M. Joly examine les principaux éléments de la violence morale qui définissent la méthode d’Emmanuel Macron. L’absence totale d’empathie et, de manière générale, la négligence des véritables obstacles existants, la capacité à plonger ses interlocuteurs dans des situations bloquantes en tenant des discours contradictoires et incohérents, ainsi que la tendance à toujours ramener les échanges à sa propre personne, sont des caractéristiques typiques du manipulateur pervers. En analysant le cas Macron et le succès singulier d’une telle personnalité, M. Joly perçoit un phénomène social contemporain.
« Un homme riche en discours, mais un homme dépourvu de parole » : c’est ainsi que le psychanalyste Paul-Claude Racamier a décrit le modèle type du pervers narcissique. Le comportement du président actuel semble en effet correspondre à cette définition, tout en illustrant d’autres traits associés à cette catégorie psychopathologique, qui, il est vrai, a été un sujet à la mode depuis plus de deux décennies.
Alors qu’il réalisait une étude approfondie sur les violences sexistes et sexuelles, la détresse des victimes et les efforts des associations qui les soutiennent, le sociologue Marc Joly a été interpelé par les similitudes existant tant entre le comportement des hommes responsables de maltraitances psychologiques et celui d’Emmanuel Macron au pouvoir, qu’entre le récit des victimes de ces abus et celui des citoyens confrontés aux politiques et aux discours présidentiels. C’est ainsi qu’il a élaboré un ouvrage d’intervention, à la fois sociologique et politique, intitulé « La pensée perverse au pouvoir », récemment publié par les éditions Anamosa.
Aux côtés de Julien Théry, qui l’invite dans ce nouveau numéro d’« On s’autorise à penser », M. Joly reprend les principaux éléments de la violence morale propre au style de conduite d’E. Macron. L’absence de toute empathie et plus généralement le refus de considérer réellement les obstacles présents, l’habilité à placer ses interlocuteurs dans des situations sans issu à travers des discours incohérents et contradictoires (appelé la « paradoxalité perverse »), ainsi que la tendance à toujours ramener le dialogue à soi-même, représentent des traits caractéristiques du manipulateur pervers. En observant le cas Macron et l’ascension singulière d’un tel individu, M. Joly révèle un phénomène social actuel : la compensation du déclin historique des grandes autorités et de la violence symbolique qu’elles imposaient pour faire accepter aux dominés leur statut subalterne, par une montée d’une violence psychologique perverse observable tant dans les dynamiques de couple que dans les relations professionnelles et dans la sphère politique.