J’ai passé les dernières semaines avec une PS5 à la maison et, pour être tout à fait honnête avec vous, face à la sortie de la console, ma première réaction de critique serait d’inviter les gens à attendre un peu avant de l’acheter. Il n’y a pas tant de jeux disponibles que ça et la plupart sont également jouables sur PS4. Je vous dis ça alors qu’on est en plein dans une pandémie mondiale et que l’économie a connu des jours meilleurs. L’idée de mettre 500 balles de côté en cas de coup dur peut donc sembler cohérente aux yeux de certains. Alors que j’écris ces lignes, je n’ai toujours pas joué à des jeux comme Demon’s Souls, et des parties importantes de l’interface sont encore sous embargo. Un exemple : pour le moment, Sony ne souhaite pas que je parle du store. Et les parties de l’interface que je suis autorisé à évoquer n’ont rien de très foufou – ça ressemble encore à une version beta.
Par contre, les jeux auxquels j’ai joué claquent sincèrement. Miles Morales est vraiment amusant et très beau quoiqu’un peu répétitif. Astro’s Playroom est une superbe mise en valeur de la manette DualSense ainsi qu’un très bon jeu de plates-formes avec des tas de trucs à découvrir qui ne manqueront pas de titiller votre nostalgie. Bugsnax est une surprise aussi étrange qu’agréable, un jeu dans lequel il faut « attraper » des créatures et il est question de puissance dégagée par la communauté. Nonobstant l’expérimentation niveau manette dans Astro’s Playroom, aucun des jeux n’offre de véritables sensations next-gen, probablement parce que notre définition même de jeu « nouvelle génération » est en proie à de sérieux changements.
Avant, j’avais l’habitude de passer des heures à parcourir les pages de Electronic Gaming Monthly, rêvant des jeux vidéo du futur. C’était une époque où l’annonce d’une nouvelle console augurait de bouleversements radicaux. Sa sortie était comparée à un bond quantique en avant dans le domaine de la technologie et de la représentation, avec des changements qui vous sautaient aux yeux immédiatement ; des blocs de pixels en 2D donnant naissance à un monde plus net, à l’arrivée d’une nouvelle dimension avec la 3D ou l’apparition d’un nouveau niveau de détails avec la haute définition.
« Les jeux vidéo s’améliorent, c’est indéniable, mais ces améliorations sont de plus en plus marginales. Elles facilitent la vie du joueur mais restent cantonnées à cette catégorie de choses que vous vous procurerez « éventuellement »
Certains de mes meilleurs souvenirs d’enfant et d’adolescent me ramènent devant un magasin de jeux vidéo, dans le froid de l’hiver, les doigts gelés au fond des poches et des étoiles plein la tête, attendant de pouvoir m’acheter une nouvelle console de jeux. L’attente inconfortable alors qu’un employé distribue les tickets de réservation – en fonction du nombre de consoles en stock –, ce pauvre bougre qui repart le cœur lourd « désolé, on est sold out ». Je n’avais pas encore l’âge d’aller camper avec mes potes que j’avais déjà engrainé mon petit frère pour qu’on mette en commun l’argent qu’on recevait à Noël, et qu’avec ce pactole relatif, on s’achète une nouvelle console. La dernière fois que j’ai monté cette combine, c’était pour la toute première PlayStation. Je me souviens de la réaction de mon frère lorsqu’il s’est rendu compte qu’on n’avait finalement qu’un seul cadeau à ouvrir le jour de Noël. Il s’était tassé sur une chaise, le regard sombre, observant nos cousins déballer les leurs.
À chaque nouvelle console, j’avais l’impression que le futur était arrivé. Cette sensation grisante, ce « waouh, mec ! », je ne les ai pas eus depuis ma première fois à Wii Sports quand je me suis rendu compte du nouveau champ de possibles qui s’ouvrait devant mes yeux.
