Moji : Dans nos sons, on raconte un peu ce qu’on vit. C’est vraiment les récits de notre vie et de nos mésaventures. Mettre l’amour plus en avant qu’autre chose, c’est pas vraiment voulu, mais c’est surtout parce que c’est ce qu’il y a de plus intense.
Vous êtes comme ça dans la vraie vie ou c’est un perso que vous jouez ?
Sboy : Non pas du tout. Quand on écrit, on prend du recul pour bien réfléchir à ce qu’on veut dire et ne pas dire. On prend le temps de mettre des mots sur nos sentiments. Alors qu’en vrai, dans la vie de tous les jours, c’est plus direct, plus brut, et parfois très maladroit. On est naturels, et on n’arrive pas avec une rose à la bouche.
Moji : En fait, en vrai, on n’est pas aussi démonstratifs. Nos sons nous servent justement à montrer ce qu’on ne montre pas dans la vraie vie.
« Perso j’ai une sœur, et Moji est très proche de sa mère. Que ce soit en amour ou en famille, on respecte énormément les femmes. » – Sboy
En quoi le manga, que ce soit sur la cover de Ma go, Regarde-moi, ou sur votre compte insta y contribue ?
Moji : Le manga a un peu créé notre univers sans qu’on le veuille. Ça s’est fait naturellement. On n’avait pas vraiment le budget nécessaire pour un clip à nos débuts, donc on s’est dit qu’on allait faire une image, la monter, et mettre les paroles en sous-titres. Je pense que c’est ça qui a joué sur la viralité du morceau. Ça a permis de nous identifier musicalement.
Ce côté lover entre aussi en jeu dans vos prods ?
Sboy : Les prods c’est soit on kiffe soit on kiffe pas. On va pas chercher plus loin. Vu qu’on est deux, elles doivent nous plaire à nous deux et il faut qu’on puisse se voir en train de poser dessus. D’ailleurs, on fait aussi attention à la cohérence de ce qu’on pourrait proposer, et les sons qu’on fait en général.
Cette sensibilité traduite dans vos paroles, c’est pas mal en contraste avec le côté parfois agressif voire misogyne du rap. C’est voulu ?
Moji : C’est pas calculé. On fait attention à ce qu’on écrit, parce qu’on ne va pas laisser une phrase qui peut porter à confusion dans un morceau.
Sboy : Perso j’ai une sœur, et Moji est très proche de sa mère. Que ce soit en amour ou en famille, on respecte énormément les femmes. On ne se permettrait pas une once de misogynie qui pourrait être mal interprétée.
« Tu verras jamais des gros culs dans nos clips. C’est mort. On a des petits frères, des petites cousines, des nièces… Je me vois mal arriver et montrer un clip ou ça twerk de tous les côtés. » – Moji
Ça peut basculer à un moment ou c’est un parti pris que vous comptez garder malgré le succès ?
Moji : Tu verras jamais des gros culs dans nos clips. C’est mort. On a des petits frères, des petites cousines, des nièces… Je me vois mal arriver et montrer un clip ou ça twerk de tous les côtés. Même en grandissant, musicalement parlant, je ne pense pas que ça changera.
Sboy : C’est pas notre délire. On va quand même aller chercher plus loin dans les futurs morceaux qu’on sortira, mais on aura toujours une ligne de conduite qui nous guide sur ce qu’on fait et ce qu’on ne fait pas.
Comment vous définissez l’amour ?
Moji : C’est un sentiment très fort que chaque personne sur cette planète peut recevoir et partager. Ce sentiment te procure du bonheur, de l’apaisement et de la sérénité.
Sboy : Je trouve que c’est quelque chose de très discret. Quand t’aimes quelqu’un, tu ne le remarques pas toujours, mais une fois que tu perds un proche, tu te rends compte que l’amour était bien là.
Et vous l’abordez comment concrètement dans vos lyrics ?
Sboy : Si on prend l’exemple de ROCKSTAR, on a voulu aborder l’amour dans sa forme la plus virale. On a fait Ma go, qui est très pur et positif, mais d’un autre côté, l’amour peut dériver sur la haine. Là, on a un peu exagéré sur les sentiments. On n’est pas colériques, mais on a interprété le tout pour que ce soit plus poignant. L’amour, c’est pas que des sons gentils.
« Quand tu sors avec quelqu’un, vient le moment où il faut dire “je t’aime”. Moi, je l’avais jamais dit. C’était un grand pas et ce son m’a aidé à le franchir. » – Sboy
Sboy, dans Pas comme elles tu dis que t’as du mal à dire « je t’aime ». C’est toujours le cas ?
Non ça va. J’ai pris sur moi, Moji m’a un peu conseillé. En vrai, les sons qu’on a sortis retracent tout ce qui s’est passé. Ma go, c’était la déclaration. On se voyait, mais c’était pas concret et on n’était pas vraiment en couple. Pas comme elles, c’est un peu la suite de l’histoire. Quand tu sors avec quelqu’un, vient le moment où il faut dire « je t’aime ». Moi, je l’avais jamais dit. C’était un grand pas et ce son m’a aidé à le franchir.
