Après avoir organisé une conférence sur le “bien vieillir” des personnes LGBT mercredi et rencontré le couple gay de “L’amour est dans le pré” jeudi, elle conclut dans ce lycée d’Argenteuil une semaine de déplacements visant à faire la promotion de son plan d’actions LGBT+ lancé le 16 octobre dernier.
À peine le temps d’échanger quelques mots avec le préfet du Val d’Oise et le proviseur du lycée et Élisabeth Moreno prend le chemin du centre de documentation et d’information où l’attendent plusieurs élèves. C’est une lycéenne de 16 ans, Inès, qui se charge de lui faire faire la visite.
“Les thérapies de conversion ne devraient même pas exister”
“Je vais me mettre dans la peau d’une lycéenne et tu vas me présenter l’exposition comme si je n’y connaissais rien”, la prévient d’emblée Élisabeth Moreno. Pas de quoi impressionner la jeune élève qui présentera avec assurance l’exposition et n’hésitera pas non plus à lancer quelques tacles à la ministre.
“Ceux qui disent qu’on peut convertir les personnes homosexuelles ils n’ont rien compris à l’homosexualité”, gronde Élisabeth Moreno devant un panneau consacré à la “médicalisation”. “Les thérapies de conversion ne devraient même pas exister”. “Oui, et je crois qu’il en reste et qu’il faudrait les bannir complètement”, glisse subtilement la lycéenne en référence à la proposition de loi de la députée LREM Laurence Vanceunebrock-Mialon, qui devrait être prochainement discutée à l’Assemblée.
Quelques mètres plus loin, les deux femmes s’arrêtent sur le panneau “Lutter contre les LGBTphobies”. “On pourrait changer ça et écrire ‘lutter pour l’amour’, propose Élisabeth Moreno à Inès. “Bonne idée, rétorque l’adolescente. Tu pourrais le changer si tu deviens ministre un jour”. “Elle est vraiment douée”, s’amuse la ministre en tapant sur son épaule.
Youen TANGUY/HuffPost
En septembre 2019, des amendements visant à ouvrir la PMA aux hommes transgenres avaient été écartés, le gouvernement avançant que c’est “l’identité à l’état civil” qui doit primer.
Le documentaliste précise que l’exposition a été “particulièrement vue et que les ouvrages en lien avec la thématique ont été beaucoup empruntés”. Il stipule toutefois que ça s’est fait “discrètement”. Preuve qu’il reste encore du travail pour démocratiser ces sujets à l’école.
Féministe? Je ne sais pas, je suis juste normale. Tout le monde devrait être féministe, non?
“Est-ce que vous êtes féministe?”, demande Elisabeth Moreno à une lycéenne, Imen, pendant un échange sur les violences faites aux femmes. “Je ne sais pas, je suis juste normale, répond-elle. Tout le monde devrait être féministe, non?”
À l’instar de sa collègue Inès, l’adolescente de 17 ans n’est visiblement pas intimidée par la ministre. Alors que cette dernière rappelle que les violences faites aux femmes sont “la grande cause du quinquennat d’Emmanuel Macron” et que ces violences sont “inacceptables”, la lycéenne la coupe: “On sait qu’il faut que ça s’arrête, tonne-t-elle. Mais c’est à vous de nous dire quand ça va s’arrêter”.
Les prises de parole s’enchaînent et les discussions se libèrent doucement. Elisabeth Moreno rappelle qu’un plan a été lancé contre les LGBTphobies et que la première chose à faire est “de parler, pour ceux qui le peuvent”. “Se taire, c’est grave. C’est parce qu’on va y aller tous ensemble qu’on y arrivera”, plaide-t-elle.
Temps d’échange sur les personnes trans
Elle demande ensuite à plusieurs élèves s’ils ont, dans leur entourage, des personnes homophobes. Une lycéenne lève timidement la main. “Oui, mon père. J’avais organisé une petite fête à la maison et il n’a pas supporté que j’invite un ami gay, me disant qu’il “n’était pas comme nous’”, confie-t-elle avant de s’effondrer en larmes.
La ministre se lève pour aller la réconforter et la jeune lycéenne reprend: “Je lui ai tenu tête et j’ai refusé de dire à mon ami de partir, mais j’ai été punie pendant deux semaines”. “Vous êtes extrêmement courageuse”, lui répond Elisabeth Moreno qui souligne l’importance de son action pour faire “changer la honte de camp”. “Il faut que la honte pèse sur les personnes homophobes et pas sur les personnes LGBT+.”
Youen TANGUY/HuffPost
“Mandela disait une chose; ‘l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde’, conclut Elisabeth Moreno. Et notre monde est en train de changer.”
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