Mais les nouvelles générations ne sont plus ce qu’elles étaient. Les jeux vidéo s’améliorent, c’est indéniable, mais ces améliorations sont de plus en plus marginales. Elles facilitent la vie du joueur mais restent cantonnées à cette catégorie de choses que vous pouvez balayer d’un revers de main ou « éventuellement » vous procurer une fois que le prix a baissé.
L’idée de Sony avec la PS5, c’est que tous ces petits changements, destinés aux joueurs mais également aux développeurs, vont s’accumuler dans le temps pour, finalement, changer la façon dont on fait les jeux. Il est encore trop tôt pour dire si c’est un pari gagnant.
Le disque dur de la PS5, qui a fait l’objet d’une publicité folle, est vraiment rapide. Rien à redire. Les temps de chargement n’ont pas disparu, mais il y en a beaucoup moins, et c’est vrai que c’est agréable. La 3D audio est une belle idée sur le papier, mais dans les faits, je ne saurais pas dire à quel point ça améliore vraiment l’expérience du joueur. La résolution 4K, dont j’ai longtemps pensé qu’elle serait un pétard mouillé, un truc qu’on remarquerait à peine, s’avère être assez visible. C’est une amélioration notable. Mais vous pourrez survivre sans. La manette DualSense, avec tout le génie expérimental qui l’entoure, est un véritable bonheur, contrairement à la DualShock 4, que je regardais avec un certain mépris à chaque fois que je devais jouer avec (c’était vraiment un agacement constant, notamment parce que j’ai souvent été très intéressé par les expériences narratives que proposait Sony).
Arrêtons-nous sur la 4K juste un instant. J’ai toujours été très dubitatif face à la 4K, notamment du fait de mon extrême indifférence quant aux éléments techniques des jeux vidéo, comme la fréquence d’images par exemple. Et pourtant, je sais que certaines personnes trouvent ça supérieurement important. Je pense, bien évidemment, qu’une fréquence d’images supérieure vaut mieux qu’une fréquence inférieure, mais j’entends me satisfaire et me débrouiller avec certaines choses qui, pour d’autres, semblent tout à fait inacceptables ou frustrantes. C’est peut-être la jalousie d’un vieux partisan du jeu sur console qui s’exprime, refoulant cette vieille colère envers les joueurs PC qui n’avaient qu’à acheter une nouvelle carte graphique ou à bidouiller les paramètres pour que leurs jeux tournent mieux.
D’un autre côté, j’ai craint que le fait d’introduire une machine 4K chez moi ne vienne rompre le charme et que, tout d’un coup, je ne sois hautement contrarié devant les écrans sans 4K qui existent encore sur notre belle planète (à l’heure où j’écris ces lignes, mon écran principal est un vidéoprojecteur, et les vidéoprojecteurs 4K restent prohibitivement hors de prix). Cette parcelle d’ignorance présente dans ma vie m’arrangeait bien, je le reconnais. Et j’ai finalement décidé de la remplir de connaissance avec l’arrivée de cette nouvelle génération de consoles.
Ainsi, ma première expérience sur une PS5 a aussi été ma première expérience avec de la 4K.
Pour être tout à fait honnête, au début, je n’ai pas été frappé par la différence. Les jeux avaient un côté super chiadé et nouveau. Mais c’est bien le minimum que l’on attend lorsqu’on joue sur une nouvelle console et qu’on a casqué 500 balles. La 4K n’est pas une révolution folle comme a pu l’être le passage de SD à HD. (J’estime pour ma part que la HDR et la nouvelle dimension d’éclairage que cela propose est, dans l’ensemble, plus impressionnante.) Mais à un moment, alors que je capturais quelques images de Astro’s Playroom, j’ai jeté un œil au téléviseur et je me suis entendu penser « c’est pas un peu flou, là ? » Il s’est avéré que la vidéo capturée forçait le téléviseur à diffuser en 1080p et, finalement, j’ai compris : J’arrivais enfin à voir la différence entre du 1080p et du 4K. Et… c’est clairement autre chose. Le vide de mon ignorance avait été comblé par une bonne dose de connaissance acquise à travers l’expérience. Et j’y voyais clair désormais. J’y voyais en 4K.
