Dépêchée à la frontière franco-belge où les contrôles se multiplient pour retrouver le suspect en fuite au lendemain des attaques qui ont fait 131 morts et 350 blessés, la journaliste interroge les conducteurs des voitures. “D’où venez-vous et que pensez-vous de ces contrôles?”, demande-t-elle.
“Celui-là, c’est le troisième. Troisième contrôle. Franchement, on a trouvé ça un peu abusif. Mais on a compris un petit peu le sens de… Le pourquoi. Après, on a su le pourquoi”, répondent les trois passagers d’une voiture. Le contrôle terminé et les papiers récupérés, la voiture part. “Ils m’ont un peu éjectée”, se souvient la reporter. Elle ne se doute absolument pas que parmi eux se trouve Salah Abdeslam, soupçonné d’être le seul membre encore en vie du commando des attentats du 13 novembre 2015.
Une conversation enregistrée en prison
Son pressentiment sera confirmé plusieurs mois plus tard, alors que Salah Abdeslam, qui a été retrouvé, est en prison depuis son arrestation le 18 mars 2016 à Molenbeeck, près de Bruxelles. Dans une conversation avec des détenus et retranscrite dans un procès-verbal que la RTBF s’est procurée, le terroriste déclare : “J’ai parlé en me référant aux infos du journal. “Elle [la journaliste] me dit : ‘Vous trouvez ça normal qu’il y ait des barrages comme ça ?’. J’ai dit : ‘Oui, c’est normal vu les circonstances, il faut bien renforcer les barrages.’”
Sans cette preuve, Charlotte Legrand serait encore en proie au doute. Mais elle l’avoue, en apprenant la vérité, elle a ”éprouvé un certain malaise. Je craignais qu’on m’accuse d’avoir manqué de discernement lors de cette interview. Je me suis sentie bizarrement un peu coupable. Et puis, je me remémore les faits. A ce moment-là, je n’avais tout simplement pas les éléments pour reconnaitre Abdeslam. Ni moi, ni la police”.
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