Et toi Moji, tu dis que t’as aucun regret. C’est véridique ?
Moji : J’image le fait que je n’ai rien à envier à personne. Je vis le moment présent, j’aime ce que je vis avec elle, et j’ai pas de regret, même si ça se finit demain. Je n’aurai jamais aucun regret par rapport à mon passé et ce que j’ai vécu. Ça fait grandir, et ça te rend plus mature.
Du coup, qui est Ma go ?
Sboy : C’est nos gos !
Moji : C’est nos relations respectives. Quand on a écrit Ma go, on vivait la même chose au même moment, et c’est pour ça que l’écriture du morceau a été très fluide. On est très content du succès qu’a eu ce son, mais c’était pas du tout calculé.
On ressent une forte connexion entre vous. Parlez-nous de votre amitié.
Sboy : On est potes depuis toujours. Même nos grands frères se connaissaient. On a eu le même parcours scolaire à partir de la maternelle, même si on a fait qu’une partie de nos secondaires ensemble. On faisait des tas de trucs ensemble. Et un jour, on s’est dit, « viens on fait du son ».
Moji : On est passé par plein d’étapes qui ont fini par déboucher sur la musique. Il était jamais très loin de moi, et j’étais jamais très loin de lui.
Vous avez tout de suite pensé à rapper en duo ?
Sboy : À aucun moment on s’est dit qu’on allait la jouer perso. On s’est même jamais posé la question, c’était comme une évidence.
Moji : Il écrivait ses textes, et je les connaissais tous par cœur et vice-versa. On impressionnait un peu les autres parce qu’on avait cette force d’être à deux : si j’avais plus de respiration à la fin d’un couplet, il disait le mot qui fallait.
Et Luv Resval a pu trouver sa place ?
Sboy : Bien sûr. C’est un peu le troisième prince qui est venu s’ajouter. Il s’est greffé, que ce soit visuellement ou musicalement. Il avait largement sa place sur le son et le temps qu’il fallait pour le préparer.
Qui a eu l’idée pour CHIMIQUE ?
Moji : C’est moi. On cherchait un banger, mais on n’en trouvait pas. Du coup, j’ai cherché de mon côté. Je suis tombé sur cette prod et j’ai directement commencé à écrire. J’ai posé ça au studio, puis Sboy a écrit de son côté. En fait, le confinement nous a fait réaliser qu’il manquait quelqu’un. On avait déjà parlé avec Luv Resval sur les réseaux auparavant. Là, on l’a DM, on lui a envoyé le son, on s’est capté à Paname et ça s’est fait naturellement.
Votre mixtape Temps d’aime vient tout juste de sortir. Vous vous attendez à quoi ?
Sboy : On sait que c’est le tout premier projet qu’on sort. On a voulu faire une mixtape pour ne pas arriver directement avec un album. Un album, c’est plus aboutit. On voulait ajouter une première brique à ce qu’on sortira plus tard.
On reste dans votre registre musical habituel ?
Moji : Je pense que des couleurs s’ajoutent, même si c’est plus des mélanges que des ajouts. On a été puiser des influences musicales qu’on avait depuis très longtemps, parce qu’on a toujours écouté un peu de tout, et on a mélangé le tout sans se travestir pour autant.
Sboy : Ce projet nous a permis de faire ce qu’on avait pas eu le temps de faire jusqu’à présent. On avait sorti que six sons avant Temps d’aime ; c’est très peu. Mais on ne s’est pas du tout forcés. C’est une plus grande palette qui permet de mieux nous comprendre musicalement.
« On a pris le temps de tester, de gérer la potion, et là, je pense qu’on a trouvé la bonne recette. » – Moji
Y’a des influences rock aussi. On voit bien que vous êtes sorti de votre zone de confort…
Sboy : C’était pas prévu. Au stud, on était face à un BPM assez rapide, le producteur a posé les drums dans un style rock et on s’est dit OK, on teste.
Moji : On a fait notre premier son rock il y a un an et demi. C’était Si Vénus Était Mauve, et je pense que c’est le plus rock du projet. On s’est dit qu’on pouvait retenter ça avec d’autres sons, se réapproprier un peu cette vibe. On a fait ce son avec OZORA. Il nous a un peu malmenés au début. Il nous faisait tester plein de trucs.
Temps d’aime nous parle d’un amour un peu plus triste, et moins rêveur. On a l’impression de revenir à la réalité.
Sboy : On a pas voulu qu’il y ait le même discours sur chacun de nos sons. Ma Go, c’est l’introduction d’une relation, Medecine, c’est plus intense, on s’aime jusqu’à en mourir, puis on a Les Larmes Des Étoiles, où on est déjà une étape plus loin, et on va encore plus loin avec ROCKSTAR.
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