Une expérience qui s’est avérée moins enthousiasmante en jouant à plusieurs jeux PS4 sur la PS5.
God of War, comme pas mal de jeux actuels, dispose d’un mode « performance » qui sacrifie la résolution au profit d’une fréquence d’images supérieure. Ce mode est vraiment vilain sur mon téléviseur 4K. Le meilleur moyen de le décrire serait peut-être de dire que c’est pixélisé. Mais dans l’autre mode – celui qui diffuse en 4K – c’est la fréquence d’images qui n’est vraiment pas folle. Je me trouve donc coincé entre deux mondes indésirables. Quand j’ai connecté ma PS5 sur un écran 1080p, God of War était graphiquement pas mal, mais j’entends passer la grande majorité de ma relation avec ma PS5 sur la nouvelle télé. Du coup, c’est un problème.
Une PS5 et brancher une nouvelle carte graphique sur un PC sont deux choses bien différentes. Si la deuxième option va améliorer tous les vieux jeux, comme par magie, la première ne peut pas faire de miracle.
Cela s’est avéré moins grave avec le jeu Days Gone. Je n’ai pas vraiment accroché la première fois que j’y ai joué, mais le développeur Sony Bend a vraiment beaucoup bossé pour le faire tourner de manière optimale sur PS5. Je ne suis pas un spécialiste donc ce qui se passe sous le capot est un mystère, mais je peux vous affirmer que le jeu est vraiment magnifique. Comme s’il avait été fait directement pour la PS5. Je n’ai pas eu à choisir entre performances et résolution, le jeu est juste beau.
À force de poncer la version PS5 de Days Gone, je me suis mis à espérer que tous jeux allaient avoir la même gueule.
Mais une PS5 et brancher une nouvelle carte graphique sur un PC sont deux choses bien différentes. Si la deuxième option va améliorer tous les vieux jeux, comme par magie, la première ne peut pas faire de miracle. Bloodborne, par exemple, ne va pas se dérouler devant vos yeux ébahis en 60 images par seconde. Je sais bien que ce n’est pas comme ça que fonctionne la PS5, mais voir certains jeux bénéficier d’un relooking de folie et pas d’autres a quelque chose de déconcertant.
Je ne suis pas de ceux qui pensent que la 4K c’est du quitte ou double, et on peut assurément jouer sur cette nouvelle génération de consoles avec un écran qui ne soit pas au sommet de la technologie. Le disque dur de la console reste très rapide. La manette demeure très chouette. Et pour vous parler de concret, le temps que j’ai passé à jouer à des jeux PS5 sur mon écran 1080p était tout à fait agréable.
Mais c’est vrai le charme a été rompu et j’en suis déjà à attendre les soldes pour convertir tous mes écrans en 4K.
Le plus agréable de cette PS5, c’est de jouer dessus. Parce que dès l’instant où vous essayez d’approcher l’interface utilisateur, les premiers maux de tête arrivent. On comprend soudain pourquoi Sony a mis autant de temps à dévoiler à quoi ressemble la navigation dans les menus de la PS5. C’est absolument laborieux et excessivement complexe. Et à mon humble avis, Sony devra revoir tout ça dans les prochains mois.
Tout cela pourrait, je pense, se résumer en un point : l’une des actions les plus fondamentales que l’on puisse entreprendre lorsque l’on interagit avec une console de jeux, c’est l’allumer et l’éteindre. Les dernières générations de consoles ont vu arriver une nouvelle option qui, à mon sens, n’a pas reçu la considération qu’elle méritait, je veux parler du fait de pouvoir allumer la console par la simple pression d’un bouton sur la manette. Cette option est toujours présente sur la PS5. Mais ça se complique quand on veut éteindre la bête. Sur les machines de la génération précédente, la Xbox One et la PS4, il suffisait de maintenir le bouton central de la manette, et la machine s’éteignait vite fait, bien fait.
