À l’origine de cette histoire relayée par Le Monde ce vendredi 19 mars, il y a tout d’abord un déplacement prévu par le groupe d’échanges France-Taïwan du Sénat sur l’île sous tutelle chinoise.
Informée de ce projet, l’ambassade chinoise en France a fait savoir “ses graves préoccupations à cet égard”. “Une visite du groupe d’échange et d’étude Sénat-Taïwan dans la région de Taïwan violera manifestement le principe d’une seule Chine et enverra un signal erroné ‘aux forces indépendantistes de Taïwan’. La Chine y est fermement opposée”, peut-on ainsi lire dans la lettre adressée à l’un des sénateurs le 18 février.
Antoine Bondaz, chercheur spécialiste de la Chine à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et directeur d’un projet baptisé “Taïwan sur la sécurité et la diplomatie”, a immédiatement dénoncé une “interférence”.
L’affaire est finalement remontée jusqu’au Quai d’Orsay, qui a répliqué que “les parlementaires français décident librement de leurs projets de déplacement et de leurs contacts.” Ce qu’Antoine Bondaz n’a pas manqué de faire remarquer à l’ambassade le 18 mars.
C’est ce tweet qui lui a valu de se faire traiter de “petite frappe” par la représentation de Pékin. Les relations entre le gestionnaire du compte et le chercheur étaient déjà tendues après de nombreuses passes d’armes et le chercheur avait d’ailleurs été bloqué.
Après m’avoir bloqué il y a un an, que de preuves d’amour, @AmbassadeChine
Je comprends que vous n’appréciez pas la contradiction et la mise en lumière de vos stratégies de désinformation et d’influence
Mais ne perdez pas vos nerfs, svp
PS: j’attends mieux des prochains tweets pic.twitter.com/h3u8BAB6Fd
— Antoine Bondaz (@AntoineBondaz) March 19, 2021
“Petite frappe est une insulte assez “soft”, et plutôt contre-productive. Elle est un moyen, à travers moi, d’attaquer les positions françaises. Et l’ambassadeur ne s’adresse pas aux Français, mais directement à Pékin”, a réagi l’intéressé auprès du Monde, qui a d’ailleurs ironiquement repris l’appellation dans sa biographie sur Twitter.
La “convocation immédiate” de l’ambassadeur réclamée
Après la publication visant Antoine Bondaz, plusieurs eurodéputés ont interpellé le ministre des Affaires Étrangères Jean-Yves Le Drian. L’élu Raphaël Glucksmann a ainsi réclamé la “convocation immédiate” de l’ambassadeur chinois Lu Shaye, tandis que François -Xavier Bellamy appelait le ministre à “ne pas laisser passer” cette nouvelle sortie polémique.
Le chercheur a aussi reçu le soutien de Nathalie Loiseau, également eurodéputée.
Si nos dirigeants ont un peu de dignité et de sens de l’Etat: convocation immédiate de l’Ambassadeur et grosse explication de texte genre «si vous continuez à nous pisser dessus, vous retournez direct en Chine.»
A un moment, il ne faut plus baisser les yeux. Avoir la nuque raide. pic.twitter.com/uDtQdbo17Y— Raphael Glucksmann (@rglucks1) March 19, 2021
Après avoir menacé les parlementaires français qui iraient à Taïwan, l’Ambassade de Chine insulte un chercheur reconnu, pour avoir rappelé que nous n’obéissons pas à Pékin. Cher @JY_LeDrian, ne laissez pas passer cela : ce serait lâche, et dangereux. Plein soutien @AntoineBondaz. pic.twitter.com/TdHwSbzvEP
— Fx Bellamy (@fxbellamy) March 19, 2021
Je renouvelle mon soutien @AntoineBondaz et rappelle à l’@AmbassadeChine que la ?? qui l’accueille respecte les chercheurs et chérit la liberté. « Petite frappe » : quand l’ambassade de Chine à Paris s’en prend à un chercheur français https://t.co/MGOwDI1FC3
— Nathalie Loiseau (@NathalieLoiseau) March 19, 2021
Ces dérapages de l’ambassade de France sur Twitter sont loins d’être nouveau. En avril 2020, l’ambassadeur Lu Shaye avait ainsi été convoqué par le ministre des Affaires Étrangères Jean-Yves Le Drian pour des propos dénigrants les soignants français.
Un mois plus tard, un dessin caricatural épinglant les États-Unis avait aussi étonné, l’ambassade affirmant par la suite que son compte avait été “falsifié”.
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