La France compte de 4,8 à 7 millions de logements considérés comme des passoires thermiques (classes F et G), selon les sources, et 12 millions de ménages en situation de précarité énergétique.

Depuis près de vingt ans, la rénovation énergétique des logements est reconnue comme un des moyens les plus efficaces non seulement pour lutter contre les changements climatiques, mais également contre la précarité énergétique et ses impacts.

Tous les scénarios de neutralité carbone le confirment : sans rénovation complète de plusieurs centaines de milliers de logements par an, les objectifs climatiques ne peuvent être atteints. La rénovation des logements est donc un enjeu environnemental et social de première importance.

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Après moult lois et dispositifs d’accompagnement successifs, nous avions atteint il y a quelques mois une situation décente, si ce n’est suffisante : dispositif imparfait mais stabilisé de DPE (étiquette énergie des logements), interdiction de louer les passoires énergétiques, encouragement aux rénovations globales.

Hélas, c’était sans compter les forces historiques de réaction, autrefois appelées le « gang des grille-pains », en référence au surnom donné aux convecteurs électriques.

Encourager l’« électrification » du chauffage

En effet, de façon récurrente, on voit réapparaître une puissante vague d’influence visant à trafiquer les paramètres « techniques » afin de non pas rénover les logements et installer des modes de chauffage performants comme les pompes à chaleur (PAC), mais de simplement « décarboner ».

Cela signifie, en pratique, encourager la simple « électrification » du chauffage, y compris potentiellement avec des équipements électriques moins performants que les PAC, et sans travaux de rénovation.

Le « gang des grille-pains » a fait son retour et menace aujourd’hui la politique de rénovation

Cette offensive a fait son retour au cœur de l’hiver et menace aujourd’hui la politique de rénovation. Cette fois-ci, il ne s’agit plus seulement de s’attaquer frontalement au DPE, mais à un coefficient méconnu : le coefficient en énergie primaire ou CEP, encore appelé « facteur d’énergie primaire » dans le droit européen.

Le CEP est un indicateur technique qui permet de mesurer l’efficacité globale d’une chaîne d’approvisionnement, entre l’énergie puisée dans l’environnement (énergie primaire : le puits de pétrole, la mine d’uranium, l’eau de la rivière, etc.) et celle restituée au consommateur final (énergie finale : le carburant à la pompe, les kWh ou les m3 de gaz facturés, etc.).

Il est autour de 3 pour les centrales thermiques (il faut environ 3 kWh d’énergie primaire pour produire 1 kWh d’électricité) et proche de 1 pour l’éolien, le solaire photovoltaïque ou l’hydraulique.

C’est normalement une valeur représentant l’état du système énergétique, qui décroît avec la pénétration des énergies renouvelables. Le système électrique français est aujourd’hui à 2,5, même si dans le DPE, le CEP est fixé pour l’instant à 2,3 afin de tenir compte de l’évolution attendue à moyen terme.

Manipulation mathématique

Mais le gouvernement envisagerait de le fixer arbitrairement à 1,3 en supprimant du calcul les pertes de chaleur des centrales nucléaires… Notons au passage que ce ne serait pas compatible avec la directive européenne sur les bâtiments, et qu’il conviendrait alors de revoir notre taux d’indépendance énergétique « mathématiquement » évalué à 50 % – grâce, justement, aux pertes de chaleur nucléaire…

Ce changement appliqué pour établir le DPE diviserait ainsi – facialement – par près de deux la consommation en énergie primaire des logements chauffés à l’électricité, sans aucune rénovation.

Une passoire tout électrique n’en serait plus une, une passoire chauffée au gaz ou au fioul pourrait remonter d’une à plusieurs classes

Une passoire tout électrique n’en serait plus une, une passoire chauffée au gaz ou au fioul pourrait remonter d’une à plusieurs classes (et donc être louée quelques années de plus) par le simple remplacement par une chaudière neuve, une PAC ou dans certains cas, par des convecteurs électriques.

Si cela permettait de « mathématiquement » et artificiellement supprimer les passoires énergétiques du parc de logement français, les ménages, eux, auraient toujours aussi froid, voire plus encore… puisque l’électricité coûte très cher pour se chauffer.

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