Cette interaction simple reste réalisable sur la nouvelle Xbox, mais pas sur PS5. Sur la nouvelle machine de Sony, en appuyant sur ce bouton, vous ouvrez une nouvelle barre d’activité, là où vous pouvez voir les trophées ou chercher des indices, et vous accédez également à un centre de contrôle qui propose plusieurs options faciles d’accès comme changer de jeu, voir les notifications, votre liste d’amis, etc. C’est super cool. Mais c’est aussi là qu’on éteint la machine. C’est même la seule façon de le faire. Sur PS5, si vous tenez le bouton PlayStation appuyé, cela vous renvoie sur l’interface principale de la console, là où se trouvent vos applis et vos paramètres.
Ainsi, à chaque fois que vous voulez éteindre la console, il faut appuyer sur un bouton, faire défiler vers le bas et faire défiler sur un côté. Ça peut paraître négligeable, insignifiant même, mais ça vient rajouter de la complexité là où il n’y en avait pas. Et c’est agaçant.
C’est d’ailleurs très représentatif de l’interface globale de la PS5. À première vue, ça a l’air tout à fait classique et dans la lignée de la PS4. Mais les changements qui ont été apportés, aussi bien intentionnés soient-ils, s’avèrent problématiques.
Le nouveau système d’indices, par exemple, s’est révélé très pratique pour ranger les items à collectionner de Astro’s Playroom. Mais pour trouver comment épingler la vidéo indice sur le côté de l’écran pendant que je jouais, puis pour la supprimer une fois que j’avais terminé, je me suis arraché les cheveux bien plus que nécessaire. On a parfois du mal à comprendre quel bouton remplit quelle fonction dans les couches interconnectées de la PS5.
Et il y a tout un tas d’autres petits détails du même acabit. On n’a par exemple plus accès à l’historique des patchs pour un jeu. On peut le voir pour les jeux PS4 (si ça vous intéresse) mais pas pour les jeux PS5. Il arrive également que l’on télécharge, par accident, la version PS4 d’un jeu qui est dispo pour PS4 et PS5, parce que, pour une raison que je n’arrive pas encore à comprendre, la PS5 vous permet de télécharger la version PS4 d’un jeu. À la différence de la Xbox, PlayStation les considère comme des entités distinctes, et non pas un seul et même jeu.
La bizarrerie va encore plus loin. Avec le jeu Bugsnax, l’interface de la version PS5 que j’avais téléchargée me proposait fréquemment de télécharger la version PS4. Pour régler ce problème, j’ai dû me plonger dans un menu non identifié et forcer la machine à faire tourner la version PS5 du jeu.
C’est un peu comme si l’interface n’avait pas été assez testée avant d’être lancée dans le grand bain.
Cela dit, il faut être honnête et reconnaître qu’il y a également bon nombre de points positifs. C’est sympa de voir un trophée apparaître pendant qu’on joue et pouvoir accéder à ce qu’on a débloqué d’un simple clic sur le bouton PlayStation. Pas besoin de quitter le jeu, les informations correspondant au trophée apparaissent en transparence sur l’écran en temps réel.
N’étant pas du genre à chasser les trophées, si j’en viens à dire tout le bien que je pense des infos liées aux trophées, c’est qu’il est sans doute grand temps de conclure.
Ça fait beaucoup de mots pour répondre à une simple question. Résumons. Comment est l’expérience vidéoludique sur cette machine ? Très agréable, merci. C’est une nouvelle bête plus puissante sur laquelle on peut faire tourner des jeux plus puissants. On pourrait presque dire que le reste n’a aucune importance. Peut-être que personne d’autre ne profitera de la DualSense et que la 3D audio fera l’objet d’une note intéressante sur Wikipédia. Je pense en tout cas que la PS5 est une console itérative dans un monde où les nouvelles consoles sont un peu comme les téléphones et les ordinateurs, à peu près la même chose, mais en mieux.
En conclusion, sans les fioritures, la PS5 serait une bonne machine pour jouer à des jeux vidéo. Ça tombe bien, c’est ce qu’elle est.
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