INTERNATIONAL – Russie, Birmanie, Venezuela, Hong Kong, Bélarus: les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont tenté de peser ce lundi 22 février contre les violations des droits fondamentaux dans ces pays, mais les sanctions ciblées européennes ont peu d’effet, déplorent les partisans d’actions plus résolues.
Interrogé par Le HuffPost, Charles Tenenbaum, maître de conférence à Sciences Po Lille et chercheur au CERAPS (Centre d’Études et de Recherches Administratives Politiques et Sociales) a détaillé le fonctionnement et le véritable rôle de ces sanctions dans notre vidéo en tête de cet article.
Cette “stratégie de stigmatisation des mauvais élèves du jeu international” n’est pas toujours bien perçue. Ainsi, les proches de l’opposant russe Alexeï Navalny se sont dits déçus de l’accord de l’UE qui ne vise que quatre hauts fonctionnaires russes impliqués dans les procédures judiciaires engagées contre l’opposant et dans la répression menée contre ses partisans.
En décidant de telles sanctions, l’UE ne veut pas couper les ponts avec Moscou et cherche une riposte adaptée à la dérive autoritaire de la Russie. “Nous devons être capables de la contrer lorsqu’elle franchit les lignes rouges sur les droits de l’homme, de réagir quand elle nous menace et de nous engager avec elle sur les sujets pour lesquels nous avons des intérêts à défendre”, a expliqué Josep Borrell. “Les sanctions visent les personnes qui sont responsables de l’arrestation d’Alexeï Navalny, de ses condamnations et de ses persécutions”, a-t-il souligné.
Distribution de sanctions
“Il n’est guère possible de sanctionner les oligarques. Nous ne pouvons agir que contre des fonctionnaires, et cela uniquement si nous avons des preuves”, avait expliqué le chef de la diplomatie du Luxembourg Jean Asselborn avant la réunion. Les sanctions européennes consistent en une interdiction de visa et un gel des avoirs dans l’UE pour les personnes ou entités concernées.
Les ministres ont également décidé de sanctionner les militaires responsables du coup d’État en Birmanie. “Les mesures européennes vont frapper leurs intérêts, car dans ce pays, les militaires sont des entrepreneurs et ils détiennent des pans de l’économie”, a annoncé Josep Borrell.
Ils ont par ailleurs sanctionné les atteintes à la démocratie et à l’État de droit commises par le régime de Nicolas Maduro au Venezuela avec l’inscription de 19 hauts fonctionnaires sur la liste noire de ce pays qui compte désormais 55 noms.
Les ministres ont également décidé lundi le principe de nouvelles sanctions contre la répression menée à Hong Kong, où le principe “un pays, deux systèmes” est remis en cause par la Chine.
Ils ont enfin annoncé envisager de nouvelles mesures contre le pouvoir au Bélarus. Mais trois trains de sanctions ont déjà été adoptés contre le régime et le président Alexandre Loukachenko a été inscrit sur la liste noire sans aucun effet. Et le soutien affiché de Vladimir Poutine conforte Minsk.
Des mesures inefficaces ?
Si de nombreuses critiques estiment que les sanctions prises par l’Union européenne sont vaines, Charles Tenenbaum se veut moins catégorique. Pour lui, il est très difficile de juger de l’impact de ces mesures, car tout dépend de la grille de lecture. Si la Russie n’avait pas été sanctionnée lors de l’annexion de la Crimée en 2014, les conséquences n’auraient-elles pas pu être pires? Cependant, elles n’ont pas non plus conduit Vladimir Poutine à retirer ses troupes du territoire. Alors, est-ce un succès ou un échec?
“C’est un débat toujours difficile à trancher” affirme Charles Tenenbaum. Selon lui, les sanctions tiennent ainsi davantage de l’ordre du symbolique mais peuvent avoir un réel impact en termes d’image sur la scène mondiale. “Dans un monde où l’image, la réputation, la diplomatie publique comptent de plus en plus, cette dimension symbolique n’est pas négligeable”, affirme-t-il.
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