans les hôpitaux, on les compte par centaines;
- La crise du Covid, qui a épuisé les soignants au point d’en inciter beaucoup à changer de métier ou à prendre leur retraite prématurément;
- Cessons de brandir la menace de mesures coercitives visant à obliger les jeunes médecins à s’installer en zones sous-dotées. Si cette opposition zones sous-dotées/zones sur-dotées était encore vraie il y a seulement 5 ans de cela, ce n’est plus du tout le cas actuellement et en France (métropole comme outre-mer), il n’y a plus que des zones sous-dotées!
- Le creux de la vague en termes de pénurie n’est pas encore atteint, ce qui signifie que la situation va continuer de s’aggraver jusque vers 2030, là où selon les projections actuelles, le pire serait atteint… à moins d’une nouvelle crise sanitaire d’ici là, qui pourrait encore aggraver les choses.
Voilà donc un certain nombre de pistes de réflexion sur lesquelles il devient très urgent de se pencher, si l’on souhaite maintenir un niveau sanitaire correct pour nos concitoyens, niveau sanitaire qui ne cesse de se dégrader au fil de ces dernières années, faute d’un nombre suffisant de professionnels de santé formés pour assumer ce service public.